L'armée syrienne a annoncé avoir lancé un appel vendredi aux habitants de Qousseir, dans le centre du pays, pour quitter la ville avant un assaut imminent.
"Des tracts ont été lancés par avion sur Qousseir, demandant aux civils de quitter la ville en indiquant une route sécurisée pour l'évacuation, car l'attaque contre la ville est proche si les rebelles ne se rendent pas", a affirmé à l'AFP une source militaire qui a requis l'anonymat.
"Je suis à Qousseir et j'ai visité ce matin deux villages proches et je peux vous assurer qu'aucun tract n'a été largué sur la ville. Mais ce qui est plus inquiétant c'est qu'il n'y a aucune issue sécurisée pour les civils", a déclare à l'AFP Hadi al-Abdallah, qui s'est adressé à l'AFP à Beyrouth via Internet.
"Nous sommes tous ici condamnés à une mort lente par le régime. Chaque fois que des civils cherchent à quitter la ville, il y a des tirs et des bombardements à la lisière de Qousseir par des tanks et des tireurs embusqués", a ajouté ce membre de la Commission générale de la révolution syrienne.
Les troupes syriennes, appuyées par les combattants chiites du Hezbollah libanais ont avancé en direction de Qousseir, tenue par les rebelles depuis plus d'un an. Selon des militants, la ville, à 35 km au sud de Homs, est encerclée de trois côtés par les forces gouvernementales et 25.000 habitants s'y trouveraient encore.
La ville et ses environs sont stratégiques pour les rebelles, en raison de la proximité avec le Liban et parce que les insurgés peuvent fermer la route reliant Damas à la côte depuis Qousseir, gênant ainsi les mouvements de troupes.
(Reportage : Ces Libanais prêts à mourir pour le Hezbollah en Syrie...)
Nouvelle vidéo des Casques bleus philippins
Par ailleurs, des rebelles en Syrie ont mis en ligne une nouvelle vidéo montrant quatre Casques bleus philippins capturés mardi.
"La direction de la Brigade des martyrs de Yarmouk revendique l'opération par laquelle elle a évacué quatre membres de l'ONU pour leur sauver la vie, d'une zone de combat entre (ses hommes) et les criminels des gangs de (Bachar) el-Assad", a indiqué un porte-parole sur la vidéo. L'objectif était de "protéger (les soldats de l'ONU) des combats violents et des bombardements menés par les forces régulières", a ajouté le rebelle. Les quatre Philippins sont apparus assis sur des chaises en face du rebelle, et paraissaient en bonne santé.
Déployés dans la zone tampon entre la Syrie et Israël pour surveiller le cessez-le-feu, les quatre Philippins qui font partie de la FNUOD (Force d'observation du désengagement sur le Golan), ont été capturés près de la localité d'Al-Jamlah, selon l'ONU. C'est la deuxième vidéo sur ces Casques Bleus mise en ligne par les rebelles depuis leur capture.
Les Philippines ont déclaré vendredi qu'elles souhaitaient le retrait aussitôt que possible de ses Casques bleus au sein de la FNUOD. Ce dernier enlèvement intervient seulement deux mois après que 21 autres soldats philippins avaient été faits prisonniers quatre jours durant dans la même zone. L'ONU se plaint régulièrement d'incursions de l'armée syrienne et des rebelles dans la zone de séparation sur le Golan.
Pas de missiles russes S-300 à Damas
Au niveau diplomatique, le président russe Vladimir Poutine a déclaré vendredi avoir discuté avec le Premier ministre britannique David Cameron, en visite en Russie, "des options possibles pour un développement positif de la situation" en Syrie, alliée traditionnelle de Moscou, et "des démarches concrètes à cet égard".
M. Cameron a de son côté indiqué que même si les points de vue de la Russie et la Grande-Bretagne sur le règlement de la crise syrienne différaient, les deux pays cherchaient le même but, mettre fin au conflit et enrayer l'extrémisme dans le pays.
Les discussions entre M. Poutine et M. Cameron, qui doit rencontrer lundi le président américain Barack Obama à la Maison Blanche, interviennent dans un contexte d'intenses tractations internationales destinées à chercher une solution au conflit qui a fait plus de 70.000 morts en deux ans.
