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Liban - Éducation

Des experts pédagogiques dressent un bilan de l’enseignement du français au Liban

L’Institut français du Liban a organisé un séminaire de deux jours axé sur la didactique du plurilinguisme. Ces ateliers de travail ont permis aux chercheurs et aux professionnels du système éducatif de dresser un état des lieux exhaustif de l’enseignement linguistique au Liban.
À l’initiative de l’Institut français du Liban, des experts en éducation et des professeurs en sciences du langage se sont retrouvés pendant deux jours, au théâtre Montaigne de la rue de Damas, pour discuter de l’évolution de l’enseignement des langues au Liban. Ce séminaire, destiné essentiellement aux experts pédagogiques, a permis, au premier jour des débats, de dresser un bilan des sept années de coopération entre les autorités libanaises et l’Institut français. Ce partenariat ambitionne d’améliorer l’enseignement plurilingue dans les systèmes scolaires et universitaires libanais. Selon les organisateurs, «ces séminaires visent à sensibiliser les acteurs du système éducatif à la didactique du plurilinguisme, le but étant de valoriser les langues avec lesquelles les élèves vivent».
Aurélien Lechevallier, directeur de l’Institut français du Liban, a ouvert la journée en soulignant la motivation et l’intérêt de l’assemblée, mobilisée pour l’événement. «Cette étape est essentielle dans l’expérimentation», a-t-il déclaré. L’objectif du séminaire sera de «réfléchir ensemble aux enjeux essentiels» a-t-il ajouté.
Fervente défenseuse du plurilinguisme, l’ambassadrice du Canada, Hilary Child-Adams, a ensuite pris la parole. «Convaincue que l’apprentissage des langues constitue une source d’épanouissement, je ne peux que constater que chaque langue devient une porte vers une région du monde», a-t-elle déclaré. La représentante du Canada, pays officiellement bilingue, a rappelé qu’elle est aussi «la représentante du multilinguisme et du multiculturalisme». La diplomate a rappelé que le multilinguisme, gage de modernité, « constitue un atout essentiel pour l’avenir du pays et de sa jeunesse».
L’ambassadeur de France, Patrice Paoli, a ensuite souligné la spécificité libanaise où «le passage d’une langue à une autre est une réalité quotidienne». «Cette pluralité linguistique constitue d’ailleurs un atout formidable. Elle fait la force des Libanais au Liban et par le monde» a t-il affirmé. Expliquant que le pays illustre un véritable «leadership» en matière de multilinguisme et de multiculturalisme, le diplomate a encouragé la jeunesse à renforcer cette compétence. À l’appui de son propos, M. Paoli a fait part de son expérience personnelle. Ayant appris le français dans une école française au Maroc, il a ensuite étudié l’arabe à Tripoli en Libye, pour enfin perfectionner son anglais dans une université à Washington.
Rappelant que «les discours sur la concurrence entre les langues sont dépassés», l’ambassadeur est ensuite revenu sur la politique linguistique française tournée vers le plurilinguisme. La promotion de la francophonie n’est plus le seul objectif. Le diplomate a clairement souligné que les 226 Instituts français et 445 alliances françaises à travers le monde agissent dans le sens du multiculturalisme.

