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À La Une - Répression

Tout le monde a peur en Syrie... même le régime

"Une fois de plus, les autorités syriennes font la preuve de leur mépris des droits de l'Homme les plus élémentaires".

La psychanalyste syrienne, Rafah Nached.

Psychanalyste syrienne de renom, première femme à exercer dans ce pays, Rafah Nached a œuvré, depuis le début de la contestation contre le régime à aider ses concitoyens victimes d'une répression sans précédent. Elle était l'un des initiateurs de réunions hebdomadaires auxquelles participaient des Syriens de toutes confessions, partisans ou adversaires du président Bachar el-Assad, pour exorciser un sentiment qui leur est commun: la peur.

L'engagement de Rafah Nached semble avoir eu l'effet contraire sur le régime, puisque cette psychanalyste a été arrêtée par les autorités syriennes le samedi dernier à l’aéroport de Damas.

Mme Nached devait embarquer sur le vol d’Air France en direction de Paris afin d’être présente à l’accouchement de sa fille. Mme Nached, 66 ans, a tout juste pu appeler ses proches pour les prévenir, mais depuis elle n’a plus donné aucune nouvelle.

"Ma femme, le Dr. Rafah Nached, a été arrêtée samedi par des agents des services de renseignements de l'armée de l'air, lors du premier contrôle des bagages au départ de l'aéroport international de Damas", a confirmé, mardi, Faisal Mohammad Abdallah, professeur d'histoire ancienne à l'université de Damas. "Ma femme souffre de plusieurs maladies et se rendait à Paris, pour des raisons familiales et de santé", a-t-il ajouté. "J'ai l'intention de commencer des procédures légales auprès du ministère de la Justice pour avoir une réponse officielle sur la situation dans laquelle se trouve ma femme", a-t-il poursuivi. Francophone, Rafah Nached, diplômée en psychologie clinique de l’Université Paris-Diderot, avait récemment fondé l’Ecole de Psychanalyse de Damas, en collaboration avec des psychanalystes français.

 

 

Condamnations et mobilisation

 

Lors d'un point-presse à Paris, le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Bernard Valero, a déclaré que la France ressentait "un sentiment de très forte indignation devant la brutalité" de son arrestation. "Nous demandons aux autorités syriennes de libérer cette personnalité médicale éminente, connue internationalement". "Une fois de plus, les autorités syriennes font la preuve de leur mépris des droits de l'Homme les plus élémentaires", a-t-il ajouté.

Sur le site Mediapart, de nombreux psychanalystes, psychologues et enseignants français indignés par l'arrestation de la psychanalyste Rafah Nached, ont signé une pétition appelant à sa libération immédiate.

"Rafah Nached a toujours mis ses compétences professionnelles et humaines - dont nous avons pu apprécier la richesse -, au service de la Syrie, sa patrie, à laquelle elle est très attachée", écrivent, mardi, ses confrères, invités de Mediapart.

 

 

L'appel d'Amnesty

 

 

Amnesty International a, de son côté, appelé les autorités syriennes à donner des informations sur quatre activistes arrêtés la semaine dernière près de Damas, après que le corps d'un de leurs amis, Ghayath Mattar, ait été rendu à sa famille le week-end dernier. "Mohamed Tayseer Khoulani, Mazen Zyadeh et les frères Yahya et Maan Shurbaji ont été arrêtés le 6 septembre", le même jour que Ghayath Mattar, et "sont détenus au secret par le Service de renseignement de l'armée de l'air, selon certaines sources. Ces militants syriens sont tous originaires de Daraya, ville située dans le sud-ouest de la banlieue de Damas. Ils risquent fortement d'être victimes de torture et d'autres mauvais traitements", indique l'organisation de défense des droits de l'Homme.

"Le nombre croissant de personnes mortes en détention ainsi que l'incapacité des autorités syriennes à mener des enquêtes indépendantes met en relief un plan d’abus systématiques, soutenu par le gouvernement, qui place tout détenu dans une situation de risque sérieux", a indiqué Philip Luther, vice directeur du programme Moyen-Orient et Maghreb d'Amnesty. "Yahya Shurbaji est particulièrement menacé étant donné son rôle d"'organisateur de manifestations pacifiques. Les autorités syriennes doivent immédiatement révéler ce qu'il est advenu des détenus et leur donner accès à des avocats, à leur famille et à toute assistance médicale requise", a poursuivi M. Luther. Selon un rapport publié le mois dernier par Amnesty, 88 détenus sont morts en prison depuis avril. Sept détenus, dont Ghayath étant décédés derrière les barreaux ces dernières semaines, le total est porté à 95 personnes.

 


 

 

Lettre ouverte à Nabil al-Arabi

 

Quelque 176 associations travaillant dans les pays arabes ont, par ailleurs, écrit mardi au secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil al-Arabi, pour lui demander d'agir pour mettre fin aux violences en Syrie, en soutenant la prise de sanctions contre les responsables de la répression. "Nous espérons que la Ligue va jouer désormais un rôle plus actif et plus décisif pour mettre fin aux graves violations des droits de l'homme commises contre la population syrienne", ont écrit les signataires, dans une lettre ouverte, intitulée "le silence n'est plus une option, les Syriens ne peuvent pas se permettre d'attendre".

"Nous demandons à la Ligue d'inclure dans son plan la demande d'une cessation des violences, de la libération de tous les prisonniers politiques et des dédommagements pour les victimes de la répression", ont indiqué les signataires. "Si les autorités syriennes refusent de coopérer, nous demandons à la Ligue de soutenir la prise de sanctions contre la Syrie et ses dirigeants, y compris à travers le Conseil de sécurité des Nations unies", ont-ils souligné. Parmi ses sanctions figurent notamment "l'interdiction de voyager et le gel des avoirs des responsables de la répression", "un embargo immédiat sur les armes", "la suspension de l'adhésion et du droit de vote de la Syrie à la Ligue Arabe".

La lettre ouverte est notamment signée par la Fédération internationale des ligues de droits de l'homme (FIDH), Human Rights Watch, une vingtaine d'ONG égyptiennes, deux ONG syriennes et de nombreuses ONG soudanaises, yéménites, marocaines, mauritaniennes, jordaniennes, libanaises, palestiniennes, tunisiennes.

Selon l'ONU, les violences en Syrie ont fait au moins 2.200 morts depuis le début des manifestations à la mi-mars, en majorité des civils. De son côté, le régime affirme se battre contre des "bandes terroristes armées" et refuse de reconnaître l'ampleur de la contestation.

 

 

 

Lire aussi : Divisés sur l'avenir de leur pays, les Syriens ont en commun la peur

Psychanalyste syrienne de renom, première femme à exercer dans ce pays, Rafah Nached a œuvré, depuis le début de la contestation contre le régime à aider ses concitoyens victimes d'une répression sans précédent. Elle était l'un des initiateurs de réunions hebdomadaires auxquelles participaient des Syriens de toutes confessions, partisans ou adversaires du président Bachar el-Assad, pour exorciser un sentiment qui leur est commun: la peur.
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