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Culture - Festival Shams

Les épaves moribondes de Beckett

Un homme qui a enregistré sa voix, il y a plus de trente ans, s'écoute parler...C'est « La dernière bande » de Samuel Beckett, traduite en arabe par le metteur en scène syrien Oussama Ghanam et donnée au théâtre Tournesol. Avec, en one-man-show, un acteur également syrien, Mohammad Alarachi.

Un one-man-show pour un théâtre de l’absurde. (DR)

Un théâtre de l'absurde, entre silence, monologue angoissant et rare humour noir.
Un des maîtres incontestés de l'avant-garde de la scène et prix Nobel de littérature en 1969, Samuel Beckett, est ici en langue arabe. Pour ses attentes, son angoisse, ses silences, son rire cruel, son humour noir et grinçant, ses interminables monologues, ses êtres diminués, ses épaves moribondes.
Musique blues, « groovy », sensuelle et syncopée pour l'ouverture d'Al-sharit al-akhir (La dernière bande), traduite avec doigté en langue arabe et ingénieusement mise en scène (de par sa parcimonie de gestuelle et le public - soixante-dix personnes - placé à même l'avant-scène, sur des chaises en plastique) par Oussama Ghanem qui offre une cinquantaine de minutes de spectacle. Un spectacle intimiste, un peu asphyxiant, où l'on ne bronche pas... Surtout pour la performance d'un acteur tout en savante absence et effacement, Mohammad Alarachi, qu'on a applaudi à tout rompre, il y a deux jours, pour sa prestation dans Les deux immigrants de Mrozek, au sein des productions du Festival du printemps, qui s'échelonne jusqu'à la fin du mois. Un acteur au nez rouge, un peu patraque, voix cassée, souffle brisé, expressions du visage tourmentées ou impassibles, voilà un parfait passeur des tics de langage et de l'insaisissable densité de l'univers du théâtre de l'absurde.
Un homme se souvient ? Un homme affronte son passé? Un homme livre son testament? Un homme s'amuse à jouer d'une bande sonore? Tout cela et rien avec Beckett.
Flot de vocables, sans défense philosophique ou existentielle précise, pour une sorte de bavardage des profondeurs. Des paroles presque incohérentes, bafouillantes, qui provoquent chez le spectateur angoisse, attente et quelques rires clairsemés.
Dans cet univers hermétique, dépouillé, tendu vers l'absence, le dénuement et le silence, placé sous le signe d'une lente décomposition... On attend toujours chez Beckett ! Cela n'empêche pas parfois de sourire. Sourire cruel ou nerveux, peu importe, car l'on sait tous pertinemment que la condition humaine est misérable et douloureuse. «Rien n'est plus drôle que le malheur... C'est la chose la plus comique du monde », dit, peut-être sans cynisme mais avec une sorte de masochisme, un des personnages dans l'œuvre de Beckett.
Et on retrouve le présage de cette destinée humaine dans cette bande au discours vaseux où s'atrophient la vie et ses battements. Sans mouvements grandiloquents et avec un langage avare, qui bannit toute grâce de style, de pittoresque ou de description sérieuse. Ainsi se déroule cette Dernière bande où rien ne se passe et où l'on écoute, sans dérision ou destruction du langage, le temps immuablement couler. Comme du vent dans les branches des arbres...
Un théâtre de l'absurde, entre silence, monologue angoissant et rare humour noir.Un des maîtres incontestés de l'avant-garde de la scène et prix Nobel de littérature en 1969, Samuel Beckett, est ici en langue arabe. Pour ses attentes, son angoisse, ses silences, son rire cruel, son humour noir et grinçant, ses interminables monologues, ses...

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