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Liban - Éclairage

Incertitudes locales... et régionales

Le départ du gouvernement Mikati et la reprise en main par l’Arabie saoudite du dossier libanais continuent de susciter de nombreuses interprétations. La dernière version consiste à croire que l’Arabie saoudite, par la personne de l’émir Bandar ben Sultan qui occupe actuellement les fonctions de chef des SR saoudiens, aurait décidé de reprendre la main car la scène sunnite libanaise menaçait de s’effondrer. Selon cette version, en acceptant de présider le gouvernement après la chute du gouvernement de Saad Hariri, Nagib Mikati a profondément divisé la communauté sunnite. En dépit de toutes ses tentatives pour se réconcilier avec le courant du Futur et des décisions multiples qu’il a prises pour préserver son influence au sein de l’appareil administratif et sécuritaire, il n’a pas réussi à combler le fossé avec Saad Hariri et l’Arabie. De plus, plusieurs formations et composantes sunnites ont profité de cette division pour prospérer et se multiplier, jouant l’un contre l’autre et gagnant du terrain au sein de la communauté avec un financement en provenance de diverses sources. Ce qui a augmenté la confusion et les risques de conflits au sein de la communauté, les groupes ayant souvent des agendas différents. Il fallait donc remettre de l’ordre dans tout cela. C’est pourquoi l’émir Bandar aurait décidé d’intervenir, en commençant par exiger la chute du gouvernement Mikati et la reprise en main de la scène sunnite libanaise en mettant un terme à la division provoquée, selon lui, par le Premier ministre et ceux qui l’ont amené au pouvoir. En même temps, l’émir saoudien sait que le rapport des forces au Liban ne permet pas à l’heure actuelle le choix d’une personnalité jugée provocatrice par la communauté chiite. Le choix s’est donc fixé sur Tammam Salam qui est la figure la plus modérée du bloc parlementaire du Futur.


Le camp adverse a saisi la balle au bond, choisissant d’appuyer le choix saoudien, mais les problèmes ne sont pas réglés pour autant. Si la désignation de Tammam Salam a donc été facile, le processus de formation du gouvernement devrait l’être beaucoup moins. Une source diplomatique arabe estime à cet égard que le futur cabinet dépend du sort de la loi électorale. S’il y a une entente sur ce dossier, la composition du gouvernement devient secondaire, puisqu’il aura pour mission d’organiser les élections avec un minimum de neutralité et de crédibilité.


La source diplomatique arabe estime ainsi que trois scénarios sont possibles, surtout après la séance parlementaire de mercredi après-midi au cours de laquelle les délais électoraux ont été suspendus pour un mois, ce qui est interprété comme un signe de bonne volonté de la part du 14 Mars et représente un compromis acceptable, le bloc du Changement et de la Réforme ayant accepté de réduire la durée de la suspension et l’opposition ayant accepté le principe de cette suspension au grand dam de Walid Joumblatt qui s’est retrouvé pratiquement seul dans son boycott de la séance.
Le premier scénario prévoit que le climat positif entre le 14 Mars et le camp adverse se poursuit et que tous deux parviendront à s’entendre sur une nouvelle loi électorale. Auquel cas, le gouvernement de Tammam Salam sera un gouvernement d’organisation des élections à la durée de vie limitée (au maximum six mois) avec des ministres acceptables pour tous.


Le deuxième scénario prévoit qu’au lieu de s’entendre sur une nouvelle loi électorale, les deux camps rivaux s’entendent sur un report des élections pour une période déterminée (un ou deux ans). Dans ce cas, le gouvernement de M. Salam sera un gouvernement acceptable pour toutes les parties qui sera chargé de permettre au Liban de traverser cette période incertaine avec un minimum de dégâts, en mettant le pays à l’abri autant que possible des retombées de la guerre en Syrie. Ce scénario suppose aussi une entente sur le dossier présidentiel, le mandat de Michel Sleiman arrivant à terme le 25 mai 2014.


