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Moyen Orient et Monde

Les dividendes de la défense

Par Anders Fogh RASMUSSEN

Anders Fogh Rasmussen est secrétaire général de l’OTAN et ancien Premier ministre du Danemark.

Sur une colline surplombant la ville turque de Gaziantep, des lanceurs de missiles Patriot montent la garde sous le commandement et le contrôle de l’OTAN. C’est seulement l’une des 6 batteries de Patriot de 3 pays alliés (l’Allemagne, les Pays-Bas et les USA) qui protègent les millions de personnes qui habitent le long de la frontière avec la Syrie, au sud-est de la Turquie. Ce déploiement traduit l’engagement à long terme de l’OTAN au service de son objectif premier : assurer la sécurité de ses membres. Il démontre aussi que lors d’une crise, rien ne remplace une dissuasion et une défense efficaces.
Presque chaque jour confirme l’existence d’un ensemble de menaces – du terrorisme à la prolifération de l’armement, en passant par les cyberattaques et la piraterie – qui se répandent du Moyen-Orient et du Sahel jusqu’en Asie centrale. Ces menaces ne disparaîtront pas tant que les membres de l’OTAN resteront absorbés par leur situation financière. Notre mode de vie est basé sur la sécurité et la stabilité, sans lesquelles l’investissement disparaît, l’emploi s’écroule et l’économie s’effondre. En ces temps difficiles sur le plan économique, nous sommes tous très conscients que la sécurité a un prix, mais celui de l’insécurité est bien plus élevé. La défense est notre première assurance dans un monde complexe et imprévisible.
Le coût humain d’un conflit est terriblement élevé et il en est de même de la restauration de la paix et de la reconstruction. Ainsi, on estime à 150 milliards de dollars le coût des guerres dans les Balkans au cours des années 1990. Aujourd’hui, l’OTAN continue à maintenir la sécurité au profit de toute la population du Kosovo et aide toute la région à avancer sur le chemin de l’intégration euro-atlantique.
Autre menace, la piraterie qui sévit sur des routes maritimes vitales pour le commerce et l’énergie. En 2011, son coût au large des côtes de la Somalie se chiffrait à 7 milliards de dollars. Mais grâce à la coopération internationale, notamment la présence de navires de l’OTAN, les attaques ont fortement régressé. Même si la situation est encore instable, au niveau de la Corne de l’Afrique depuis 8 mois les attaques des pirates contre les navires marchands échouent.
Enfin, les cyberattaques ne ciblent pas seulement les sites web, mais aussi des pays entiers. Cela a été le cas en 2007 avec l’Estonie, une alliée de l’OTAN. La présidence estonienne, le Parlement, les ministères, les partis politiques, les organes de presse, les banques, les entreprises de télécommunication ont tous été frappés. Tous les éléments sur lesquels repose une démocratie moderne et une économie basée sur la connaissance ont fait l’objet d’une attaque. C’est pourquoi, dans le cadre de notre effort d’amélioration de la sécurité des réseaux de nos membres, l’OTAN a établi dans la capitale estonienne, Talin, un centre d’excellence dédié à la cyberdéfense.
Ces exemples montrent que puissance militaire et puissance diplomatique sont complémentaires. Pour être efficaces, nous avons besoin des deux. La diplomatie reste l’outil privilégié pour faire face aux problèmes de sécurité internationale, mais notre puissance militaire donne du poids à nos déclarations et augmente nos chances de succès. Les investissements consacrés à la défense constituent aussi un atout pour nos industries de pointe. Les programmes de recherche menés dans le domaine de la défense ont déjà transformé nos vies avec les avions à réaction, Internet, le GPS. Dans l’avenir, les technologies militaires développées pour la surveillance aérienne pourraient avoir des retombées importantes dans le civil – par exemple pour le contrôle et l’amélioration du trafic routier, le guidage des équipes de secours et l’assistance humanitaire.
Notre expertise en matière de défense repose sur le travail des générations précédentes. Comme dans les autres industries de haute technologie, elle est en évolution constante. Si nous faisons des coupes trop importantes durant trop longtemps dans le budget de la défense, nous perdrons une expertise difficilement acquise, qu’il sera difficile de retrouver lorsque nous en aurons véritablement besoin.
Une défense forte favorise la sécurité transnationale. L’OTAN elle-même incarne cet objectif. La sécurité de nos 28 alliés est mieux garantie dans le cadre de leur alliance que s’ils l’assuraient chacun de leur côté. Ils peuvent ainsi mieux défendre leur propre intérêt et jouer un rôle plus actif dans la gestion des crises internationales, ainsi qu’on l’a vu en 2011 en Libye lors des opérations de protection de la population civile. Les investissements en faveur de la défense bénéficient à la diplomatie et à la coopération comme au progrès technique et à l’innovation. Ils favorisent un avenir sûr et prospère pour nos propres pays comme pour le reste du monde.
En cette période d’austérité, même si les budgets de défense font l’objet de restrictions, il est essentiel que les membres de l’OTAN les maintiennent à un certain niveau et soient prêts à les augmenter une fois la crise passée. Les décisions d’aujourd’hui en matière de défense seront lourdes de conséquences demain pour la sécurité de nos enfants.

Traduit de l’anglais
par Patrice Horovitz
©Project Syndicate, 2013.
Sur une colline surplombant la ville turque de Gaziantep, des lanceurs de missiles Patriot montent la garde sous le commandement et le contrôle de l’OTAN. C’est seulement l’une des 6 batteries de Patriot de 3 pays alliés (l’Allemagne, les Pays-Bas et les USA) qui protègent les millions de personnes qui habitent le long de la frontière avec la Syrie, au sud-est de la Turquie. Ce...
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