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À La Une - Le point

Mécompte de Noël

Un peu tard peut-être, mais cela vaut mieux que jamais, dit le dicton. J’ai découvert à la faveur des fêtes de fin d’année que Noël, ça n’existe pas – et donc le père du même nom non plus. Coup sur coup, j’ai (mal) encaissé trois chocs qui m’ont permis d’aboutir à cette conclusion hautement philosophique, propre à modifier le cours des événements que subit depuis si longtemps notre pauvre planète qui n’en peut mais.
Il y a d’abord eu, à quelques jours du 24 décembre, cette soirée qui promettait d’être merveilleuse car consacrée à un récital de cantiques inspirés de la fête. Il y avait dans l’église quelques dizaines de parents à peine, accompagnées de rares enfants. Première déception.
Tournée de lèche-vitrines le lendemain, histoire de se mettre dans l’ambiance de cette période si particulière de l’année. Décorations anonymes, assorties de souhaits de « bonnes fêtes » sans autre précision. Quelles fêtes ? serait en droit de se demander un Martien fraîchement débarqué sur notre bonne vieille planète. Le mystère, il faut le craindre, est appelé à se perpétuer pour des années à venir. Deuxième déception.
Manchette, le lendemain, barrant la une du quotidien Le Monde : « Les enfants ne veulent plus de jouets pour Noël. » Rien d’inattendu là, cette dés-envie, on la sentait venir depuis l’irruption dans notre existence des jeux électroniques puis de ce diabolique i-Pad qui a tout chamboulé. Rien d’étrange non plus dans le fait que les trois non-événements se soient produits dans la dernière ligne droite de l’année. Pas tout à fait normal non plus.
L’anormal, il faudrait le chercher plutôt dans la vie de tous les jours, telle qu’elle déroule ses péripéties. Autrefois, vous dit-on, il en allait autrement et les hommes qui avaient la prétention de déterminer le cours de notre existence étaient d’un calibre différent. Et d’égrener l’interminable liste des Grands qui méritaient alors cette appellation. Alors qu’aujourd’hui...
Voyez François Hollande, ambitionnant d’être un président « normal ». Voyez Barack Obama qui ronfle, pue de la bouche au réveil et qui envoie balader ses chaussettes sales aux quatre coins de la chambre à coucher, révèle son épouse. Et quand Staline vous envoyait sans ciller des dizaines de milliers d’hommes respirer l’air éminemment sain des mines de sel sibériennes, son lointain successeur, Vladimir Poutine, ceinture noire de judo ou pas, larmoie pour un rien – mais lui, c’est parce qu’il avait attrapé un virus à l’œil. Les présidents, puisqu’il n’y a presque plus de rois ou alors il s’agit de monarques présents sur la scène mondiale comme pour amuser la galerie avec leur calèche dorée, leur manteau d’hermine et tout l’apparat qui entoure chacune de leurs apparitions publiques, les présidents donc sont des messieurs Tout-le-monde. Signe des temps, on a cru voir, lors des derniers Jeux, la reine d’Angleterre (en réalité, il s’agissait de son sosie) atterrir en parachute au beau milieu du stade olympique londonien. Ailleurs, les ministres prennent le train ou l’avion en classe économie, contractent un rhume ou bien trompent leur conjoint(e) comme monsieur (madame) Dupont (avec un t ou avec un d).
Si le décorum n’est plus qu’une minuscule feuille de vigne, c’est que les médias ont fait irruption dans les mœurs, banalisant tout et permettant ainsi au bon peuple de constater, comme l’enfant dans le conte du bon Hans Christian Andersen, que le roi est nu.
La télévision, après la radio à transistors et avant le téléphone portable et sa miraculeuse caméra incorporée ne nécessitant pas de chambre noire, a tôt fait de réduire le temps et d’amplifier les effets du battement des ailes du papillon. Le printemps arabe (continuons, pour les commodités du propos, à l’appeler ainsi) s’est propagé à la vitesse du son parce que tout le monde a vu, en direct pour ainsi dire, le sacrifice d’un jeune marchand ambulant nommé Mohammad Bouazizi. L’immolation par le feu de plusieurs bonzes est loin d’avoir eu le même effet au plus fort de la guerre du Vietnam.
Gardons-nous cependant de penser que tous les bouleversements dont nous sommes les témoins depuis un lustre, nous les devons aux effets des « étranges lucarnes » ou encore des ultimes inventions du regretté Steve Jobs. Savez-vous, simple exemple, que les plus importantes réserves mondiales d’or noir techniquement exploitables ne se trouvent plus au Proche-Orient mais en Amérique du Nord, qu’il s’agisse de pétrole de schiste ou de pétrole bitumeux ? Que 83 pour cent des besoins des États-Unis sont assurés par les gisements locaux ? Que ce pays supplantera dans cinq ans l’Arabie saoudite comme premier producteur mondial de pétrole et dans douze ans la Russie comme numéro un pour ce qui est du gaz ?
On n’aurait pas tort de croire que finalement, les enfants, avec cette prescience qui est l’apanage de leur génération, avaient vu venir. Et que, du coup, ils avaient cessé de croire. À quoi ? Mais au père Noël, pardi !
Un peu tard peut-être, mais cela vaut mieux que jamais, dit le dicton. J’ai découvert à la faveur des fêtes de fin d’année que Noël, ça n’existe pas – et donc le père du même nom non plus. Coup sur coup, j’ai (mal) encaissé trois chocs qui m’ont permis d’aboutir à cette conclusion hautement philosophique, propre à modifier le cours des événements que subit depuis si...
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