Rechercher
Rechercher

Un « islam néerlandais » pour enraciner une communauté

Les musulmans indonésiens disent non à la violence commise au nom de l’islam

Si vous deviez ouvrir un journal en Indonésie aujourd'hui, vous constateriez qu'il y a peu d'éléments permettant de dissiper le mythe selon lequel l'islam est une religion de violence. Toutefois, en observant plus attentivement la façon dont les musulmans réagissent face à cette violence, il s'avère que la réalité est tout autre.
En effet, quelques jours avant le début du ramadan en août dernier, un petit groupe de musulmans de Java-Ouest aurait attaqué des fidèles d'Ahmadiyah. Les Ahmadis se considèrent comme une communauté musulmane et croient au second avènement de Jésus, sous les traits de Mirza Ghulam Ahmad, personnage du XIXe siècle. Ils passent pour être un groupe de dissidents hérétiques aux yeux des musulmans traditionnels. Toutefois, peu de temps après, Slamet Effendi Yusuf, chef de la Nahdlatul Ulama, une des plus grandes organisations musulmanes d'Indonésie, a demandé aux chefs religieux musulmans de recourir à un dialogue persuasif et à des méthodes pacifiques pour traiter les différences qui séparent leurs communautés de celle des Ahmadis.
Peu après l'Aïd el-Fitr, un autre événement violent s'est produit : des musulmans de Java-Ouest ont poignardé deux chefs et plusieurs membres d'un groupe chrétien lors d'une manifestation au cours de laquelle le Forum de la communauté musulmane de Mustikajaya et d'autres organisations musulmanes protestaient contre le projet de construction d'une église par les chrétiens locaux. En réponse, Din Syamsuddin, président de la Muhammadiyah, la 2e organisation musulmane d'Indonésie, a condamné les actes de violence commis à l'encontre des chrétiens et a soutenu que le gouvernement devait garantir la liberté de religion.
Le 22 septembre dernier, des membres d'un réseau terroriste qui ont défrayé la chronique dernièrement pour avoir commis une série de vols de banques au nom de l'islam ont tué par balles trois membres des forces de police à Medan, la capitale de la province de Sumatra du Nord. Abu Tholut, le terroriste présumé qui est recherché, aurait fomenté ces vols en affirmant que tout bien n'appartenant pas au groupe était considéré comme un butin de guerre et pouvait être dérobé afin de soutenir ses opérations. Toutefois, Said Agil Siraj, président de la Nahdatul Ulama, a condamné ces actions et a déclaré qu'il n'y avait pas de violence dans la religion ni de religion dans la violence. Venant d'un chef musulman, ces déclarations suffisent à retirer leur légitimité aux actes terroristes commis au nom de l'islam.
En réalité, le Conseil des ulémas d'Indonésie (MUI) - qui exerce les fonctions d'organe clérical supérieur - a publié en 2004 un décret interdisant le terrorisme. Le Conseil considère que, parce qu'elles sèment la peur, les actions de groupes tels que celui d'Abu Tholut menacent à la fois la souveraineté nationale et la paix internationale. C'est pourquoi, le Conseil estime que le terrorisme est une activité criminelle interdite dans l'islam.
Historiquement, les musulmans indonésiens sont pacifiques et ont fait preuve de compréhension face à la diversité. Dans certains endroits d'Indonésie, comme à Djakarta, Medan, Surakarta et Malang, les mosquées et les églises se côtoient et les personnes de religions différentes vivent en harmonie. La majorité des musulmans indonésiens rejette la violence. En 2006, une des enquêtes menées par l'Institut a révélé que la vaste majorité des musulmans indonésiens - plus de 80 % - n'était pas d'accord avec l'idée selon laquelle les attentats de Bali en 2002 (202 morts) sont une forme de guerre sainte ; moins de 8 % ont déclaré qu'ils le pensaient (les autres ont répondu qu'ils n'étaient pas sûrs ou se sont abstenus de répondre).
Les chefs musulmans en Indonésie s'élèvent clairement contre la violence commise au nom de la religion. Mais le fait que la violence persiste montre que certains musulmans indonésiens n'ont pas encore compris que le fondement de l'islam était la paix.
Je pense que ces événements servent de mise en garde pour les chefs musulmans et la communauté musulmane dans son ensemble. Il faut redoubler d'efforts pour que les principes de non-violence et de paix soient visibles dans notre société. Cela signifie qu'il faut enseigner la paix aux élèves des écoles publiques, des écoles et internats islamiques afin d'encourager les futures générations d'Indonésiens à comprendre que tout acte de violence est contraire aux principes islamiques et aux valeurs humaines universelles. Surtout, nous devons cesser de recourir à la violence et apprendre à dialoguer pour gérer nos différences.


* Suhadi Cholil est maître de conférences au Centre des études religieuses et interculturelles de l'université Gadjah Mada en Indonésie et professeur de religion islamique à Yogyakarta. Article écrit pour le service de presse de Common Ground (CGNews). Source : service de presse de CGNews. Reproduction autorisée.
Si vous deviez ouvrir un journal en Indonésie aujourd'hui, vous constateriez qu'il y a peu d'éléments permettant de dissiper le mythe selon lequel l'islam est une religion de violence. Toutefois, en observant plus attentivement la façon dont les musulmans réagissent face à cette violence, il s'avère que la réalité est tout...