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À La Une - Cimaises

La folie de Ginette pour Jean-Marc Nahas

Sur toiles volantes et sans cadres et sur le mur de Ginette Concept Store* (Gemmayzé), Jean-Marc Nahas a illustré sa révolution et celle des pays voisins. Une révolution permanente.

Jean-Marc Nahas devant ses dessins muraux. (Michel Sayegh)

Jean-Marc Nahas n’a pas besoin de descendre dans la rue pour manifester. Son champ de bataille c’est sa toile et c’est au bout de son crayon qu’il inscrit sa révolution. Ses émotions, ses cris, ses hurlements, c’est en vrac qu’il les éclabousse, les aligne, les dessine. À premier abord, il semblerait qu’un certain chaos règne dans ses hachures, ses volutes et ses circonvolutions lovées dans ces dessins qui s’imbriquent l’un dans l’autre telles des poupées russes. Mais à bien observer, l’espace en noir et blanc de l’artiste, émaillé souvent de rouge et traversé récemment de bleu et de jaune, évoque les algorithmes tantôt linéaires, tantôt parallèles, trempés dans de multiples cultures qui font et refont son art.
Toujours à contre-courant, fustigeant le clonage des genres et pourfendant le formatage d’un «art-mode», Nahas aime lui aussi à se remettre en question. Quoique reconnaissable et singulier (il a été un des principaux précurseurs et défendeurs du dessin dans cette partie du monde), l’artiste se renouvelle. Une mue bien élaborée.

Le trait pour toute arme
Chez Ginette Concept Store, il a remonté le temps et revisité les classiques qui prenaient les murs pour des toiles. Il est même allé plus loin encore. À cette ère où les premiers hommes taillaient dans les rochers. Leurs peintures rupestres témoignaient alors des débuts de l’humanité.
Perché donc sur son échafaudage, il s’est appliqué à parler d’elle. Elle, c’est celle que Georges Moustaki chante sans la nommer. Cette révolution permanente diffuse et entre les lignes de J.-M. Nahas est «celle que l’on matraque; que l’on poursuit, que l’on traque. C’est elle qui se soulève, qui souffre et se met en grève. C’est elle qui l’on emprisonne, qu’on trahit, qu’on abandonne. Enfin, c’est elle qui donne envie de vivre et de la suivre...».
«Je ne peux me taire, précise Nahas devant tout ce qui se passe dans le monde arabe, mais mon arme est le dessin et l’art n’est pas fait pour séduire ou faire simplement dans “le lisse”.»
«Ginette jannat» (elle est devenue folle) et la voilà qui se rebelle, qui ne se tait plus et qui entraîne le monde dans sa danse morbide. Sur le noir et blanc de J.-M. Nahas, ses aplats, les fleurs côtoient les taches de sang et les figures de grands tyrans deviennent des icônes mythologiques.
L’artiste ne la nomme pas, certes, mais elle est présente dans tous ses travaux. Fragiles mais portant le fardeau du monde sur leurs épaules, ces femmes qui habitent et peuplent ses toiles, qui hurlent et lèvent les bras au ciel, symbolisent l’humanité. Et si l’artiste les a choisies voilées, ce n’est que pour représenter la fragilité, la soumission des êtres. Villageoises ou rurales, elles sont cette chaîne de l’humanité qui est en train de se soulever dans le monde arabe.
Le plaisir chez l’artiste réside dans le cheminement du travail. «Tout est impulsif, passionnel, en constante ébullition, dit-il, mais en balance avec ce trait. Comme un calcul arithmétique visuel.» D’où vient-on? Quelles sont nos origines? se demande-t-il et pour toute réponse, Nahas qui se dit aussi arabe que japonais se suffit de glaner dans des cultures antérieures afin de forger sa propre écriture. Un langage authentique et sincère qui défriche les a priori et le statisme et fait de cet art un mouvement en marche avec son temps.

* Ginette Concept Store, Gemmayzé, jusqu’au 15 septembre. Tél. : 70/575077.
Jean-Marc Nahas n’a pas besoin de descendre dans la rue pour manifester. Son champ de bataille c’est sa toile et c’est au bout de son crayon qu’il inscrit sa révolution. Ses émotions, ses cris, ses hurlements, c’est en vrac qu’il les éclabousse, les aligne, les dessine. À premier abord, il semblerait qu’un certain chaos règne dans ses hachures, ses volutes et ses...

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