En moins de temps que prévu, la ville de Qousseir est tombée entre les mains des forces du régime aidées par les combattants du Hezbollah. De l’avis de tous les connaisseurs, cette victoire est stratégique pour la suite des développements en Syrie, en raison de la position centrale de la ville et de la province qui l’entoure, reliant à la fois le nord du pays au sud, et l’est à l’ouest. En même temps, la ville de Qousseir et ses environs sont situés à quelques kilomètres de la frontière libanaise, au niveau de la Békaa. En reprenant le contrôle de cette zone, les forces du régime syrien peuvent désormais fermer la frontière avec le Liban au niveau de Ersal et des projets de Kaa qui constituent depuis deux ans une voie ouverte aux combattants de l’opposition et aux armes qui leur sont destinées, la circulation dans ce secteur se faisant d’ailleurs dans les deux sens. Un grand nombre de combattants de l’opposition se sont réfugiés hier dans les localités syriennes de Dabaa (dont l’aéroport est aux mains de l’armée) et de Bouwayda, mais toutes les deux ne sont pas des positions tenables à long terme.
La chute de Qousseir et de la région qui l’entoure entre les mains de l’armée syrienne est donc un grand coup pour l’opposition syrienne et pour les groupes islamistes qui l’appuient concrètement au Liban. Mais des sources sécuritaires libanaises craignent une réaction de la part de ces forces. Hier, tous les yeux étaient tournés vers Tripoli, dans la perspective d’un soudain « réchauffement du front » entre Jabal Mohsen et Bab el-Tebbaneh. Mais la vraie menace, estiment les mêmes sources sécuritaires, réside dans la possibilité de l’ouverture d’un nouveau front, avec le Hezbollah cette fois, à partir du jurd de Denniyé et du Akkar avec la Békaa-Nord. Dans cette région montagneuse, qui a déjà connu des affrontements, mais avec l’armée cette fois, pendant le réveillon de l’an 2000, les combattants islamistes jouissent d’une grande liberté d’action, d’autant que le jurd de Denniyé est relié au Akkar, dont certaines localités sont quasiment investies par les combattants de l’opposition syrienne avec leurs familles. Les sources sécuritaires précitées laissent entendre que ce serait là le scénario sous-entendu par le député de Tripoli Mohammad Kabbara, lorsqu’il a lancé mardi un ultimatum à l’armée pour qu’elle se déploie entre les belligérants à Tripoli.
Il s’agirait en quelque sorte de neutraliser l’armée libanaise pour pouvoir se consacrer à combattre le Hezbollah accusé de traîtrise puisqu’il a aidé l’armée syrienne à Qousseir. Les sources sécuritaires précitées révèlent ainsi qu’une réunion a regroupé il y a deux jours les députés Mouïn Meraabi et Khaled Daher ainsi que Houssam Sabbagh, et les cheikhs Salem Raféi et Nabil Rohayem, tous proches de l’opposition syrienne et favorables à la mouvance islamiste, pour étudier les possibilités de riposte au cas où la ville de Qousseir tomberait entre les mains du régime. Ce qui était prévisible, selon toutes les estimations des chroniqueurs militaires.
Les informations ayant filtré de cette réunion révèlent l’intention des participants de mener une vaste campagne contre l’armée libanaise qui, selon eux, n’a jamais été considérée, dans le langage confessionnel, comme une force alliée à la communauté sunnite. Avant Taëf, elle était accusée d’être contrôlée par les chrétiens et désormais, elle est accusée d’être aux mains des chiites. Les mêmes sources sécuritaires rappellent toutefois que ces accusations sont totalement injustifiées, l’armée libanaise étant encore la seule institution publique qui rassemble toutes les communautés et les pousse à travailler ensemble. Cette institution est aujourd’hui la cible d’une campagne de dénigrement sans précédent, des figures de Tripoli – et de Saïda – allant même jusqu’à monter les soldats les uns contre les autres, en les classant selon leurs confessions. Mais le plus significatif est que l’armée n’est plus seulement la cible de critiques verbales, à Tripoli ; ses soldats essuient désormais des tirs provenant de jeunes à visage découvert. Autrement dit, ces combattants se sentent tellement protégés qu’ils ne craignent plus de montrer leur visage.
De même, toujours dans la capitale du Nord, les soldats de l’armée sont empêchés de construire des fortifications autour de leurs positions, alors que les miliciens ont érigé de véritables barricades des deux côtés « de la ligne de front »...
