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Économie

Marché de l’emploi : pas de risque réel pour les Libanais

Quelque 475 000 Palestiniens vivent aujourd'hui dans les douze camps de réfugiés répartis sur l'ensemble du territoire libanais, selon les chiffres officiels de l'Unrwa, dont 50 000 ne sont pas enregistrés auprès de l'organisme onusien mais figurent sur les listes de la direction des Affaires des réfugiés relevant du ministère de l'Intérieur. « Il est difficile d'estimer toutefois le nombre exact de ceux qui résident encore au Liban », souligne Salvatore Lombardo, directeur de l'Unrwa, dans un entretien avec L'Orient-Le Jour. « Nombreux sont ceux qui ont quitté les camps pour aller s'installer dans d'autres pays de la région, notamment les pays du Golfe, et dont les noms figurent toujours sur nos listes », explique-t-il.
Selon le responsable de cet organisme dédié depuis 1949 au soutien des réfugiés palestiniens dans 59 camps répartis entre la Palestine, la Jordanie, la Syrie et le Liban, 25 à 30 % des réfugiés inscrits au Liban auraient en effet émigré au cours des dernières décennies, ce qui réduirait à quelque 350 000 le nombre effectif de Palestiniens vivant encore aujourd'hui dans les camps. « À cela s'ajoute l'existence de tranches inactives au sein de la population résidente - femmes, enfants et personnes âgées - dont le nombre représente environ deux tiers des réfugiés », indique-t-il. En effet, outre la prédominance féminine (52 % de la population), 40 % des Palestiniens vivant aujourd'hui dans les camps sont âgés de moins de 25 ans (21 % de moins de 15 ans), 47 % entre 25 et 60 ans, et 13 % au-delà de 60 ans, selon les chiffres les plus récents de l'Unrwa. En outre, selon les données de l'organisation, sur les 3,72 membres composant un foyer moyen dans les camps, seule une personne est active.
Tout compte fait, ce sont donc 80 000 à 120 000 Palestiniens qui seraient directement concernés par l'amendement de l'article 59 du code du travail - soit moins de 10 % de la population active au Liban, estimée à un peu plus de 1,2 million, selon la dernière étude du PNUD sur les conditions des ménages.
Si ce chiffre est loin de celui du demi-million - véhiculé de manière hâtive et aléatoire dans certains médias -, il n'en reste pas moins que l'ouverture du marché à quelque 100 000 travailleurs potentiels constitue, sur le plan théorique, un poids non négligeable dans un pays où le marché du travail peine à intégrer les siens et où le taux de chômage s'élèverait à plus de 20 %, selon certaines sources officieuses (9,2 % selon les chiffres officiels).
Sur le terrain, la donne est toutefois moins inquiétante, « étant donné qu'une partie importante des réfugiés directement visés travaillent déjà de manière illégale », souligne Salvatore Lombardo, ou dans des secteurs informels où un permis de travail n'est généralement pas requis. Il s'agit notamment des secteurs de l'agriculture (qui emploie 11 % des personnes se retrouvant dans ce dernier cas), de la construction (19 %) et de l'Industrie (13 %).
« Je ne sais pas à quel point cet amendement va, en outre, influer réellement sur le marché du travail », ajoute de son côté, dans un entretien avec L'Orient-Le Jour, le spécialiste de la question des réfugiés palestiniens, Ziad el-Sayegh, rappelant qu'en 2006, une décision ministérielle (no. 1/79) ouvrant la voie à l'obtention d'un permis de travail par les Palestiniens n'avait mobilisé que 180 réfugiés en moyenne par an. « Certes, à l'époque, aucune prestation sociale - qu'il s'agisse d'indemnités de fin de service ou d'autres contributions - n'était prévue dans la décision », précise-t-il, ce qui avait démotivé une grande partie des Palestiniens aspirant à un permis de travail.
Quoi qu'il en soit, le risque d'un éventuel rétrécissement des opportunités d'embauche pour les Libanais « n'est pas aussi élevé, la concurrence devant sévir notamment sur le créneau des emplois peu qualifiés, occupé aujourd'hui essentiellement par une main-d'œuvre étrangère », estime de son côté l'économiste Nassib Ghobril. Le choix des employeurs dans ces secteurs, qui se porte depuis des années sur des ouvriers syriens, égyptiens, soudanais, pakistanais et autres, s'élargira donc pour englober les réfugiés originaires des territoires occupés.
Quant aux emplois peu ou très qualifiés, les Palestiniens bénéficieront certes d'une marge plus confortable (nombre d'entre eux étant acculés aujourd'hui à exercer des métiers bien en-deçà de leurs compétences), mais, là encore, le risque d'une concurrence plus acharnée ne se pose pas réellement, au vu de la faible proportion de diplômés au sein de la population palestinienne et de l'émigration d'une partie des personnes ayant accompli des études universitaires à l'étranger.
Aucun chiffre officiel n'est toutefois disponible à ce sujet permettant de cerner l'impact de manière précise. Certaines statistiques élaborées par l'Unrwa servent toutefois de piste d'analyse : les Palestiniens représentent aujourd'hui 3 % du nombre total d'étudiants à l'Université libanaise (UL) et suivent, dans leur grande majorité, des formations souvent peu convoitées par les Libanais ; au sein des facultés de médecine et d'ingénierie de l'UL, par exemple, seul un Palestinien figurait sur les listes des étudiants inscrits durant l'année universitaire 2008-2009. En outre, moins de 200 bourses universitaires ont été accordées, par le biais de l'organisme onusien, à des réfugiés pour compléter leur licence entre 2002 et 2009. Parmi ces derniers, 20 % travaillent aujourd'hui au Liban.
Dire donc que les cols blancs libanais seraient menacés par l'amendement voté par l'Assemblée est fort contestable, du moins dans l'immédiat.
À long terme, les choses risquent toutefois de prendre une autre dimension, l'approbation du droit au travail des Palestiniens devant encourager les réfugiés à s'orienter davantage vers l'enseignement supérieur, en vue de décrocher un emploi sur le marché local...
Toujours est-il que la loi interdit, en dépit des modifications apportées, l'accès des Palestiniens aux professions libérales (médecins, avocats, etc.) et que sur le terrain, « la priorité, en termes d'emploi, restera accordée aux Libanais - une clause qui devra figurer dans le décret d'application du texte amendé », assure Ziad el-Sayegh.
Quelque 475 000 Palestiniens vivent aujourd'hui dans les douze camps de réfugiés répartis sur l'ensemble du territoire libanais, selon les chiffres officiels de l'Unrwa, dont 50 000 ne sont pas enregistrés auprès de l'organisme onusien mais figurent sur les listes de la direction des Affaires des réfugiés relevant du ministère de...

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