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Culture - Théâtre

Maître nô dans un café...

Un spectacle nô qui sort des sentiers battus, sous la férule de maître Naohico Umewaka, sur les planches du théâtre Béryte.

Des acteurs faussement égarés sur une scène aux subtils jeux de lumières. Photo Nasser Trabulsi

Edgar DAVIDIAN

«Capacité, pouvoir, talent», un trio de valeur essentiel de cette expression théâtrale venue du Japon est offert ici à travers un opus intitulé Café dans une pièce. En langue arabe. Ascèse et concentration pour un exercice de discipline et de dépassement de soi.
Petite salle pour un petit public avec une scène presque vide, si ce n’est six chaises noires en résine et deux tables rondes recouvertes d’un napperon blanc. Une dizaine de jeunes acteurs (groupe de théâtre pour la vie, prônant pacifisme et non-violence) pour incarner situations et émotions. Avec une distanciation, comme pour prouver à chaque instant la maîtrise de soi, des paroles et des situations.
Écrite et mise en scène par maître Naohico Umewaka, qui n’en est pas à sa première expérience beyrouthine et qui joue aussi le rôle d’un personnage masqué, muet, renversant de rigidité surtout lorsqu’il s’échoue sur le sol, cette œuvre dramaturgique est traduite en arabe littéraire par Christelle Nassar. Dialogues simples et fins, comiques à force de distorsions entre situations, expressions et émotions, distillés par des acteurs qui doivent concevoir le divertissement comme un rigoureux exercice de discipline et de dépassement de soi.
Sans costumes particuliers, avec de simples tenues modernes en noir et blanc, sauf maître Umewaka en chausettes blanches et kimono de soie froufroutant, ces acteurs, faussement égarés sur une scène aux subtils jeux de lumière, sont entre répétitions d’une production scénique et joyeux batifolage dans un café... Mais ici toutes les apparences sont trompeuses. Parler de tout, c’est l’illusion!
Et pour ce théâtre émanation du zen, il y a constamment le tour de forces des acteurs d’être vigilants de leurs interprétation et gestes. La force d’un acteur ici est d’être un véritable volume qui se déplace, qui joue tout autour de lui dans trois dimensions, qui à aucun moment n’est immobile bien qu’il ne laisse échapper aucun geste. Le talent de cet acteur est d’atteindre un calme surhumain, à ne jamais faiblir dans sa concentration, à ne jamais laisser libre cours à ses émotions. Comme le dit le code nô: «Sur lui, rien ne s’accroche, tout concourt.»
Presque une heure, pour une représentation qui ne traîne jamais en longueur, pour narrer un monde entre pétrification et mobilité, entre flot de paroles et silences, entre expressions corporelles souples et attitudes statufiées, figées.
À part quelque déroute du spectateur, vite ressaisi, une ombre de mystère plane jusque dans les coulisses. Mais des coulisses qui, par-delà des rideaux délicatement écartés, livreront leur secret vers la fin pour une jeune fille avec ombrelle rose ouverte sous une pluie argentée dont on entend le bruit en toute douceur. Image surprenante pour un destin constamment surprenant... Comme ce théâtre.
Edgar DAVIDIAN«Capacité, pouvoir, talent», un trio de valeur essentiel de cette expression théâtrale venue du Japon est offert ici à travers un opus intitulé Café dans une pièce. En langue arabe. Ascèse et concentration pour un exercice de discipline et de dépassement de soi.Petite salle pour un petit public avec une scène presque vide, si ce n’est six chaises noires en...

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