Les multiples talents de Mike Massy

Lorsqu’il se qualifie de musicien, compositeur, interprète et comédien, lorsqu’il souligne que chanter ne lui suffit pas, que le comédien en lui a besoin de « chansons interprétables », on comprend vite de quoi il parle. Avec son album Ya Zaman sorti en novembre dernier, Mike Massy a imposé à la fois un son musical qui lui est propre et une personnalité bien marquée. « Je voulais un album international, transparent, libre, qui soit une réflexion de moi. »

On comprend également son attente légitime, au vu d’une formation complète acquise au cours des années passées et qui en fait un artiste à part entière. Bientôt 30 ans, un look décalé, rafraîchissant, aérien. De grands yeux, de grandes mains fines de pianiste, une taille élancée, Mike Massy, débarquant dans un genre musical où on ne l’attendait forcément pas, illustre bien ce mélange en lui d’Occident et d’Orient, de nostalgie poétique et joyeuse.

Loin des clichés traditionnels, il a choisi la Belgique pour y puiser son inspiration. « J’écris partout, sur un banc, dans un café, sous une pluie fine, à la Galerie de la Reine. » C’est là-bas qu’il a trouvé les musiciens qu’il recherchait et qu’il a enregistré les onze titres de Ya Zaman. « J’ai toujours su ce que je voulais faire, poursuit-il. Je voulais être un artiste et voyager... »

Une formation complète
Dès l’âge de 9 ans, Mike Massy suit des cours de piano, puis intègre le Conservatoire national de musique. Parcours académique qui lui enseigne la rigueur et une grande technicité. Fasciné par l’opéra arabe, il découvre les mouwachahat et rajoute un arc à son violon et à sa voix. En 2001, il s’inscrit à la faculté des beaux-arts et obtient un diplôme supérieur en art dramatique, prend des cours de ballet jazz pendant 10 ans... Bref, il approfondit toutes les facettes de sa personnalité curieuse. En 2006, constatant que Beyrouth devenait trop bruyante et étroite pour lui, il s’embarque pour Le Caire, « une ville intrigante et authentique ». Durant presque deux ans, logé dans une pension où se côtoyaient des artistes du monde entier, il écrit, rêve, échange et s’épanouit. C’est durant cette parenthèse qu’il rencontre la Tunisienne Lobna Noomen qui prête ses mots et sa voix à la très mélodieuse Soti hareb menni en duo avec Massy.

Toute la sensibilité de l’interprète figure clairement sur cet album, de même qu’une belle maturité artistique, en dépit de son âge. Après des années d’écriture et de production, l’album sort enfin au Liban, en attendant, en espérant l’Europe. Une fusion subtile et réussie entre l’oriental, la world music, le baroque et le jazz. Des violons qui se mêlent au oud, une flûte qui se glisse, inattendue, une clarinette qui intervient, du qanun, du nay, un accordéon... Ya Zaman fait parler tous ces instruments et nos émotions. « Je voulais ce retour à l’authenticité de la musique libanaise en y intégrant de la modernité et toucher le plus de gens possible. » Massy a réussi à redonner à cette musique « de chez nous » l’élégance qui lui manquait dernièrement. Entre légèreté et mélancolie, Ya Zaman, Khalassna Baa, Ya Omr lama natartni et Beyrouth, parmi d’autres titres, se laissent écouter avec plaisir. « On ne s’improvise pas artiste ! C’est beaucoup de travail et d’exigence... », précise-t-il.

Après avoir signé la musique du film de Joe Bou Eid, Tannoura Maxi, qui sort bientôt, Mike Massy prépare un nouvel album acoustique de chansons françaises et deux pièces de théâtre. La première sera écrite par lui et l’autre, une adaptation musicale de Moi aussi, je suis Catherine Deneuve de Pierre Notte.
Et de conclure : « Ce disque n’est que ce que je suis, en attendant ce que je deviendrai... » À suivre, donc.