Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Le billet

Dr Folamour et le péril vieux

Mercredi, 19 heures, heure locale. Le ministère sud-coréen de la Santé plonge dans le noir. Black-out à tous les étages. Passé le premier instant de perplexité, les employés se souviennent qu'on les avait informés qu'à 19 heures pétantes, en ce troisième mercredi du mois, la fée électricité allait se tirer. Et qu'ils seraient bien avisés, eux les employés, de faire de même. La coupure est organisée, concertée, avec un objectif bien déterminé. Objectif dont on aurait instinctivement pensé qu'il tenait, en ces temps de cataclysme climatique annoncé, en une économie d'énergie. Que nenni et bien au contraire.
De l'énergie, les cerveaux ayant pondu l'opération black-out au ministère espèrent bien que les employés vont en dépenser. De préférence à l'horizontale, en duo et sur le mode hétéro. Selon les calculs et prévisions des cerveaux, les adeptes des heures sup, renvoyés tôt chez eux, n'auront qu'une idée une fois retrouvée la chaleur de leur foyer : procréer.
L'affaire est de la plus haute importance car en la matière, l'employé type du ministère de la Santé déçoit. Voire pire. Affichant un taux de natalité de 1,63 enfant contre 1,82 pour la moyenne nationale des fonctionnaires, l'employé du ministère de la Santé flirte avec la trahison. Trahison, le mot est aussi approprié que l'heure est grave. Avec un taux de natalité de 1,19 en 2008, il y a péril vieux en la demeure sud-coréenne. Seul moyen pour éviter de se retrouver avec une nation de sucreurs de fraise, lever une armée de mouflets.
Mais face à un objectif affiché d'un taux de natalité de deux enfants avant deux ans, force est de constater que l'opération black-out au ministère pèche par manque d'ambition. En effet, comment garantir qu'une fois chez lui, l'employé ne va pas s'affaler devant sa télé, la télécommande dans une main, une bière, au lieu de son conjoint, dans l'autre ?
Pour booster la natalité, c'est sur un black-out généralisé qu'il faut miser. On en veut pour preuve l'exemple néerlandais. En septembre 2008, les fonctionnaires municipaux de Maasdriel, dans l'est des Pays-Bas, notaient avec stupéfaction une augmentation de 44 % des naissances par rapport au même mois de l'année 2007. Après examen minutieux des données, les autorités locales se souvinrent des 50 heures de coupure d'électricité dont avait été victime la commune... neuf mois plus tôt.
À quelques milliers de kilomètres de Séoul, la natalité est aussi un souci. Depuis 1993, la population russe a perdu 5,8 millions d'habitants. Si cette année, exceptionnellement, la Russie a gagné quelques milliers de citoyens, ce n'est pas en raison d'une hausse de la natalité, mais plutôt d'une légère baisse de la mortalité.
Dans ces conditions, encourager la procréation relève de la survie de la nation. C'est donc sans surprise qu'un ultranationaliste, Vladimir Jirinovski, a pris le sujet à bras-le-corps. Chef du bien mal nommé Parti libéral-démocrate, Jirinovski, politicien aux tendances xénophobes, antisémites, expansionnistes et nucléaires, a proposé, pour lutter contre le vieillissement de la Mère Russie, d'instaurer une prime à la première naissance ainsi que la polygamie. Des propositions jugées « très intéressantes » par Dmitri Medvedev. Aux dernières nouvelles, la Première Dame préparait ses valises.
Pendant ce temps, à l'Ouest, on cherche un moyen de foutre les bamboccioni, les « gros bébés », à la porte. Les bamboccioni sont des « Tanguy », du nom de ce film français narrant l'histoire d'un jeune homme d'une trentaine d'années, surdiplômé et bien rémunéré, refusant néanmoins, et au grand dam de ses parents, de quitter le cocon familial. En Italie, un artisan vient de se voir contraint par la justice non seulement de se coltiner sa « Tanguette » de 32 ans, mais aussi de lui allouer une pension alimentaire jusqu'à ce qu'elle soit « autosuffisante ». La demoiselle se verra donc verser par celui qui fut un jour son heureux papa, mais qui se verrait bien virer père fouettard, une allocation mensuelle de 350 euros assortie d'arriérés pour un montant de 12 000 euros. La miss, étudiante, se faisant déjà 600 euros en donnant des cours de danse, la vita est plutôt bella. Ce jugement, s'il est resté en travers de la gorge du père, a également hérissé le poil du ministre de la Fonction publique, Renato Brunetta, qui, dans un élan aussi bouillonnant que dénué d'effets, a appelé à promulguer une loi imposant l'expulsion des jeunes Italiens du domicile familial à leur 18e anniversaire. Tu souffles les bougies, tu prends ta part de gâteau et la porte.
Pour peu qu'ils se mettent au coréen ou au russe, parions que ces jeunes Italiens ne resteront pas longtemps à la rue.
Mercredi, 19 heures, heure locale. Le ministère sud-coréen de la Santé plonge dans le noir. Black-out à tous les étages. Passé le premier instant de perplexité, les employés se souviennent qu'on les avait informés qu'à 19 heures pétantes, en ce troisième mercredi du mois, la fée électricité...
commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut