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Débordée à Majdel Anjar, MSF tente de gérer une situation ingérable

Le grand dénuement des nouveaux arrivants

Une tente, quelques nattes et couvertures déchirées, quelques ustensiles de cuisine... C’est tout ce dont disposent les réfugiés syriens qui viennent d’arriver à Taybé.

Le sourire dans l’infortune.  Photo Anne-Marie el-Hage

Dans un campement de Bédouins à Taybé, à proximité de Baalbeck, une femme d’un certain âge fait la toilette à une flopée d’enfants malingres et déguenillés, en plein air. Ces derniers sont ravis, malgré le froid glacial. Même ceux qui toussent et reniflent. Ils le font savoir fièrement à leurs mères, qui portent les plus jeunes dans leurs bras. L’eau savonneuse, de couleur douteuse, servira aussi à laver les habits. Le liquide est trop précieux pour être gaspillé. Pour s’en procurer, il faut traverser la route et aller en puiser au robinet de la maison cossue d’en face, quelques centaines de mètres plus loin, après en avoir reçu l’autorisation.


C’était un après-midi de février, dans ce camp de Bédouins comme il y en a tant dans la Békaa. Sauf que ces enfants, ces femmes, ces familles qui accueillent avec un large sourire une équipe de Médecins sans frontières sont des réfugiés syriens, nouvellement arrivés de Homs. Au nombre de vingt, plusieurs femmes, onze enfants de moins de neuf ans, trois personnes handicapées mentales et un homme dépressif, ils sont venus grossir les rangs des réfugiés syriens déjà installés depuis quelques semaines. Arrivés il y a quelques jours, ils tentent de survivre grâce à la solidarité de leurs hôtes, les Arabes, comme ils les appellent, dans l’attente de l’aide humanitaire qui ne vient toujours pas.


Dans cette tente qui les abrite, prêtée par les Bédouins, pas de nattes, pas de tapis, pas de matelas, juste le sol dur et rocailleux. Dehors, sur des amoncellements de bois desséché, des nattes et vieilles couvertures déchirées prennent les derniers rayons de soleil. Le coin cuisine, lui, est à peine plus fourni, des ustensiles ménagers y sont savamment rangés. «Chaque famille bédouine nous a fourni quelque chose, avoue une des femmes, reconnaissante. Nos hôtes nous ont même prêté un réchaud. Mais il nous a tous rendus malades. À défaut de pouvoir l’utiliser, nous gelons la nuit, avec nos couvertures de fortune.»


Les mots sont inutiles pour constater le profond dénuement de ces nouveaux arrivants qui manquent de tout. «Notre situation est catastrophique. On ne peut imaginer pire», lance une autre femme, dont le sourire se transforme en larmes. «Nous avons fui notre pays sans le moindre sou et sans nos époux. L’un a été arrêté, le deuxième est soldat, le troisième est malade. » Elle relate la situation invivable à Homs, les deux derniers mois, la guerre, les bombes, les avions au-dessus de leurs têtes, la pénurie de pain, de nourriture, les enfants sans écoles.
Cette mère de plusieurs enfants raconte aussi leur grande précarité, leur misère. Depuis son arrivée, la famille n’a toujours pas reçu la moindre assistance ni la moindre aide alimentaire ou sanitaire. Quelques-uns de ses membres sont pourtant malades. Les enfants toussent et un homme souffre d’une profonde dépression. «Pour ses médicaments, nous avons dû emprunter 50000 LL. L’ONU a refusé de nous aider. Ils ont considéré que nous étions là depuis longtemps. Ils m’ont toutefois remis un papier dont j’ignore le contenu», dit-elle.


Seule, une ONG du coin, Sawa, qui œuvre pour les droits des enfants, s’est présentée au campement pour évaluer les besoins des enfants. «Mais nous n’avons eu que des promesses, affirme la femme, avec résignation. Nous nourrissons nos enfants de riz et de blé concassé. C’est tout ce que nous pouvons nous permettre.»
«Quant à les envoyer à l’école, nous ne l’envisageons même pas», conclut-elle tristement, montrant du doigt tous les enfants déscolarisés.
Indifférents au drame qu’ils vivent, les enfants jouent, courent, rient, heureux d’être, l’espace d’un instant, au centre des préoccupations des grands.

Dans un campement de Bédouins à Taybé, à proximité de Baalbeck, une femme d’un certain âge fait la toilette à une flopée d’enfants malingres et déguenillés, en plein air. Ces derniers sont ravis, malgré le froid glacial. Même ceux qui toussent et reniflent. Ils le font savoir fièrement à leurs mères, qui portent les plus jeunes dans leurs bras. L’eau savonneuse, de...