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Le dernier tsunami « a été le pire de tous », assure la vieille femme, assise sur un futon dans un gymnase servant de centre d'hébergement des rescapés du désastre. Quand le séisme a frappé, la geisha se préparait à se rendre dans un luxueux restaurant pour y chanter devant les clients et jouer de son shamisen, un luth traditionnel à trois cordes pincées. « Je me suis mise à courir sur la route même où ma mère avait couru en me portant sur ses épaules, il y a bien longtemps, lorsque j'étais bébé, relate-t-elle.Mon kimono, mes ceintures, deux shamisen, mes accessoires de coiffure... tout a disparu. Comment donc cela est-il possible ? » Sa maison a été frappée de plein fouet par un véhicule et d'énormes débris charriés par les flots en furie. « J'ai retrouvé dans ma demeure une voiture et un cadavre. C'est un souvenir horrible », dit-elle. « Mais j'ai toujours mes capacités artistiques et le moral. C'est là ma fierté », poursuit la geisha, qui a choisi ce métier pour aider financièrement sa famille, après que son père fut tombé malade. « Je souhaite même chanter et danser pour tout le monde ici », affirme-t-elle, avant d'entonner quelques couplets en faisant semblant de jouer sur un shamisen imaginaire.
Mme Ito, dont le vrai nom est Chikano Fujima, a commencé sa carrière de geisha à l'âge de 12 ans, à Kamaishi. Ces dames de compagnie raffinées, qui ont traditionnellement une clientèle aisée, dédient leur vie à la pratique d'excellence des arts traditionnels japonais. « Je n'ai pas de regrets. Mon maître m'a enseigné de travailler dur afin de posséder quelque chose que personne ne peut te prendre. »
Kamaishi a compté jusqu'à une centaine de geishas à l'époque la plus active de la ville, quand le géant de la sidérurgie japonaise, Nippon Steel, y faisait fonctionner à plein rendement ses usines. La cité a connu depuis les années 1960 un déclin et une récession causés par la concurrence étrangère, même si les hauts fourneaux sont encore là. « À cause de cela, toutes les geishas sont parties. Il ne reste plus que moi ici », explique Mme Ito. « Je veux apporter du plaisir à tout le monde en jouant une fois que la rénovation de la ville sera lancée, promet-elle. Même si je n'ai plus d'amies geishas, je vais jouer et danser avec entrain. »
©AFP
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