Qu'est-ce que la dérision? Dans son ouvrage, Khoury définit l'autodérision comme une autodéfense. Comme un bouclier contre les avatars du monde, la plume de l'auteur colorie avec tendresse la grisaille d'un siècle en tourmente. Évoquant le Liban, les actualités ou des domaines plus généraux, le lexique qui pullule de mots et d'images est un alphabet illustré encore une fois par Piem, les définitions, quoique brèves, survolent la carte du tendre, les milieux politiques et même les sujets graves, comme la mort ou les conflits planétaires. Ainsi, si le croque-mort serait pour Khoury «un guide souterrain», l'incinérateur «un enfer payant» et l'incinéré quelqu'un qui «se retourne dans son bocal», la guerre d'Irak serait un «Butsch manqué», les élections tiers-mondistes des «boîtes magiques à remplir», le diplomate un maquilleur de mots, le discours électoral «un gazouillis bissextile» et Bush «un dégusteur de godasses».
Impertinent et caustique, Ghassan Khoury n'y va pas de main morte. Dans sa cour de re-création, tel un enfant enjoué, il s'amuse avec ses mots à moquer la société. Le chéquier de l'épouse est selon lui «un compte courant d'air» et le chirurgien plastique «un restaurateur d'icônes» ou «un confectionneur de masques».
Le Troisième abécédaire de la dérision est un rendez-vous incontournable avec le sourire, un régal linguistique qui dévoile à la fois un caractère humoristique et un esprit épris des acrobaties sémantiques et du mot juste.
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