«Un homme vaut autant d’hommes qu’il connaît de langues»
Laila Fayad, représentante du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, et présidente du Centre de recherche et de développement pédagogique, a clôturé la séance inaugurale. Reprenant à son compte la maxime populaire selon laquelle «un homme vaut autant d’hommes qu’il connaît de langues», l’intervenante a souligné l’importance du plurilinguisme. Au-delà de la nécessité professionnelle, «le pluralisme linguistique forme la pierre angulaire de la richesse humaine», a-t-elle affirmé. Rappelant que la Liban représente le «pays plurilingue par excellence», Mme Fayad a expliqué que l’objectif ultime de ces ateliers de travail seront de préparer au mieux les élèves.
Christophe Chaillot, attaché de la coopération éducative près l’ambassade de France et directeur des cours à l’Institut français, a animé le premier atelier portant sur la politique de coopération franco-libanaise. Le diplomate a décortiqué les étapes fondatrices de cette collaboration fructueuse. En 2007, le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur a signé un accord-cadre avec l’ambassade de France qui «vise l’amélioration qualitative de l’éducation au Liban», a-t-il expliqué. Ce protocole encadre les actions menées en mettant en œuvre des projets communs. Les neuf instituts français au Liban soutiennent les plans éducatifs dans le secteur public. Peu à peu, l’Institut français a étendu sa collaboration au secteur privé (écoles privées, universités). Les chiffres énumérés par l’attaché de la coopération éducative témoignent du succès rencontré par ce partenariat de plus en plus étroit. À titre d’exemple, l’institut a monté 24 projets culturels en direction des écoles et des universités et possède aujourd’hui 200 partenariats avec celles-ci. Malgré le déclin du français au profit de l’anglais, l’institut enregistre une forte hausse du nombre d’élèves inscrits aux cours de français ces quatre dernières années. Selon lui, «ces chiffres légitiment l’action de l’institut».
Cependant, M. Chaillot s’est dit étonné «par le répertoire langagier libanais, très riche mais encore largement sous-exploité». Le conférencier a évoqué la «démotivation générale» et le «désintérêt des élèves» pour le français, qu’il a justifié par «le sentiment d’insécurité». Certains élèves éprouvent un manque de confiance pour s’exprimer, et considèrent le français uniquement comme une langue «de salons ou de livre».

Un mode d’enseignement des langues à revoir ?
Layla Hage, responsable de l’unité du français de l’Association islamique des Makassed et enseignante de français pendant 40 ans, a envisagé une réforme ambitieuse qu’elle applique depuis 2006. Elle a souhaité partager «cette expérience qui lui tient à cœur». Pendant ses années d’enseignement, l’intervenante avait déploré l’incapacité des élèves à s’exprimer en français en dépit des 15 années d’enseignement qu’ils avaient reçues. Elle avait regretté également le découragement des élèves, mais aussi des professeurs, au vu des notes désastreuses obtenues aux examens. Face à ces difficultés, Layla Hage a frappé à la porte l’Institut français en 2006 pour solliciter son aide.
L’enseignante a proposé une nouvelle approche pour «désacraliser» les cours de français. Au début, seulement trois écoles pilotes ont appliqué cette méthode avant-gardiste. Progressivement, au vu des résultats encourageants, cette stratégie s’est généralisée aux 18 écoles des Makassed. La réforme s’est jouée sur deux fronts. D’abord, les enseignants, qui ont repris confiance. Pour ce faire, les professeurs ont suivi des formations à l’Institut français et obtenu un certificat officiel d’aptitude en langue, appelé couramment DALF B2/C1. Les enseignants ont également effectué un séjour de trois semaines en France pour se familiariser de nouveau à la langue courante et à la culture. Dorénavant, l’oral sera au cœur du système. Les élèves seront familiarisés au français courant.
Malgré de nombreuses résistances de la part du corps enseignant, et les réticences des parents, la réforme est un véritable succès. Ce changement des mentalités a abouti à d’excellents résultats, a expliqué Layla Hage.
Tout au long de la journée, professeurs en sciences du langage et professionnels pédagogiques ont mis l’accent sur l’importance du facteur social dans l’enseignement. Les objectifs linguistiques sont indissociables du culturel et du social. Selon Dania Ghaddar, formatrice d’enseignants de français, «pour débloquer l’élève, l’enseignant doit s’adapter à ses codes culturels».
À l’initiative de l’Institut français du Liban, des experts en éducation et des professeurs en sciences du langage se sont retrouvés pendant deux jours, au théâtre Montaigne de la rue de Damas, pour discuter de l’évolution de l’enseignement des langues au Liban. Ce séminaire, destiné essentiellement aux experts pédagogiques, a permis, au premier jour des débats, de dresser un...

commentaires (1)

Au Liban je ne sais pas, mais en France l'enseignement du français est à revoir !

Robert Malek

20 h 19, le 28 novembre 2012

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Commentaires (1)

  • Au Liban je ne sais pas, mais en France l'enseignement du français est à revoir !

    Robert Malek

    20 h 19, le 28 novembre 2012

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