Trompée, désolée, menacée : une actrice du film islamophobe raconte

Dans "Innocence of Muslims", elle joue le rôle d'une femme dont la fille est proposée en mariage au prophète Mohammed. Du moins, c'est ce qu'elle a découvert dans un extrait de 14 minutes diffusé sur internet. Car quand elle a signé, on lui a vendu un "film d'aventures sur l'Egypte ancienne".

Assurant avoir été trompée sur les intentions de ce film amateur, Cindy Lee Garcia est la première actrice du film islamophobe à s'être fait connaître après l'explosion des violences. Elle est aussi la première à porter plainte contre le producteur du pamphlet, pour invasion de la vie privée, fraude, calomnie et volonté de nuire.

La diffusion sur internet d’un extrait du film a provoqué plusieurs manifestations, parfois très violentes, à travers le monde arabe, tuant 30 personnes dont l'ambassadeur américain à Benghazi (Libye).

La plainte, déposée le 19 septembre devant la Cour supérieure de Los Angeles, vise Nakoula Basseley Nakoula, un copte (chrétien d'Egypte) de 55 ans résidant près de Los Angeles, qui a reconnu avoir aidé à la production du film et qui avait été condamné en 2010 pour fraude bancaire, écopant de 21 mois de prison.

Selon les médias américains, M. Nakoula se serait dissimulé derrière le pseudonyme Sam Bacile pour communiquer sur le film, avant d'être identifié. Après avoir été entendu par la police dans la nuit de vendredi à samedi, il est sorti libre et vit avec sa famille dans un lieu maintenu secret.

"M. Bacile a affirmé que (L'Innocence des musulmans) était un film d'aventures sur l'Egypte ancienne", peut-on lire dans la plainte. Mais Mme Garcia a finalement découvert qu'il s'agissait d'un tout autre film et sa vie est en danger. Mme Garcia "fait l'objet de menaces de mort sérieuses, a peur pour sa vie et pour celle de ses proches", peut-on encore lire dans le texte.

Le film, avec ses fausses barbes, ses décors de pacotille et un doublage grossier, prétend raconter la vie du prophète Mahomet, en présentant les musulmans comme immoraux et violents.

Peu après le début de la crise, l'actrice avait déjà affirmé à Reuters ignorer que le film fût une propagande anti-musulmane, ajoutant que des dialogues avaient été doublés après le tournage. Selon elle, "il n'y avait rien sur Mahomet ou les musulmans" dans le film qu'elle a tourné. "Tout cela me paraît irréel, c'est comme s'il ne restait rien de ce que nous avons tourné", a-t-elle dit à Reuters dans une interview téléphonique.

L'actrice a précisé que le film, qui aurait coûté 5 millions de dollars en partie versés par une centaine de donateurs juifs, avait été tourné durant l'été 2011 à l'intérieur d'une église proche de Los Angeles. "On m'a dit que c'était un film sur l'époque du Christ, il y a deux mille ans", a-t-elle ajouté.

Cindy Lee Garcia a raconté que dans le film, le personnage qu'elle jouait était obligé dans une scène de remettre son enfant à un certain "Maître Georges". L'actrice a ajouté que le producteur du film était un homme âgé, les cheveux grisonnants, avec un accent. Il l'a payée avec un chèque. "Je lui ai téléphoné mercredi et lui ai demandé pourquoi il avait fait cela. Il m'a mis dans une situation affreuse, des gens sont tués à cause d'un film dans lequel je joue", a-t-elle dit.

Cindy Lee Garcia a déjà présenté ses excuses aux musulmans, dans une déclaration à la chaîne MBC, affirmant qu'elle n'aurait pas accepté ce rôle s'il s'agissait d'un film anti-islam.

(Lire aussi : Le producteur copte du film anti-islam affirme n'avoir aucun regret) 

Cindy Lee Garcia porte également plainte contre le site de vidéos YouTube et sa maison-mère Google, qui diffusent des extraits du film.

Dans sa plainte, l'actrice réclame à la justice le retrait définitif de la vidéo de YouTube, expliquant qu'elle souffre de détresse émotionnelle et doit faire face à des revers financiers et à la "destruction de sa carrière et de sa réputation".

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