Le secrétaire d'Etat américain John Kerry, en tournée en Europe, a enchaîné ces trois derniers jours les rencontres, en grande partie consacrées à la Syrie. En visite mardi en Russie, M. Kerry s'est entendu avec Moscou pour organiser d'ici à la fin mai une conférence internationale afin de trouver un règlement politique conforme à un accord conclu à Genève le 30 juin 2012 entre les grandes puissances. Cet accord ne précise pas le sort du président Assad et l'opposition syrienne continue de considérer son départ comme une condition préalable à toute discussion.
C'est dans ce contexte de rapprochement russo-américain que le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a annoncé vendredi que son pays n'a pas l'intention de vendre des missiles antiaériens S-300 à la Syrie, démentant les informations de certains médias à propos d'une telle vente.
Jeudi, Israël avait demandé à Moscou de ne pas vendre à Damas de telles armes capables d'atteindre des avions ou des missiles dans un rayon de 200 km.
Sergueï Lavrov, cité par l'agence de presse russe Itar-Tass, a indiqué que la Russie honorerait les contrats déjà conclus avec Damas, mais a ajouté que ceux-ci ne prévoyaient pas la vente de S-300.
Hagel et la politique
Par ailleurs, le secrétaire américain à la Défense Chuck Hagel a souligné que les solutions aux problèmes du Moyen-Orient, notamment le conflit en Syrie ou la perspective d'un Iran doté de l'arme nucléaire, sont "politiques, pas militaires". Dans ce cadre, le rôle des Etats-Unis est "d'aider à influer sur le cours des événements" aussi bien par des moyens diplomatiques, économiques, humanitaires, que militaires "en coordination avec nos alliés", a ajouté le ministre, un ancien du Vietnam depuis réticent à engager l'armée américaine dans des conflits.
Le vice-président Joe Biden a, pour sa part, souligné que l'administration américaine actuelle était extrêmement prudente dans le dossier syrien car elle avait à l'esprit les erreurs commises à son sens lors de l'invasion et l'occupation de l'Irak en 2003.
Assurant dans un entretien au bimestriel Rolling Stone que l'équipe du président Barack Obama avait restauré l'image des Etats-Unis dans le monde, M. Biden a expliqué que "nous ne voulons pas tout gâcher comme la précédente administration (de George W. Bush) l'a fait en Irak, en disant +armes de destruction massive+". Ces armes, prétexte à l'invasion de mars 2003, n'ont jamais été retrouvées après la chute du régime de Saddam Hussein.
C'est a priori la première fois qu'un haut responsable de l'exécutif américain établit aussi clairement le lien entre la décision d'envahir l'Irak il y a dix ans et l'attitude actuelle de Washington face à la Syrie.
Le gouvernement américain a évoqué pour la première fois il y a deux semaines le probable recours du gouvernement syrien à son stock d'armes chimiques, mais M. Obama a affirmé que les preuves n'étaient pas encore suffisamment solides pour déterminer qu'une "ligne rouge" avait été franchie par le régime syrien.
Vendredi, John Kerry a toutefois déclaré que les Etats-Unis pensaient détenir une "preuve solide" de l'utilisation d'armes chimiques par le régime syrien. Au cours d'un dialogue avec des internautes organisé par Google, la télévision NBC et le département d'Etat, M. Kerry a dénoncé les "choix terribles qu'a fait le régime (du président Bachar el-)Assad par sa volonté de tuer entre 70.000 et 100.000 personnes de son propre peuple, d'avoir recours à des gaz pour lesquels nous pensons avoir la preuve solide de leur utilisation".
Un avis partagé par le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan qui a assuré que Damas a utilisé des armes chimiques et a "franchi depuis longtemps" la ligne rouge fixée par les Etats-Unis, sans toutefois donner d'autres détails de lieu ou de date sur l'utilisation de ces armes.
"Nous voulons que les Etats-Unis assument plus de responsabilités et s'engagent davantage. Nous allons discuter ensemble très prochainement des mesures qu'ils pourraient prendre", a déclaré M. Erdogan, qui doit rencontrer Barack Obama jeudi prochain, dans un entretien à la chaîne de télévision américaine NBC News diffusé jeudi soir.
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commentaires (7)
Bande de terroristes & co!
Ali Farhat
11 h 32, le 11 mai 2013