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Lifestyle - Hotte d'or

Noisette-chocolat

Je ne m'endors que tard ; tout le monde connaît mes insomnies, ces heures interminables que je passe à compter les bouteilles de Veuve Clicquot pour essayer de trouver un peu de sommeil. Tout le monde déploie des trésors d'énergie à essayer de me convaincre de m'abonner au Stilnox ou au Xanax ou à l'hypnose ou aux barils de camomille, mais non, quoique je fasse, je ne dors pas. Hier, je me suis réveillée en plein dans ma nuit, il était quelque chose comme cinq heures trente-cinq du matin, j'étais en plein sommeil paradoxal, heureuse dans un rêve au creux duquel Jude Law me disait que pour arriver à embrasser ses partenaires de cinéma, il fermait un peu les yeux en pensant à moi. Je me suis réveillée donc avec un sourire, certes, mais toute énervée de m'être réveillée. L'affreux Houssam ronflait comme une turbine depuis qu'il a décrété que me faire l'amour ressemblait désormais à un match retour PSG-OM. C'est-à-dire à une guerre de tranchée - ce sot commence sérieusement à me fatiguer et n'étaient-ce ses si jeunes biceps d'à peine vingt ans qu'on aurait dit dessinés par Léonard de Vinci en personne, je crois que je l'aurais viré depuis très belle lurette. Il ronflait, j'aurais pu le dépecer sur place à la scie à chevreuil qu'il n'aurait pas bronché d'un cil. Et je fais quoi, moi ? Je fais quoi, moi, debout comme une sotte, après m'être retournée 68 907 fois comme autant de crêpes au citron, et toute la ville qui dort ? Je me glisse dans mon jardin d'hiver, juste habillée d'un tee-shirt Sonia Rykiel et de mes trois gouttes de Guerlain, j'allume ma nouvelle télévision Bang & Olufsen chromée bleu pétrole et je zappe comme une adolescente névrosée, mon œil comme un scalpel, rien ne réussit à me renvoyer chez ce despote de Morphée, ni la thématique du vent sur Arte, ni le remake porno d'Autant en emporte le vent, ni Dexter sur Télétoons, ni les mœurs chasseresses du puma dans le désert. Rien. Je feuillette en diagonale le dernier Beigbeder laissé chez moi par une de mes trop indulgentes amies. Tellement mauvais que je me sens la force d'aller faire trois fois le tronçon Jnah-Aïn el-Mreissé en jogging. Je vais devenir folle. Je pense aller tirer Louisa du lit, ma gentille et très malgache technicienne de surface, l'obliger à faire un scrabble avec moi. J'ai des scrupules. Depuis que le sympathique Boutros Harb est ministre du Travail, je tourne sept fois ma langue dans ma bouche avant que de m'adresser à mon personnel, j'ai peur que le cheikh de Batroun ne m'arrête pour esclavagisme. Je rentre nonobstant dans ma cuisine, un lieu étrange dans lequel je n'ai dû pénétrer, et par erreur, que trois fois depuis que j'ai emménagé dans ce loft. J'ouvre grand tous les placards, ébahie par tout ce que je possède. Je tombe sur un pot de Nutella. Je ne comprends pas ce qu'il fait là. Je le prends et arrache une cuillère sur le portant au passage. Comme Sigourney Weaver dans Alien, je boitille vers le canapé en m'assurant au passage que personne ne me voit, et je m'y allonge, le pot sur mon ventre, une baroque image de cette créature de métal et d'acide rêvée d'abord par Ridley Scott. J'ouvre le pot et je mange. Comme une gueuse. À même la cuiller. J'aime. Je m'endors. Miam-miam.
Je ne m'endors que tard ; tout le monde connaît mes insomnies, ces heures interminables que je passe à compter les bouteilles de Veuve Clicquot pour essayer de trouver un peu de sommeil. Tout le monde déploie des trésors d'énergie à essayer de me convaincre de m'abonner au Stilnox ou au Xanax ou à l'hypnose ou aux barils de...

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