« Le mec de la tombe d’à côté » : coup de foudre au cimetière

Le titre déjà annonce le ton de ce roman : accrocheur, saupoudré d’un mélange d’ironie et de désinvolture. Parfait en somme pour une histoire d’amour qui s’enclenche dans un cimetière. Et dont les protagonistes ne sont pas de sombres vampires et autres glauques créatures.
Avec Le mec de la tombe d’à côté c’est, au contraire, l’élan de vie que dépeint Katarina Mazetti. Cet élan qui va faire s’aimer deux personnages à la rencontre improbable. Et à la compatibilité des personnalités encore plus improbable.
Elle est une bibliothécaire un peu terne, amatrice de livres, de design aseptisé, de couleurs beiges et passe-muraille... Une citadine dans l’âme. Une jeune veuve pas vraiment éplorée, plutôt paumée par la perte de son mari et qui va fréquemment se recueillir sur sa tombe.
Lui est agriculteur. Il vit seul dans une ferme au décor plutôt kitch ponctué de napperons en crochet et de papier peint chargé. Depuis la mort de sa mère, il y a quelques mois, il s’occupe exclusivement de ses vingt-quatre vaches laitières et... de l’entretien de la pierre tombale de ses parents qu’il vient fleurir assidûment.
Ces deux-là, qui sont voisins de cimetière si l’on peut dire, se croisent ainsi régulièrement. Ils commencent par s’agacer prodigieusement : Désirée est exaspérée aussi bien par l’apparence de ce « bouseux » que par la surcharge florale et tape-à-l’œil de sa stèle. Benny l’est tout autant par cette femme « crevette » recroquevillée sur son banc, son carnet de poésie à la main. Bref, ils s’observent comme chien et chat. Jusqu’à ce qu’un beau jour, la magie d’un sourire illuminant simultanément leurs visages, ils en restent tout les deux éblouis. Ce sera le début d’une passion aussi dévorante qu’incommode entre ces contraires. L’une modèle de sobriété, l’autre parfait exemplaire de l’homme rustique. Une souris de ville croisant un rat des champs en somme !
L’idée de réunir sentimentalement deux êtres que tout oppose n’est évidement pas ce qui fait l’originalité de ce roman. Sauf que Katarina Mazetti s’est emparée de ce mécanisme majeur des romans à l’eau de rose pour composer un roman psychologique... bourré d’humour. Le ton de ce récit, « qui pose la très sérieuse question du choc des cultures », comme le signale la quatrième de couverture, est mi-tendre, mi-moqueur. L’écriture est vive et légèrement abrupte. Elle dépeint au moyen de monologues, par chapitres alternés, et de dialogues au pragmatisme tout scandinave, à la lisière même du désenchantement, les points de vue de Désirée et Benny sur leurs sentiments. L’amour peut-il vraiment surmonter les barrières sociales ? C’est ce que vous découvrirez en lisant ce premier roman adulte de cette ex-journaliste suédoise, productrice de radio, chroniqueuse littéraire et auteure de livres pour la jeunesse. Une histoire visiblement inspirée de sa propre expérience, Katarina Mazetti ayant vécu, nous apprend sa notice biographique, pendant 20 ans avec son compagnon et leurs 4 enfants dans une petite ferme dans le nord de la Suède !
Depuis sa parution en 2006, ce roman a connu un énorme succès international. Au point que son auteure a senti la nécessité de poursuivre l’aventure de Désirée et Benny dans un second roman intitulé Le caveau de famille.
Traduit en plus de 15 langues (dont en français par Lena Grumbach et Catherine Marcus), Le mec de la tombe d’à côté – qui a aussi fait l’objet de nombreuses adaptations théâtrales – est disponible, en français bien sûr, en format poche aux éditions Babel. À ne pas rater !