Il est donc clair, estiment les mêmes sources sécuritaires, qu’il existe quelque part au Liban une main secrète qui veut détruire la cohésion de l’armée pour ouvrir la voie à une confrontation directe entre les communautés chiite et sunnite, dans le but d’affaiblir le Hezbollah et de l’entraîner dans les sables mouvants d’un affrontement interne destructeur pour lui et pour sa popularité auprès de la communauté chiite. De leur côté, les figures sunnites de Tripoli et d’ailleurs ne sont pas en train de prendre des positions claires en faveur de l’armée, par crainte de perdre leur popularité face à la montée en flèche des groupes radicaux. Jusqu’à présent, le Hezbollah cherche à éviter toute confrontation, Hassan Nasrallah ayant clairement invité ceux qui critiquent les positions de sa formation à aller se battre en Syrie aux côtés de l’opposition syrienne, au lieu de mettre en danger la stabilité du Liban. Mais en attendant, c’est l’armée libanaise qui reçoit les coups, puisque, de par la nature de sa mission, elle est en train de s’interposer entre les deux camps. Les sources sécuritaires précisent d’ailleurs que la situation est actuellement délicate, les incidents se multipliant du Nord au Sud, en passant par Beyrouth, alors que les camps palestiniens, en particulier celui de Aïn el-Héloué, constituent des foyers de tension de plus en plus inquiétants.
À peine annoncée, la victoire de l’armée syrienne et des miliciens du Hezbollah à Qousseir a suscité des manifestations de joie parmi les résidents de la banlieue sud de Beyrouth. Les partisans du Hezbollah, qui a soutenu les forces du régime Assad pendant plus de trois semaines dans ce qui était l’un des bastions de la rébellion syrienne, n’ont rien fait pour cacher leur joie. Des pancartes annonçant la chute de la ville se sont répandues un peu partout dans la banlieue sud, et des coups de feu festifs ont été tirés par des éléments armés circulant à bord de voitures.
Les automobilistes de passage dans la banlieue se sont vu offrir des douceurs arabes pour célébrer « la promesse de victoire tenue par Hassan Nasrallah ». « Le sang de nos enfants a permis une telle victoire. Ils ne sont pas morts pour rien », répétaient les parents des victimes du Hezbollah, mortes à Qousseir. « C’est l’intervention de l’élite des combattants du Hezb qui a finalement fait pencher la balance », affirmaient les partisans du parti chiite.
La victoire d’hier n’a pourtant pas empêché le parti de Dieu de renforcer les mesures sécuritaires dans la banlieue, qu’il avait prises avec le début de l’assaut contre Qousseir. Par peur d’une réaction de l’opposition syrienne et de crainte que les menaces de l’Armée syrienne libre contre le Hezb ne soient mises à exécution, ces mesures, qui consistent à effectuer des perquisitions dans les maisons et immeubles se situant autour des bureaux du parti, se sont intensifiées.
Néanmoins, il semblerait que les habitants de la région ne soient aucunement importunés par les menaces de l’ASL. « Nous nous attendons à des voitures piégées », avouait l’un d’eux, sans inquiétude palpable.
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commentaires (10)
Y en a qui écrivent des articles du jour et apparemment Alehzeimer fait en sorte qu'ils oublient ce que les autres ont déjà dit les semaines précédentes. Déjà le titre : UN FRONT INTERNE POUR VENGER QUOUSSEYR !!! Depuis des semaines, tous, ICI et ailleurs...Avertissions, informions, prévenions, alertions ( faut il user d'autres verbes pour nous faire comprendre??) que par le fait de l'implication des intégristes chiites dans la guerre en syrie...Le retour de baton sera au liban et sera dur dur...Maintenant certains, comme l'auteur et ses sources "découvrent" qu'un front sera ouvert "pour venger"!!! Mais dans tous les cas, ce front sera ouvert du simple fait de l'implication flagrante, organisée et par milliers de la milice islamiste intégriste du hezbollah... Puis?? En fin d'article: On nous parle de la crainte des "voitures piégées" dans la zone de "non droit" en banlieue sud ...En d'autres termes, ces milices chiites du hezbollah s'approchent et secouent "la mer.e" et croient que les odeurs et mouches ne seront pas au rendez vous?? Ils prennent les gens pour des naifs?? Si leurs populations et adeptes chiites dépendant financièrement de cette milice armée croient ces barbus chiites , sur parole ? La majorité des libanais, heureusement, n'est pas aussi naive. Parole de "non barbu".
jean-Pierre EL KHOURY
11 h 28, le 07 juin 2013