« Les Cactus » de Jacques Dutronc siègent à l’Assemblée nationale

«Le monde entier est un cactus
Il est impossible de s’asseoir
Dans la vie, il y a qu’ des cactus
Moi je me pique de le savoir
Aïe aïe aïe, ouille, aïe aïe aïe
Dans leurs cœurs, il y a des cactus
Dans leurs portefeuilles, il y a des cactus...»

Cette chanson écrite par Jacques Lanzmann et interprétée par Jacques Dutronc fait partie des dizaines de compositions nées de l’esprit de ce duo devenu célèbre pour sa causticité et son originalité.
C’est en 1965 que les deux Jacques se rencontrent et entament une longue et fructueuse collaboration. De 1966 à 1973, le duo cosignera des tubes par brassées, notamment J’aime les filles, Les Cactus, L’Opportuniste et Il est cinq heures, Paris s’éveille élue « meilleure chanson française » dans Le Nouvel Observateur par un jury de quarante critiques. Leur première œuvre est un coup de maître, une expression griffonnée dix ans plus tôt par Lanzmann et restée dans toutes les mémoires depuis bientôt 40 ans: «Et moi, et moi et moi» («700 millions de Chinois...»).
Ensemble, ces deux artistes «dans le vent» avaient, tout comme Gainsbourg, réussi à révolutionner la chanson française, sortant ainsi l’écriture de ses sentiers battus en y apportant un ton décapant, iconoclaste, voire atypique. «Inventer un style et se démarquer du sérieux et du pompeux», telle était la marque de fabrique de Lanzmann à la longue carrière de journaliste. D’ailleurs il définissait ainsi son rapport au mot: «En français, il y a des mots qui sautent à la gorge des autres mots pour les étrangler. D’autres qui leur sautent à la queue pour se traîner derrière eux et démarrer tout à coup dans l’autre sens.»
On pense alors immédiatement à ces «cactus» qu’on retrouve sur notre route mais qui ont eu aussi un impact même sur la scène politique. En effet, le 18 avril 1967, dans sa déclaration de politique générale au Parlement, Georges Pompidou définira son programme. Le Premier ministre, s’inspirant du chanteur frondeur, affirme ne pas craindre la difficulté: «J’ai appris que dans la vie gouvernementale, comme dit Jacques Dutronc, il y a des cactus», dit-il. En parlant de la sorte, certains ont compris que Pompidou ne faisait pas seulement allusion à l’opposition ou aux giscardiens, mais même à ses amis les gaullistes. Aïe aïe aïe, ouille.
Un discours qui ne manquait pas de piquant et dont la principale source est ...une chanson.