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Moyen Orient et Monde - Le billet

Le péril jeune

J'avais vingt ans, écrit Paul Nizan, avant d'ajouter : « Je ne laisserai personne dire que c'est le plus bel âge de la vie. » En France, ces derniers temps, c'est dès 6 ans que le jeune commence à en prendre pour son grade.
En mai dernier, deux cousins de 6 et 10 ans étaient cueillis par la maréchaussée à la sortie de l'école, maternelle pour le premier, primaire pour le second. Ce au motif que la mère, ascendant balance, d'un autre écolier pensait les avoir vus au guidon d'un vélo appartenant à son fiston. Selon des rapports non confirmés, les représentants de l'ordre auraient menacé de noyer le doudou du benjamin et collé la veilleuse luciole en plein dans les mirettes de l'aîné, pour leur faire cracher le morceau. Au bout de deux heures passées au poste, les deux graines de truand ont été relâchées dans la nature. Signe que les condés avaient bien flairé la sale affaire, après ce premier coffrage, le plus jeune des deux marmots délinquants affirmait ne plus vouloir aller à l'école. De la racaille en puissance, on vous dit.
Il y a quelques jours, c'est Anne, 14 ans, qui a découvert, huit heures durant, les joies de la GAV, garde à vue pour les non-initiés. Anne et deux de ses copines (complices ?) ont-elles lâchement mis des claques à la petite nouvelle qui venait déjà de se prendre dans le tibia le pied d'un jeune rustre de son collège, ou bien ont-elles tenté de s'interposer pour mettre fin à un lynchage ? L'histoire ne le dit pas encore. Ce qu'elle dit, en revanche, c'est qu'après dépôt de plainte de la part de la jeune fille brutalisée, la police va ramasser Anne - qui n'a rien vu venir - chez elle au réveil, et l'embarque en pyjama direction le trou. La maman d'Anne est, conformément aux procédures, alertée... par SMS. Ce n'est qu'à la fin de la garde à vue, ponctuée par une visite médicale à laquelle Anne est emmenée menottée dans le panier à salade, que la maman pourra voir et, accessoirement, récupérer sa fille.
Le mois dernier, c'est un collégien de 15 ans qui testait, bien malgré lui, l'électrifiant taser. Le taser est ce pistolet qui balance du jus en lieu et place des pruneaux. Sur le site de Taser, la bête est présentée comme « l'arme antibavure par excellence », « l'arme qui sauve des vies », et ce même si le patron de taser reconnaît, entre deux élans panégyriques, que l'arme présente un risque cardiaque « minime ». Lors d'une démonstration de l'engin faite devant des collégiens, un gendarme a malencontreusement déchargé son taser sur l'un des jeunes. L'histoire, qui s'est déroulée en Côte d'or, patrie du Romanée-Conti, ne dit pas si la démonstration était organisée avant ou après l'apéro.
Qu'il semble loin le temps où un Pierre Desproges s'attaquait, brillant et fielleux, à la jeunesse, cette « frange la plus totalement parasitaire de la population, (qui) bénéficie sous nos climats d'une dévotion frileuse qui confine à la bigoterie ».
Jeudi soir, les députés ont voté une disposition permettant aux préfets d'instaurer un couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans entre 23h et 6h.
Ce que l'histoire ne dit pas, ici, c'est si ce couvre-feu vise à protéger les jeunes de la société ou la société des jeunes.
J'avais vingt ans, écrit Paul Nizan, avant d'ajouter : « Je ne laisserai personne dire que c'est le plus bel âge de la vie. » En France, ces derniers temps, c'est dès 6 ans que le jeune commence à en prendre pour son grade.En mai dernier, deux cousins de 6 et 10 ans étaient cueillis par la maréchaussée à la sortie...
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