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Lifestyle - Reportage

Les Baduy d’Indonésie résistent au progrès. Jusqu’à quand ?

Le gouvernement leur a proposé l'électricité et des écoles, mais ils ont refusé. Les Baduy préfèrent crapahuter pieds nus et cultiver à la main leurs collines luxuriantes.

Près de 12 000 Baduy vivent en quasi-autarcie, en plein cœur de l’île de Java.Jerome Rivet/AFP

Le progrès ? La technologie ?
Sapri n'en voit pas l'intérêt. « Nous avons une vie tranquille, en harmonie avec la nature. Nous ne manquons de rien », témoigne cet homme souriant, au corps souple. Sapri, 38 ans et sept enfants, ignore presque tout du monde extérieur, de la Coupe du monde ou de la crise. Son univers s'arrête aux frontières du « pays Baduy », qui couvre 5 000 d'hectares de forêts tropicales, une réserve en plein cœur de l'île indonésienne surpeuplée de Java. Près de 12 000 Baduy y vivent en quasi-autarcie, disséminés dans une trentaine de villages de maisons construites en bambous et feuilles de palmiers, sans fenêtre. Les meubles, les équipements électriques et les ustensiles modernes y sont prohibés ; la cuisine se fait au bois et les repas se prennent par terre. « Nous respectons depuis des siècles les mêmes règles très strictes », explique Djaro Dainah, un chef de village.
L'origine des Baduy, parfois comparés aux Amish américains, reste un mystère. Ils pourraient être les descendants d'un royaume hindou ayant trouvé refuge dans les montagnes à l'arrivée de l'islam en Indonésie au XVe siècle. Les plus purs d'entre eux sont les 500 Tangtu, les « Baduy blancs », qui habitent trois villages reculés, totalement interdits d'accès aux étrangers. Les règles y sont draconiennes et quiconque ne les respecte pas est exclu et rejoint les « Urang Panamping », les « Baduy de l'extérieur ». Habillés en noir ou bleu foncé, ces derniers ont des conditions de vie moins sévères mais qui restent très encadrées : la marche est le seul moyen de déplacement, la toilette se fait dans la rivière, sans savon, et les enfants ne vont pas à l'école.
Ce mode de vie est toléré par le gouvernement même s'il a parfois tenté de « moderniser » les Baduy. « On nous a proposé l'électricité, mais nous avons refusé, au nom du respect de notre culture. Mais il est possible qu'un jour ou l'autre la situation évolue », témoigne Djaro Dainah. « Les changements ont été rapides ces dernières années et il est de plus en plus difficile de résister aux influences extérieures », constate aussi Cayut, un octogénaire qui affirme n'avoir « jamais quitté son village ».
L'occidentalisation des modes de vie ne laisse pas insensibles les jeunes Baduy. Comme Sana, une mère de famille, qui écoute la radio « pour (se) distraire bien que ce soit interdit ». Il est de plus en plus fréquent que le calme profond de la forêt soit perturbé par la sonnerie d'un téléphone portable. « Cela n'aurait pas été accepté il y a quelques années », souligne Samani, qui en possède un pour gérer son commerce de clous de girofle. Car, comme d'autres, Samani s'est habitué à manier de l'argent, indispensable depuis le récent développement des cultures agro-forestières (bois, sucre de palme, fruits) alors que les Baduy ne produisaient auparavant que pour leurs propres besoins.
L'apparition des touristes, attirés par « l'exotisme » d'une « plongée hors du monde moderne », selon un guide de voyage, représente un autre défi à relever pour la tribu. Mais « nos croyances et notre culture sont fortes », affirme Sakri, un quinquagénaire au visage buriné par la vie au grand air.
« Lorsqu'il m'arrive de quitter le village, je n'ai pas envie de rester là-bas, de changer ma vie. Elle est basique, mais cela me va. » À ses côtés, son cousin Nadi, 35 ans, approuve, en regardant ses enfants jouer avec des bouts de bois.
Le progrès ? La technologie ? Sapri n'en voit pas l'intérêt. « Nous avons une vie tranquille, en harmonie avec la nature. Nous ne manquons de rien », témoigne cet homme souriant, au corps souple. Sapri, 38 ans et sept enfants, ignore presque tout du monde extérieur, de la Coupe du monde ou de la crise. Son univers s'arrête...

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