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À La Une - Éclairage

Entre la politique de dissociation et la stabilité interne...

Depuis que la crise syrienne joue les prolongations, la politique officielle libanaise de dissociation à l’égard du dossier syrien est sans cesse remise en question, à la fois sur le terrain et sur le plan politique. D’abord, le triangle Akkar et Tripoli-Ersal-Saïda connaît en permanence des développements sécuritaires liés à la crise syrienne, qui menacent la stabilité, mais il faut aussi désormais compter avec les développements dans la zone frontalière du Hermel où des villages syriens peuplés de Libanais sont attaqués par les rebelles avec des risques de débordements vers le Liban.


De plus, les incidents sécuritaires liés à la crise syrienne ne sont plus concentrés au Nord, dans la Békaa et à Saïda. On en parle beaucoup moins dans les médias, mais des incidents se produisent régulièrement dans certaines régions où des déplacés syriens se sont installés et se livrent à des règlements de comptes entre eux, comme ce fut le cas à Jiyé, où une femme de Deraa a été tuée dans le cadre d’un conflit tribal. De même, deux habitants de Ersal, militants actifs aux côtés de l’opposition syrienne, ont été arrêtés avec leurs armes alors qu’ils se trouvaient en compagnie d’un dissident de l’armée syrienne, le lieutenant Tlass, à Tarchiche, c’est-à-dire tout près du Mont-Liban. Les autorités libanaises ayant refusé son rapatriement en Syrie, le lieutenant est libre alors que ses deux compagnons libanais sont encore en prison. Enfin, à Chebaa, dans la zone couverte par la résolution 1701, des groupes de militants en faveur de la révolution syrienne ont manifesté en armes. Ils ont d’abord été arrêtés puis relâchés alors que leurs armes ont été confisquées. Pourtant, cette région est particulièrement sensible puisqu’elle est au croisement entre le Liban, la Syrie et Israël.


Ce ne sont là que quelques exemples qui montrent comment le Liban s’implique chaque jour un peu plus dans la crise syrienne. Des sources sécuritaires révèlent qu’il y aurait au Liban plusieurs milliers de combattants syriens, qui pour l’instant se tiennent plus ou moins à l’écart, mais pourraient un jour décider d’utiliser le Liban comme terrain d’action, soit pour mener des opérations vers la Syrie, soit pour régler des comptes avec d’autres Syriens du camp adverse. Face à cette bombe à retardement, l’armée et les FSI sont-elles en mesure de maintenir le calme ?


En même temps, la crise syrienne est aussi devenue un enjeu dans la politique interne, en dépit de la déclaration de Baabda qu’officiellement toutes les parties participant à la conférence de dialogue avaient acceptée.


L’élément nouveau aujourd’hui est l’attitude de Walid Joumblatt, qui, jusqu’à présent, appelait les parties libanaises à la retenue et demandait à tous les protagonistes de ne pas importer au Liban la crise syrienne, tout en ne ménageant pas ses critiques au régime syrien. Selon des sources druzes, Walid bey aurait désormais l’intention de convier des personnalités de l’opposition syrienne, notamment des membres de la coalition menée par Moaz al-Khatib, au meeting qu’il compte organiser le 16 mars en hommage à son père, le leader Kamal Joumblatt. Cette décision du leader de Moukhtara constitue donc une évolution concrète de la position qu’il adoptait ces derniers temps. Elle serait en réalité une réponse au meeting organisé la semaine dernière par Wi’am Wahhab à Baakline et auquel ont participé des figures druzes de la région de Soueida (Syrie). Selon des sources druzes, Joumblatt n’aurait pas apprécié la tenue d’un tel meeting au cœur du Chouf, c’est-à-dire dans son propre fief, avec des déclarations ouvertement favorables au régime syrien. En même temps, il n’aurait pas non plus apprécié le fait que le président syrien Bachar el-Assad reçoive l’émir Talal Arslane au moment où lui-même se trouvait en Arabie saoudite. D’ailleurs, sa décision serait liée à sa visite à Riyad qu’il attendait d’ailleurs depuis longtemps et au cours de laquelle il a été reçu par l’émir Bandar ben Sultan, actuel chef des SR saoudiens, et par le ministre des Affaires étrangères Séoud al-Fayçal. Joumblatt est en effet très soucieux de préserver de bonnes relations avec le royaume wahhabite pour pouvoir continuer à jouer le rôle déterminant qu’il joue sur la scène interne et qu’il pourrait perdre si le projet orthodoxe est adopté au Parlement.


Sur un autre plan, et toujours dans le cadre de l’influence de la crise syrienne sur le Liban, des pressions sont actuellement exercées sur le Liban officiel pour le pousser à boycotter les Jeux olympiques d’hiver qui doivent se tenir à Moscou en 2014. Le Liban étant le seul pays arabe ayant un tourisme d’hiver, s’il boycotte ces Jeux, cela signifiera qu’il n’y aura sur place aucune délégation arabe et un message fort sera ainsi adressé au pouvoir russe, accusé d’être favorable au régime syrien. Pour le Liban, il s’agira en tout cas d’une nouvelle entorse à la fameuse politique de dissociation à l’égard du dossier syrien, prônée par les autorités et saluée par la communauté internationale comme un facteur déterminant de la stabilité au Liban. Il faut d’ailleurs relever à ce sujet la contradiction de plus en plus évidente entre la position de la communauté internationale qui appuie la stabilité au Liban et les pressions exercées pour pousser le Liban à jouer un rôle plus actif dans la crise syrienne. Pris entre deux feux, les Libanais jouent les équilibristes, sans filet de sécurité...

 

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