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Culture - Rencontre

Échos d’un temps perdu

Le pianiste compositeur Malek Jandali signe un premier opus intitulé « Echos from Ugarit » inspiré des fameuses tablettes de Ras Shamra, la plus ancienne notation musicale connue.
Il est de coutume de dire d'un pianiste qu'il est impétueux. Ou bien, lorsqu'il est multitalentueux, de préciser qu'il possède plusieurs cordes à son clavier. Chez Malek Jandali, ce qui frappe d'emblée l'interlocuteur, c'est la détermination. Et même l'entêtement. Des qualités qui caractérisent son discours et qu'il applique consciencieusement à sa carrière débutante.
Le musicien se raconte, dévoile des pans de son enfance à Alep, puis ses cours au Conservatoire de Damas et, enfin, la bourse qui l'a emmené aux États-Unis où il réside depuis 17 ans. Au fil de la conversation, l'on parvient à la conclusion que si ce jeune homme habité par la musique est arrivé là où il est à présent, c'est surtout à cause de son cran.
Jandali a été très tôt passionné par son instrument. Né en Allemagne, où il a grandi jusqu'à l'âge de six ans, il dit avoir été initié dès la maternelle aux subtilités de la musique. Son père, qui rêvait de jouer de la guitare, l'a beaucoup encouragé à développer sa fibre musicale. De retour à Homs, le petit Malek a donc eu droit à des cours privés de piano. Puis, lorsqu'il a eu 8 ans, sa mère l'emmenait une fois par semaine au Conservatoire de Damas pour faire ses gammes. « Ces trajets hebdomadaires étaient pour moi un véritable bol d'oxygène », se souvient le musicien, qui a suivi ce régime musical jusqu'à l'obtention de son bac. Au Conservatoire de musique et à l'Institut supérieur de musique de Damas, ses professeurs étaient Vladimir Zaritski et Victor Bunin, du Conservatoire Tchaïkovski de Moscou.
Titulaire du premier prix d'une compétition pour jeunes artistes en Syrie, il obtient en 1995 une bourse complète d'études pour le North Carolina School of the Arts où il suit des études de musique avec Eric Larsen. Jandali a également obtenu un BA en musique de la Queens University. Durant sa scolarité, il a reçu de nombreux prix, dont le Outstanding Musical Performer Award en 1997, le Stegner Foundation of the Art et le Carolyn G. McMahon Scholarship. En 2004, il décroche également un master en business administration de l'Université de North Carolina.
Après un parcours musical en tant que soliste, il décide de se consacrer à la composition. « La musique moyen-orientale me fascinait. Et, plus particulièrement, la musique antique syrienne », dit-il. Jandali commence alors à expérimenter, à intégrer des modes du maqam aux harmonies occidentales. Allant plus loin dans ses recherches, il puise son inspiration dans ses racines, creusant dans le sous-sol de son pays natal. À Ougarit, 3 400 ans avant J-C. C'est ainsi qu'est né la composition Echoes from Ugarit, titre éponyme de son premier opus.
Un parcours à travers cet album ressemble à un voyage dans l'espace et le temps. Le CD s'ouvre sur Andalous, une rhapsodie aux saveurs proche-orientales et espagnoles. Sulaima est inspirée d'un ancien poème d'amour syrien. La mélodie est simple, concise, éthérée.
Piano Dream est la pièce « mécanique » de l'album. « Elle pourrait nous rappeler une toccata de Bach, avec ses chromatismes rouges sang et ses ornementations baroques. J'ai imaginé un marchant vénitien, au XVIe siècle, se promenant dans les souks de Damas.
Leil est une traversée nocturne. « Yafa  traduit le sentiment profondément humain du désir de rentrer chez soi. Ce morceau parle également de perte. Sa rythmique oscille entre la peur et la colère. »
Le morceau star de l'album, Echoes from Ugarit, est donc inspiré des tablettes cunéiformes retrouvées à Ras Shamra (Ugarit) en 1929. « Sur une de ces tablettes, on a retrouvé la plus ancienne notation musicale. Un hymne à la femme du dieu de la Lune, Nikkal. Les inscriptions contenaient les paroles et des notations d'une chanson sur un même maqam. Elles étaient accompagnées d'instructions au chanteur et aux musiciens, notamment comment accorder la harpe phénicienne. »
En arrangeant cet hymne en mélodie pianistique, Malek Jandali a tenté d'en préserver la structure rythmique.
« La chanson est une lamentation, une plainte faite par une femme infertile s'adressant à la déesse Nikkal », ajoute encore le pianiste qui vise là à construire un pont musical à travers les âges et les cultures.
Il est de coutume de dire d'un pianiste qu'il est impétueux. Ou bien, lorsqu'il est multitalentueux, de préciser qu'il possède plusieurs cordes à son clavier. Chez Malek Jandali, ce qui frappe d'emblée l'interlocuteur, c'est la détermination. Et même l'entêtement. Des qualités qui caractérisent son discours et qu'il...

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