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Culture - Danse

Dans les territoires mouvants du temps suspendu...

Sur les planches du Monnot, deux pièces, l’une signée Lotus Eddé Khouri, la seconde Muhanad Rasheed, deux chorégraphes et danseurs de la compagnie Iraqi Bodies (basée en Hollande) tissent en mouvements, sons et lumières, la trame d’univers parallèles. Entre rêve et réalité, présence et absence, vécu et projection...

Muhanad Rasheed happé par son rêve...

Sur une scène nue, deux femmes dans le noir, sous un faisceau de lumière qui dessine leurs mouvements. L’une est immobile, bras tendus à l’horizontale, mine figée d’un être sans vie. Automate ou pantin immobilisé. L’autre, derrière elle, se contorsionne fiévreusement, silhouette sinueuse et ondulante, dans un balancement de cheveux fous, sur une musique saccadée et forte. Qui s’arrêtera brusquement pour faire place au silence. Ou plutôt au « son » d’un silence habité, comme la mémoire, de souvenirs diffus, d’images prégnantes et inintelligibles, de fantasmagories et autres quêtes inassouvies.
Un son, composé de bruitages lointains, ponctué du martèlement des pas de la « danseuse immobile », qui s’est mise à bouger, à arpenter la scène. Traçant, dans un aller-retour fantomatique, les lignes d’un espace qui enferme la seconde dans un terrain indéfini, une zone incertaine. Comme un état de semi-conscience.
Quel lien y a-t-il entre ces deux femmes, ces deux ombres mouvantes ? Que partagent-elles ? Qui est qui, où et quand?
Il y a un suspense diffus dans cette création de Lotus Eddé Khouri, intitulée Le temps l’emportera. Une chorégraphie dont les repères spatiotemporels ainsi que toute velléité de narration ont été abolis pour laisser place à une atmosphère dense, sombre, voire oppressante par moments. Une « atmosphère » obtenue par un habile équilibre entre les mouvements lents et rapides, mais toujours extrêmement sobres, du duo de danseuses (Lotus Eddé Khouri et Sandra Iché), l’éclairage volontairement réduit mais d’une intense précision (signé Muhanad Rasheed) et la bande sonore monocorde, dans ses alternances de stridences et de heurts (spécialement composée par Stéphane Rives)... Et sur laquelle le spectateur va projeter sa propre histoire, puiser dans son propre vécu, pour contribuer activement à l’élaboration d’une trame à cette pièce abstraite. Et âpre.

Peurs et énergies
Musique plus dramatique, plus intense, tout comme l’éclairage, plus appuyé, dans le solo B Dream, entièrement conçu, réalisé et présenté par Muhanad Rasheed. Ce danseur et chorégraphe au talent consacré par le prix du « Promising Choreographer » des « Dutch Dance Days » en 2010 a également remporté la même année le « Swan Award for Best Dance Production » en Hollande.
Inspiré d’une chorégraphie plus ancienne, créée à Bagdad après la guerre de 2003, ce solo magistral, mêlant furieusement peurs et énergies, aborde également les territoires mouvants du temps suspendu. Celui du rêve, en tant qu’autre repère spatiotemporel, autre réalité. Le spectateur est vite emporté dans l’univers – plus aisément abordable – de ce danseur. De ce corps qui semble pris dans la tourmente, se ploie, se contorsionne, se recroqueville, jusqu’à former des silhouettes inquiétantes... Puis se déploie à nouveau, en une sorte de lutte vitale, mouvements fiévreux, ondoyants, tourbillonnants, prestes et fluides, comme happés par la flaque de lumière. Chaude. Avant de basculer dans un univers froid et silencieux, son élan stoppé net, immobilisé par un faisceau bleu. Et de disparaître dans l’obscurité d’un champ ponctué de ballons luisants... Qui semblent flotter comme des bulles de savon.
Le temps l’emportera et B Dream, deux pièces d’une belle exigence présentées en première à Beyrouth, avec le soutien de la Mission culturelle française.
Sur une scène nue, deux femmes dans le noir, sous un faisceau de lumière qui dessine leurs mouvements. L’une est immobile, bras tendus à l’horizontale, mine figée d’un être sans vie. Automate ou pantin immobilisé. L’autre, derrière elle, se contorsionne fiévreusement, silhouette sinueuse et ondulante, dans un balancement de cheveux fous, sur une musique saccadée et forte. Qui...
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