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Économie - Analyse

La responsabilité sociale des entreprises ? Pas vraiment évident

de Abdel Maoula CHAAR*
Le monde ne tourne pas vraiment rond ces temps-ci. Famine, récession, pollution, surpopulation... Les problèmes se multiplient à tous les niveaux. Certains d'entre eux sont d'origine naturelle alors que d'autres résultent de l'activité humaine, notamment celle des entreprises.
Cette situation a donné un nouvel essor à toutes les théories qui affirment que les firmes doivent prendre en compte dans leur gestion les impacts environnementaux et sociaux de leurs activités : la fameuse responsabilité sociétale des entreprises. Celle-ci a même pris une nouvelle ampleur avec les appels à des politiques plus proactives : face à un monde qui se délite, les entreprises seraient sensées prendre l'initiative d'actions qui assurent autant leur pérennité que celle de l'environnement au sein duquel elles opèrent. On parle alors de développement durable.
Dans ce cadre, l'un des gourous du management, Michael Porter, a affirmé il y a quelques semaines dans un article du célèbre Harvard Business Review que les entreprises devraient s'efforcer de créer une valeur partagée (shared value) avec leurs parties prenantes au lieu d'une valeur ajoutée (added value) dont elles bénéficieraient seules. Jusque-là, Michael Porter était l'un des tenants de la maximisation des profits. Il est d'ailleurs célèbre pour ses travaux sur l'avantage concurrentiel dont l'objectif est justement de permettre aux firmes d'accumuler autant de profit que possible.
Les temps sont donc en train de changer et les conférences se multiplient pour expliquer aux dirigeants d'entreprises comment ils vont pouvoir s'adapter à la nouvelle donne en faisant preuve de responsabilité sociale. Certains des discours qui sont prononcés dans ces forums ou certains échanges peuvent être assez étonnants. C'est ce consultant qui explique que la famine, l'accumulation des déchets ou la raréfaction de l'eau ne sont pas uniquement des contraintes et peuvent constituer des gisements de richesse pour les entreprises qui savent adapter leurs activités ou encore ce professeur qui parle d'approche stratégique de la responsabilité sociale, qui affirme qu'elle ne s'oppose pas à la maximisation des profits et qui constate que certains consommateurs sont prêts à payer plus cher pour des produits éthiques ou socio-responsables.
Hypocrite ? Pas vraiment. Ces personnes ont été éduquées dans l'idée qu'une firme ne doit agir que dans l'intérêt de ses actionnaires ou dans le meilleur des cas de celui de ses parties prenantes directes : employés, fournisseurs, consommateurs, etc. Voilà qu'on demande à ces mêmes personnes de ne plus raisonner en termes de cours boursiers ou de profit immédiat et d'accepter de réduire leurs bénéfices au profit du mieux-être hypothétique d'une planète. Cela nécessite bien plus qu'une adaptation de comportement et la mise en application de révérenciel de qualité. Un changement de cadre de réflexion est indispensable. Il convient notamment de revoir le rôle que la firme doit jouer dans le monde de demain. Il s'agit d'une véritable mutation qu'on appelle techniquement « changement de second ordre ». C'est l'un des plus difficiles à mener.

(*) Spécialiste en stratégie et théorie des organisations - Centre de recherche, d'études et de développement (CRED) de l'ESA.

En coopération avec : l'ESA
Le monde ne tourne pas vraiment rond ces temps-ci. Famine, récession, pollution, surpopulation... Les problèmes se multiplient à tous les niveaux. Certains d'entre eux sont d'origine naturelle alors que d'autres résultent de l'activité humaine, notamment celle des entreprises.Cette situation a donné un nouvel essor à toutes les théories qui affirment que les firmes doivent...

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