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Économie - Reportage

L’euro a investi le quotidien des Européens, mais ils peinent à s’y attacher

Pour la rue, le passage à la monnaie unique a renchéri le coût de la vie.
Dans les rues de Paris, de Madrid ou de Bratislava, le sujet revient sans cesse : le passage à l’euro a renchéri le coût de la vie. La monnaie unique est en revanche louée pour son aspect pratique et le symbole qu’elle représente.
« Une sucette, c’était 1,50 franc il y a dix ans, aujourd’hui, c’est 2 euros ! » râle Viviane Vangic, 37 ans, rencontrée dans le centre de Paris et qui juge que « depuis qu’on a l’euro en France, on a perdu notre pouvoir d’achat ».
85 % des Allemands estiment que le passage à l’euro a entraîné une hausse des prix, selon un récent sondage. Maria Angeles, croisée à Madrid, explique que « quand on est passé à l’euro, ce qui coûtait 100 pesetas est passé à un euro », soit 160 pesetas.
Si les statistiques réfutent la thèse d’une inflation anormale liée au passage à l’euro – les prix ont augmenté de 2 % par an en moyenne en zone euro ces dix dernières années –, l’idée est coriace, surtout chez ceux qui ont encore le souvenir de leur ancienne devise.
C’est le cas notamment dans les pays nouvellement venus à l’euro. « Tous les prix ont grimpé » depuis l’adoption par la Slovaquie de l’euro en 2009, affirme ainsi Elena, retraitée de 72 ans à Bratislava qui « compte toujours en couronnes quand (elle) fait les courses ».
Mais ils sont de moins en moins nombreux à faire ce type de calculs. Dans les pays qui étaient de l’aventure dès le départ, pour les jeunes, l’euro est la monnaie avec laquelle ils ont grandi, et fait partie intégrante de leur vie.
« Je sais même plus convertir ! Je compte qu’en euros », affirme Stéphanie Jourdain, Parisienne de 23 ans.
« Je suis attachée à l’euro, depuis que je peux dépenser de l’argent, ce sont des euros », explique Ann Hillig, jeune Berlinoise de 24 ans. Pour elle le deutsche mark, pour lequel les Allemands professent leur amour sondage après sondage, n’est plus qu’un vague souvenir.
Elle « espère » que l’euro a un bel avenir devant lui, et trouve « excitant de retourner les pièces et de voir “ah, celle-là vient de là ou là” ».
Passer d’un pays à l’autre avec une même monnaie en poche est de manière générale un des grands atouts de l’euro.
« La couronne (estonienne) ne me manque pas, les euros sont beaucoup plus pratiques quand on voyage », atteste Anni Raudsepp, femme au foyer de 54 ans dans la petite république balte, dernière à avoir rejoint la famille de l’euro en début d’année.
« Je n’ai pas besoin de changer de monnaie quand je voyage », reconnaît aussi Kamil Rodny, 29 ans, qui vend des carpes à Bratislava. « Mais je ne voyage plus, c’est trop cher », ajoute-t-il, concédant que ce n’est pas forcément la faute du seul euro.
Son compatriote Jano Bosansky, chef d’entreprise, est nettement plus remonté contre la monnaie unique. « Nous volons au secours des pays endettés, leur prêtons de l’argent, et tout est plus cher », tempête-t-il.
Mario Groot, 46 ans, directeur de société à Leiden (ouest des Pays-Bas), lui fait écho : « Je préférerais que nous ayons encore les florins, ou que l’on y revienne. » Mais il est fataliste : « Je ne pense pas que cela soit possible. »
L’euro, manifestation la plus tangible dans la vie quotidienne de l’intégration européenne, est un bouc émissaire tout trouvé en ces temps de crise de la dette, de ralentissement économique et de refonte encore entourée d’interrogations de l’Union monétaire.
En Espagne, 70 % des citoyens pensent que l’euro ne leur a rien ou peu apporté, selon un récent sondage. « Pour moi, c’est la pire chose qui soit arrivée, la pire », se lamente Maria, à Madrid, « nous sommes ruinés ».
En Grèce, épicentre de la crise de la dette et en pleine récession, la nostalgie de la drachme n’a pourtant pas cours. « Si on retourne à la drachme on va tomber dans la pauvreté, cela n’a aucun sens, vraiment », juge Angeliki, retraitée athénienne.
La Grèce « est membre d’un ensemble important qui est l’Union européenne », renchérit Andreas, étudiant, et ne serait-ce que pour cette raison doit rester dans l’euro.
L’Allemande Kerstin Bode-Rau, la quarantaine, trouve aussi que « l’euro a renforcé la cohésion en Europe, il nous oblige à travailler ensemble ».
Mais elle reconnaît éprouver un attachement « rationnel » pour la monnaie européenne et y être moins liée émotionnellement qu’au deutsche mark de sa jeunesse.
Et à Tallinn, « les grandes personnalités estoniennes sur nos pièces » manquent à Ervin Jogi, retraité de 81 ans.
Jean Luce, Parisien de 93 ans, trouve pour sa part que « les pièces se ressemblent toutes ». Mais c’est le seul « gros défaut » de la monnaie unique à ses yeux.
Au sein de l’UE, l’euro ne fait pourtant pas envie à tous. Les Britanniques n’en veulent pas et ailleurs aussi, l’ardeur à rejoindre le club flanche. Pour la première fois depuis 2005, les Lituaniens opposés au passage à l’euro sont plus nombreux que ses partisans, selon un récent sondage.

            @ AFP
Dans les rues de Paris, de Madrid ou de Bratislava, le sujet revient sans cesse : le passage à l’euro a renchéri le coût de la vie. La monnaie unique est en revanche louée pour son aspect pratique et le symbole qu’elle représente.« Une sucette, c’était 1,50 franc il y a dix ans, aujourd’hui, c’est 2 euros ! » râle Viviane Vangic, 37 ans, rencontrée dans le centre...

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