Les « Désirs, rêves et cauchemars » de cinq artistes au Running Horse

Évocateur d'ambiances intimistes, voire d'univers intimes, l'intitulé «Désirs, rêves et cauchemars» n'est pas évident au premier coup d'œil. Et pourtant, en y regardant de plus près, c'est bien le langage personnel, l'univers intérieur de chacun des artistes exposés qui sont donnés à voir dans cet accrochage qui court jusqu'au 10 janvier 2010 à la galerie The Running Horse.
Cinq artistes, cinq styles différents, avec des médiums, des palettes, des expressions particulières à chacun pour formuler picturalement des préoccupations personnelles qui vont de la complexité des sentiments - amoureux ou familiaux - à un ésotérisme sans complexe.
C'est un dessin aussi ténu que méticuleux que trace, au fil de son feutre noir fin, Carlo Keshishian. L'artiste britannique d'origine arménienne compose, de toiles en toiles, une sorte de mandala personnel relatif à son moi intérieur ainsi qu'à sa conception de l'enchevêtrement des liens familiaux. Deux pièces, l'une de petite dimension, en forme de rondelle de tronc coupé, et l'autre, de très grand format, constituée de six toiles juxtaposées (il a d'ailleurs mis six ans à la réaliser), délivrent une même impression de patient travail de
miniaturiste moderne.

« Strongman »
Son travail est à l'exact opposé de celui de son compatriote précité. Exubérant et iconoclaste, le peintre britannique Aaron Johnson s'est amusé à élaborer, sur une bâche en plastic transparent, par couches superposées à l'envers, le portrait non conventionnel de son Strongman. Cette figure à mi-chemin entre les divinités hindouistes et chinoises, l'humain et l'animal, est ainsi composée d'un assemblage, coloré et excentrique, de motifs imprimés pop géométriques et d'autres organiques. Le tout placé sur un quadrillage de fil de construction. Un Strongman censé représenter le fantasme ou le cauchemar de l'homme actuel confronté aux codes du monde
contemporain.

Expressionnisme abstrait
Plus intimistes que d'autres, les œuvres expressionnistes abstraites, à l'acrylique sur toile, de Sigrid Glöerfelt et de Nathalie Labaki évoquent, l'une, sa vision tourmentée, sombre et noire, relevée de pointes de bleu lumineux de l'Au-delà, et l'autre, en noir et blanc, les figures fantasques du Tabseer que créé spontanément son geste pictural inscrit sur la toile à la manière d'un hasard divinatoire.
En introduisant sa caméra dans des usines désaffectées, la photographe Clara Gebran a voulu capturer, dans ses photographies surdimensionnées, l'intimité fluctuante des espaces réputés les plus froids. En fonction de la lumière, de la présence humaine et en particulier féminine, une pièce vacante, où prédominent le métal et une impression cauchemardesque d'abandon, devient un lieu vibrant de vie comme un rêve familier.
Du rêve au désir, la différence est parfois aussi vaporeuse qu'un voile de gaze. Un voile que lève, pudiquement, en dépit des lignes fortes et des courbes soulignées de son travail, Katia Traboulsi sur les ébats de couples dans deux toiles monochromatiques, l'une rouge, l'autre jaune. La première intitulée Avant l'amour et la seconde Pendant l'amour montrent, au moyen du tracé noir très graphique sur couleurs primaires des deux silhouettes imbriquées, la fusion d'un duo dans un rêve commun.

* La Quarantaine, Medawar, près dépôt Sleep Comfort. Horaires d'ouverture : du lundi au vendredi, de 11h00 à 19h00, et les samedis, de 14h00 à 19h00. Tél. : 03/710225.