Le troisième scénario est celui où les deux camps ne parviennent pas à s’entendre ni sur une nouvelle loi électorale ni sur une prorogation en douceur du mandat du Parlement. La tâche de Tammam Salam serait alors plus complexe et au final, il formerait un gouvernement qui n’a pas l’approbation du camp adverse. Dans ce cas, si Walid Joumblatt ne modifie pas ses positions à la suite de ce qu’il considère comme un coup reçu mercredi au Parlement, il ne lui accorderait pas sa confiance et le nouveau gouvernement devrait se contenter de gérer les affaires courantes. Dans ce cas de figure, le bras de fer se poursuivra dans le pays et le Liban devrait connaître une période d’instabilité, sans basculer dans le chaos qui reste rejeté par les parties internationales et régionales concernées par le dossier libanais.


Pour l’instant, les parties en présence se contentent de s’observer mutuellement et de tester leurs intentions réciproques. D’autant que la séance parlementaire n’a pas totalement annulé la loi de 1960, dont la menace pourrait de nouveau être brandie, ce qui poussera le président de la Chambre à ressortir le projet grec-orthodoxe. Nul ne saurait donc prédire à l’heure actuelle quel scénario est privilégié. D’autant que les positions des uns et des autres dépendent aussi de la conjoncture régionale et internationale.

 

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commentaires (5)

Succulente analyse! Mais peut-on la cloner ou la reproduire, madame Haddad?? :o) - Moi, je prendrais le premier scenario svp, avec de la sauce aigre-douce... Comment? vous allez voir en cuisine s'il en reste? Ben..s'il n'y en plus.. je prendrais le 2ème scenario avec un contour copieux de beyk du chouf, servi chaud, hein.. heu.. la dernière fois.. on a attendu un peu.. et c'est bien parce qu'on vous aime qu'on est revenus.. avec pour arroser ça une bonne bouteille de Sleiman-Berry Nouveau, svp!

Ali Farhat

13 h 16, le 12 avril 2013

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Commentaires (5)

  • Succulente analyse! Mais peut-on la cloner ou la reproduire, madame Haddad?? :o) - Moi, je prendrais le premier scenario svp, avec de la sauce aigre-douce... Comment? vous allez voir en cuisine s'il en reste? Ben..s'il n'y en plus.. je prendrais le 2ème scenario avec un contour copieux de beyk du chouf, servi chaud, hein.. heu.. la dernière fois.. on a attendu un peu.. et c'est bien parce qu'on vous aime qu'on est revenus.. avec pour arroser ça une bonne bouteille de Sleiman-Berry Nouveau, svp!

    Ali Farhat

    13 h 16, le 12 avril 2013

  • Solution II, niet...solution III,niet...solution I, niet...ce sera donc une solution I,II,III, comme d'hab. Une makhlouta à la libanaise..

    GEDEON Christian

    12 h 04, le 12 avril 2013

  • Les trois derniers mots : Conjoncture Régionale et Internationale, disent beaucoup, mais pas tout. J'ajouterais, après le mot Conjoncture, le mot : Marchandages ! Pour lire : Conjonctures et Marchandages Internationaux et Régionaux... ( et au pluriel, bien sûr...) !

    SAKR LEBNAN

    11 h 49, le 12 avril 2013

  • Scarlett, j'aime vos scenarios:)

    Michele Aoun

    09 h 28, le 12 avril 2013

  • Tous les scénarios sont possible en effet et plus les députés et les forces politiques se permettent de jouer les prolongations plus ils compliquent la situation. C'est pourquoi pour cette fois je suis d'accord avec Joumblatt, il ne fallait ni suspendre, ni retarder, ni proroger, ni... Il faut que les députés et les forces politiques apprennent a respecter les délais, les lois et les règles qu’après tout ils votent. Quand a l'Arabie pourquoi n'a-t-elle pas imposée la démission de Mikati des le début puisqu'elle n'en voulais pas et elle est si puissante? Pourquoi ne pas reconnaître que l'initiative au Liban est enfin revenu aux souverainistes, avec l'appui de l'Arabie et du monde occidentale tout autant car les "moumana3iotes" sont dans la mouises jusqu'au cou et la panique s'empare d'eux? Il n'y a que les partis du 8 Mars qui sont sujet a l’étranger et avec arrogance, les armes au poing. La méthode du "Darabne ou baka, saba2ne ou chtaka" ne passe plus.

    Pierre Hadjigeorgiou

    09 h 19, le 12 avril 2013

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