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Moyen Orient et Monde - Conflit

En Colombie, l’absence obsédante du père pour les enfants d’otages

Officiellement, la guérilla des FARC détient encore 23 policiers et militaires. Toutefois, des centaines d'anonymes seraient retenus par la guérilla et d'autres groupes armés aux fins de rançons.

Le drame des otages en Colombie touche aussi des dizaines d'enfants, qui pour certains n'ont pas vu leur père depuis plus d'une décennie, une absence obsédante rarement évoquée.
Viviana Duarte, 13 ans, est nerveuse ces jours-ci : les médias évoquent la libération, probablement à la mi-mars, du sergent Pablo Emilio Moncayo, enlevé il y a plus de douze ans par la guérilla, le 21 décembre 1997. L'homme aurait passé une grande partie de sa captivité au côté d'Edgar Duarte Valero, 44 ans, le père de Viviana, enlevé le 14 octobre 1998 dans le sud-est de la Colombie. « Il va me raconter des choses sur lui », dit-elle à l'AFP. Viviana vit ainsi depuis l'âge de deux ans et demi, au rythme des communiqués des FARC, des lettres de son père lorsqu'elles arrivent et des « preuves de vie » envoyées par la guérilla. Tous les samedis, à l'heure où ses amis dorment ou s'amusent, vers 23h00, elle dépose un message vocal lu à la radio pour son père. La radio, à travers des émissions comme Las Voces del secuestros (les voix de l'enlèvement), est presque le seul moyen de faire parvenir quelques mots aux otages, en général autorisés à écouter. Dans une vidéo filmée par la guérilla, « il a dit que cela le renforçait », explique-t-elle.
Comme Viviana, les enfants du sergent Arbey Delgado, enlevé le 3 août 1998, attendent depuis onze ans. Feyer, 15 ans, Sharon, 14 ans, et Diana, 12 ans, ont chacun leur manière d'affronter l'absence. Feyer a une sorte de « rage » en lui, raconte sa mère Gladys : « Il dit que son père ne va jamais revenir. Que tout cela n'est qu'un jeu de pouvoir », tandis que « Sharon est plutôt silencieuse. Triste, elle n'a presque pas d'amis ». La dernière, Diana, avait dix mois lorsqu'il a été enlevé : « Je ne savais même pas ce qu'était un papa, témoigne-t-elle, je voyais des filles avec leur père et je ne savais pas qui il était. » Comme Viviana, ces enfants assument une partie du fardeau de leur père en tentant de l'aider à distance, à travers leurs résultats scolaires, explique leur mère : « Cette semaine ils ont envoyé un message radio à leur père en lui disant qu'ils seraient les meilleurs. »
Cette expérience provoque chez les enfants « une responsabilité morale très grande », témoigne aussi Susy Abitbol, la mère de Viviana : « Ma fille a dû mûrir à pas forcés, en participant à des manifestations, en lui envoyant des messages et en s'adressant aux médias. » Selon la Corporacion Matamoros, organisme portant assistance aux familles des otages de la police et de l'armée, sur les 41 enfants d'otages bénéficiant de bourses d'études, « seulement 5 % » n'arrivent pas à atteindre le niveau. Et Viviana a poussé la responsabilité jusqu'à libérer sa mère du mariage : « C'est très dur pour elle. Si elle pouvait se trouver quelqu'un cela serait très bien. Elle est mariée depuis quinze ans, dont onze seule ! »
Selon des données officielles, la guérilla des FARC détient encore 23 policiers et militaires, qu'elle qualifie d'« otages politiques » car elle souhaite les échanger contre plusieurs centaines de ses combattants emprisonnés. Parmi eux se trouvent les pères de Viviana, Sharon, Feyer et Diana. Des centaines d'anonymes pourraient également être détenus par la guérilla et d'autres groupes armés, aux fins de rançons. Les autorités toutefois refusent de les classer au rang des otages, évoquant simplement des « disparus », soit 1 502 personnes, selon un rapport officiel publié en avril 2009 par Fondelibertad, organisme dépendant du ministère de la Défense.

Le drame des otages en Colombie touche aussi des dizaines d'enfants, qui pour certains n'ont pas vu leur père depuis plus d'une décennie, une absence obsédante rarement évoquée.Viviana Duarte, 13 ans, est nerveuse ces jours-ci : les médias évoquent la libération, probablement à la mi-mars, du sergent Pablo Emilio...

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