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Culture - Exposition

Un musée éphémère en hommage à Paul Guiragossian et Shafic Abboud

Faire connaître, partager et diffuser la troublante beauté des œuvres de deux figures de proue de la peinture libanaise, Paul Guiragossian et Shafic Abboud : telle est l'intention - très noble - de Tamara Inja Jaber et Abraham Karabajakian, curateurs de l'exposition « Pieces for a Museum » qui sera inaugurée ce soir, au Loft 46*.

«Sans titre», de Shafic Abboud, collection Viviane et Robert Debbas.

Disons-le d'emblée, sans tergiverser. Cette exposition est à ne pas rater. Rares, trop rares sont les occasions d'admirer des chefs-d'œuvre de grands maîtres dans un pays qui, nous ne le répéterons (ni regretterons) jamais assez, manque atrocement de musée pour l'art contemporain.
Alors, lorsque deux amoureux de l'art se retrouvent pour rendre un hommage (le mot anglais « tribute » prend ici plus d'ampleur) à Paul Guiragossian et Shafic Abboud - « deux grands-pères de l'art arabe moderne », selon les termes d'Isabelle de La Bruyère, directrice de Christie's au Moyen Orient -, impossible de ne pas répondre « présent ! ».
Les quelque soixante-huit toiles exposées là sont d'autant plus précieuses qu'elles sortent pour la première fois au grand jour dans le cadre d'une manifestation de cette envergure. Jalousement et précieusement gardées dans les beaux écrins des maisons ou institutions auxquelles elles appartiennent, les peintures ont été mises généreusement à la disposition de deux curateurs absolument convaincus que « l'art pictural est fait pour être vu et
apprécié ».
Voilà donc une exposition pour rêver. Devant les couleurs superbes des toiles. Devant la maîtrise et la technicité des artistes. Devant la liberté de création qui exsude de ces tableaux. « Abboud, autant que Guiragossian, a magnifié les couleurs. L'art moderne n'est-il pas l'expression intense de la liberté ? », renchérit Abraham Karabajakian, par ailleurs collectionneur émérite.
L'idée de cette exposition serait née d'un rêve.   « Un rêve qui nous hante depuis l'adolescence, affirment les organisateurs. Celui d'un Liban de beauté, d'art et de culture. C'est en voyant cet espace, une ancienne usine de le région de Dora, que le projet a commencé à prendre forme, ajoutent-ils. Prêtée par des amis, nous l'avons retapée de l'intérieur, réaménagé l'éclairage, installé un système de sécurité à rayons infrarouges et des caméras de surveillance... » Ils évoquent aussi quelques difficultés, dont celles de convaincre les collectionneurs de prêter les chefs-d'œuvre. D'assurer une couverture par des sponsors. Ou encore de boucler le volet sécurité, non négligeable lorsque la valeur d'une œuvre artistique pourrait avoisiner les 500 000 $. « Nous voudrions dire merci aux collectionneurs qui nous ont fait confiance. À la famille Hariri, à Robert et Viviane Debbas, à la famille Guiragossian, à BankMed, à Antoine et Joan Moughanni, à Karim et Cynthia Debbas, à Saleh Barakat, à Joseph Faloughi et tous les autres... »

Figures de proue
Paul Guiragossian et Shafic Abboud « sont tous les deux aimés pour leur personnalité autant que pour leurs œuvres, écrit l'expert chez Christie's William Lawrie dans la préface du catalogue de l'exposition. Ils ont laissé une marque indélébile sur les générations futures de jeunes artistes. Leurs toiles sont imprégnées de spontanéité, de lumière, d'émotions et de
couleurs. »
En guise d'apéritif, savourons ces mots de Joseph Tarrab, imprimés dans le catalogue et tirés d'un article paru dans L'Orient-Le Jour en 1994. « Les histoires de Shafic Abboud, on s'en fout, écrit le critique d'art. C'est le timbre de sa voix qui nous importe et nous captive. Sa peinture n'est pas narrative, comme il le dit, mais célébrative et "vestigielle" : le récit, comme les formes, se dissout dans la couleur qui fusionne avec la couleur, ou se coagule en vestiges polychromes des êtres et des choses, en traces mémorielles fantomales. Peinture des Signatures des choses : ces présences presque absentes, l'œil les effleure, les touche, les palpe savoureusement »....
Les pages du catalogue regroupent également, sous l'intitulé Lust of the Eye, un beau texte philosophique de l'écrivain Remo Guidieri sur l'œuvre de Paul Guiragossian.
 « Pieces for a Museum » : le titre de cette exposition paraît doublement symbolique. Il renvoie, d'une part, à la nature des œuvres accrochées qui, par leur beauté et leurs dimensions, sont dignes d'un musée. Et souligne, d'autre part, le caractère éphémère de ce musée improvisé. Un musée qui offre une peinture vivante, puissante, admirable. Une peinture belle, tout simplement.

* Vernissage ce soir, de 19h00 à 22h00. L'exposition se tient jusqu'au 22 avril, au Loft 46, Dora, autoroute maritime. Tél. : 03/211110. 
Disons-le d'emblée, sans tergiverser. Cette exposition est à ne pas rater. Rares, trop rares sont les occasions d'admirer des chefs-d'œuvre de grands maîtres dans un pays qui, nous ne le répéterons (ni regretterons) jamais assez, manque atrocement de musée pour l'art contemporain. Alors, lorsque deux amoureux de l'art se retrouvent pour rendre un...

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