Tel est le métier de Patrick Pinter, journaliste de profession depuis 1986 et qui a collaboré à plus d’une trentaine de publications en France, notamment Marianne, Le Matin ou L’Hebdo des socialistes. Un métier qui contribue à une meilleure lecture de l’actualité par le lecteur. À faire lire donc entre les lignes, ou dans ce cas précis entre les traits. Point à la ligne.
Mais comment ce dessinateur qui a croqué toute l’actualité européenne, voyagé aux quatre coins du monde, a plongé un jour dans le chaudron du Moyen-Orient ? Pinter raconte alors sa rencontre avec les responsables de L’Orient-Le Jour (administratrice et rédacteur en chef) son désir de tâter de son crayon la « mine » libanaise et in extenso orientale. Un rêve d’ubiquité, semble-t-il. Un double j(eu) auquel il s’est essayé avec plaisir. Après six ans de collaboration avec L’OLJ, le voilà confronté (live) à cette équipe et à ce pays qu’il a connus de loin.
Un trait qui prend forme
Le dessin pour Pinter est comme un tir à l’arc où il décoche des flèches, non comme Cupidon, certes, mais des flèches qui pourraient établir des ponts et casser des murs et même, ajoute-t-il, à instaurer la tolérance. En bon sculpteur (son second métier), il aime à croquer les pifs. Et paf, voilà que je t’allonge le nez, voilà que j’en fais une proue de bateau ou même une gueule de requin. « Tout est dans le geste, dit-il. Le bon. C’est lui qui exprime l’idée. » Et de reprendre une phrase chère à Guitry : « Ce que vous racontez avec vos gestes parle si fort que je ne comprends pas ce que vous dites. »
Le dessinateur de presse est donc celui qui raconte des histoires pour démystifier le quotidien amer, l’actualité hypocrite. Et bas les masques. « Mais, précise Pinter, si un dessinateur de presse peut être provocateur, il faut qu’il soit juste pour être crédible. » Des propos corroborés par Armand Homsy qui collabore depuis des années au journal an-Nahar : la force d’un dessin réside dans l’authentification de sa véracité. Par ailleurs, Patrick Pinter dira en toute modestie n’avoir jamais connu, en 27 ans et 42 000 dessins, l’angoisse de la page blanche, contrairement au journaliste libanais qui avouera y être familier « C’est une pression continue, surtout lorsqu’on travaille dans un quotidien. Mais une fois ce stress dépassé, dit Homsy, cela procure un délicieux plaisir et on a envie de faire mieux le lendemain. »
Quoi de plus stressant en effet que de se confronter à l’actualité mondiale, de vivre à son rythme intrépide, aux grands qui gouvernent (ou manipulent) la planète, de faire de ce grand échiquier politique une immense aire de jeu où seul le crayon a droit de parole ?
« Une caricature provoque trois réactions successives, signale Merville : un sourire, un constat de justesse et enfin une réflexion. » Si pour Patrick Pinter le graphisme décroche souvent un sourire, pour Armand Homsy, la réalité sociale – plus amère – prend souvent le dessus sur les caricatures de personnages politiques et rend le trait plus sombre. « Je n’aime pas être l’esclave d’un personnage », dira même ce dernier.
« Mais les deux dessinateurs conviendront que la provocation est le chemin le plus facile dans ce genre de métier alors que leur rôle à tous deux est d’offrir par le moyen d’un graphisme des données et de faire confiance pour le reste au lecteur. »
Alors Pinter, dessine-moi encore l’Orient.
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