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À La Une - Le point

Bandung, 50 ans après

Rappelez-vous la naissance en pleine guerre froide du mouvement des non-alignés, Bandung, 1961, les Quatre, auxquels on avait accolé un cinquième, Ahmed Soekarno (la conférence se tenait chez lui, en Indonésie, alors forcément...). Ils sont toujours quatre, mais à Tito, Nasser, Nehru et N’Krumah ont succédé Manmohan Singh, Mohammad Morsi, Mahmoud Ahmadinejad, Kim Jong-un, ainsi que cent seize autres chefs d’État, de gouvernement, ministres des Affaires étrangères ou simples délégués. Au total, ils sont 80 pays à être représentés à ces assises téhéranaises de la troisième voie sur un total de120 nations, sans compter 17 États ayant rang d’observateur et dix organisations régionales (Ligue arabe, Union africaine, etc.).


Les participants ne peuvent manquer, posés bien en évidence sur des socles, à l’entrée de l’imposant édifice abritant la conférence, les restes calcinés des trois voitures à bord desquelles sont morts les savants iraniens tués ou blessés dans des attentats, une manière d’annoncer le véritable objet de la réunion : le programme nucléaire de la République islamique et le conflit qu’il a engendré. D’ailleurs, pour se rendre compte de l’importance du thème, il suffit d’observer le branle-bas diplomatique déclenché par l’Amérique et Israël autour notamment de la participation aux débats du secrétaire général des Nations Unies, annoncée par son porte-parole, Martin Nesirky. Ban Ki-moon n’aurait, dit-on, prêté qu’une attention polie aux arguments du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu avant de lui répondre que son siège était fait.


Pour Téhéran, le succès est notable. L’importance du rassemblement inauguré dimanche avec les travaux préparatoires de la conférence signifie aux yeux des héritiers de l’ayatollah Khomeiny que leur nation n’est pas confrontée à l’ensemble de la communauté internationale inquiète devant la perspective d’un Iran nucléarisé, mais à un groupe de puissances soucieuses de préserver la sécurité du Golfe et celle d’Israël. Pour ces mêmes sources, il signifie aussi, ce grand rendez-vous, qu’un ordre nouveau est en passe de s’instaurer dans la région et qu’en attendant sa concrétisation, il n’est plus possible de traiter l’Iran en paria. Ali Akbar Salehi, l’onctueux ministre iranien des Affaires étrangères, n’a pas dit autre chose lorsqu’il a réclamé la levée pure et simple des sanctions et la dénonciation du « terrorisme » dont son pays est victime.


Dans un plaidoyer publié le 23 août dans le New York Times, Kaveh Afrasiabi, ancien professeur de sciences à l’université de Téhéran, qui fut aussi le conseiller de la délégation iranienne aux négociations avec l’Agence internationale de l’énergie atomique, révèle que des rencontres se tiendront en marge des travaux prévus, entre les présidents indien et pakistanais qui pourraient déboucher sur une médiation de l’Organisation de la conférence islamique dans l’interminable conflit qui oppose New Delhi et Islamabad. Le président indien, n’a-t-on pas manqué de noter par ailleurs, est accompagné d’une imposante délégation de 250 membres en prévision, entre autres, de contacts avec la partie iranienne pour accroître les échanges économiques entre les deux parties.


L’auteur de l’article du grand quotidien américain évoque par ailleurs la possibilité de voir se concrétiser l’idée avancée par Morsi d’un groupe de travail comprenant l’Égypte, l’Arabie saoudite, l’Iran et la Turquie, qui pourrait s’atteler à l’élaboration d’un projet de règlement de la crise syrienne. L’initiative égyptienne a semblé désarçonner Tel-Aviv qui, par la voix du porte-parole de la présidence du Conseil, a donné de la voix. « Si vous y allez, si vous rendez hommage aux dirigeants de la République islamique, comment peut-on encore parler d’isolement diplomatique ? » a souligné Mark Reguev, sans obtenir la moindre réponse. Nul ne s’est chargé, sur un plan parallèle, de rappeler que la présence du secrétaire général de l’organisation internationale est une coutume établie depuis que le mouvement des non-alignés a trouvé sa vitesse de croisière.


Au programme des jours à venir – la clôture des travaux est prévue pour vendredi – figure une visite des installations nucléaires de Bouchehr, histoire pour les invités de se rendre compte par eux-mêmes qu’il n’y a là rien que de bien innocent qui ne justifie en aucun cas « l’approche à deux poids, deux mesures de l’AIEA et d’autres entités de l’ONU », comme l’a souligné le chef de la diplomatie iranienne dans son discours d’ouverture.
Il fallait s’y attendre : « le plus grand événement de l’histoire de l’Iran » va permettre le déploiement des plus grandes manœuvres politico-diplomatiques de ces trente-trois dernières années. Et pas dans un sens favorable à l’Occident.

Rappelez-vous la naissance en pleine guerre froide du mouvement des non-alignés, Bandung, 1961, les Quatre, auxquels on avait accolé un cinquième, Ahmed Soekarno (la conférence se tenait chez lui, en Indonésie, alors forcément...). Ils sont toujours quatre, mais à Tito, Nasser, Nehru et N’Krumah ont succédé Manmohan Singh, Mohammad Morsi, Mahmoud Ahmadinejad, Kim Jong-un,...

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