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Turbulences

La tromperie, la dissimulation, cela faisait des années qu'ils en étaient devenus les spécialistes, une expertise mise au service d'intérêts toujours supérieurs, d'une stabilité factice qui cachait mal les rancunes, les frustrations, les haines parfois, accumulées au fil des provocations et des insinuations meurtrières.
Et soudainement, comme une cocotte-minute qui n'en peut plus de rester sous pression, voilà que les ressentiments explosent, que les langues se délient, que l'hypocrisie se dilue, que la vérité est lancée au visage de ceux-là mêmes qu'on s'efforçait de ménager jusqu'à présent pour éviter des fractures lourdes de conséquences.
Plus de faux-semblants donc, plus de faux-fuyants : de Bahreïn à l'Arabie saoudite, du Koweït aux autres États membres du Conseil de coopération du Golfe, la dénonciation se libère telle une traînée de poudre et cible un seul objectif, l'Iran, accusé d'entretenir la subversion dans la région, de financer les courants séparatistes, d'implanter des réseaux d'espionnage.
Le contentieux, ne l'oublions pas, est ancien et bien lourd : de l'ingérence, presque banalisée, de l'Iran dans les affaires internes irakiennes à l'appui accordé aux contestataires de Manama et à la minorité chiite du Yémen, de l'occupation des îles Tomb et Abou Moussa, revendiquées par les Émirats arabes unies, à la menace que représente la montée en puissance d'un Iran nucléaire, les motifs de conflit sont nombreux, les raisons de ruptures fracassantes évidentes.
La goutte d'eau, celle qui, immanquablement, fait déborder le vase, a été l'intervention saoudienne en appui au régime allié de Bahreïn, une implication qui a douché l'ambition iranienne d'y voir l'opposition chiite prendre les rênes du pouvoir, exerçant ainsi une pression accrue sur la monarchie wahhabite.
Là, on touche à la clef de voûte, celle qui détermine tous les scénarios à venir : la rivalité régionale entre l'Iran et l'Arabie saoudite, entre une théocratie chiite aux ambitions clairement expansionnistes et une puissance sunnite qui n'entend nullement permettre au voisin perse de marcher sur ses plates-bandes.
Que toute la région soit affectée par cet antagonisme, que le Liban se retrouve au cœur des tiraillements, il n'y a là rien d'étonnant et l'alignement se fait forcément en fonction de critères politico-communautaires. La Syrie, gouvernée par une minorité alaouite, en proie à une révolte interne, en fait aujourd'hui les frais tout comme la fameuse entente « SS » (pour Syriens-Saoudiens), les éclats de la brisure atteignant de plein fouet le Liban tout proche.
Le Hezbollah y a, en effet, balisé le chemin depuis bien longtemps, depuis que l'Iran en a fait son émanation directe, son porte-voix légitime, depuis que l'État se voit dicter les décisions à prendre par un parti « d'ordre divin » qui n'a toujours pas compris que le poids de la parole libre est plus important que celui des armes.
Le positionnement des forces du 14 Mars à cet égard ne date pas d'hier et les attaques directes de Saad Hariri au sujet du rôle déstabilisateur de l'Iran ne constituent que l'aboutissement d'un long processus qui s'est fracassé contre un mur fait d'arrogance et d'intransigeance.
Alors que le monde arabe est le théâtre de bouleversements historiques, que le vent de la liberté gagne une Syrie jugée jusque-là impénétrable, la hache de guerre vient d'être déterrée entre les deux puissances chiite et sunnite de la région, réveillant des ressentiments longtemps contenus.
Il y a là beaucoup d'ingrédients pour un chambardement régional autant inédit qu'inquiétant, beaucoup de données nouvelles qui ne pourraient qu'avoir un impact direct sur la situation interne au Liban...
La tromperie, la dissimulation, cela faisait des années qu'ils en étaient devenus les spécialistes, une expertise mise au service d'intérêts toujours supérieurs, d'une stabilité factice qui cachait mal les rancunes, les frustrations, les haines parfois, accumulées au fil des provocations et des insinuations meurtrières.Et soudainement, comme une cocotte-minute qui n'en peut plus de...
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