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Législatives : juin 2009 - Pour aller plus loin

Ahmadinejad a bien raison

Le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, vient de s'inviter dans la campagne électorale libanaise en se prononçant sans ambages en faveur d'une victoire de l'opposition. Celle-ci « renforcerait la " résistance " par la constitution de nouveaux fronts et modifierait ainsi l'équilibre dans la région », a-t-il déclaré lundi à la presse à Téhéran, laissant clairement entendre que cette modification irait dans le sens que le souhaite la République islamique.

L'importance de ces propos ne réside pas tant dans le fait qu'il s'agit d'une nouvelle expression de l'ingérence iranienne dans les affaires libanaises. D'ailleurs, les partisans libanais de cette ingérence sont en mesure de rétorquer que la rencontre vendredi dernier du vice-président américain, Joseph Biden, avec les piliers du 14 Mars constitue elle aussi une intervention dans le processus électoral au Liban.
Encore qu'à la grande différence du président iranien, M. Biden ne s'était pas prononcé expressément pour la victoire d'un camp spécifique, se contentant uniquement de lier la poursuite de l'aide américaine au Liban à la politique qu'adoptera le prochain gouvernement libanais, c'est-à-dire celui qui sera issu des législatives.
À ce propos, il serait peut-être utile de préciser que l'aide des États-Unis au Liban, tant du point de vue des canaux qu'elle suit que de l'identité de ses bénéficiaires, est destinée à l'État libanais, à ses institutions - parmi lesquelles l'armée - ou à des projets intéressant la société civile libanaise dans son ensemble. À titre comparatif, dire que l'assistance iranienne emprunte des canaux peu transparents et qu'elle ne bénéficie qu'à une fraction de la population relève de l'euphémisme.
Mais passons. Car, bien au-delà de l'ingérence ponctuelle, ce qui compte véritablement dans les déclarations de M. Ahmadinejad, c'est qu'il a parfaitement raison : une victoire de l'opposition signifierait d'abord et avant tout un pas supplémentaire sur le chemin de la réalisation des objectifs stratégiques du nouvel empire perse dans la région, lesquels n'ont que faire des vulgaires considérations souverainistes libanaises.
Assailli de toutes parts par les campagnes au ras du sol des candidats de villages et de quartiers, l'électeur libanais de base a déjà du mal à percevoir clairement les enjeux nationaux du scrutin. Qu'en serait-il alors des enjeux internationaux ?
Aujourd'hui, l'un des thèmes qui alimentent le plus les discussions et les pugilats des électeurs oppose ceux qui brandissent triomphalement la baisse des tarifs du téléphone portable à ceux qui contestent la réalité de cette baisse du fait des coupures de ligne entraînant des appels répétés.
Pourtant, au matin du 8 juin (ou du 9 si les résultats s'annoncent trop serrés), la presse mondiale ne se préoccupera certainement pas de savoir qui, des partisans de Gebran Bassil (et de son mentor) ou de ses contempteurs, a eu raison de l'autre. De Téhéran à New York et Washington, en passant par Tel-Aviv, Riyad, Le Caire, Paris, Londres, Rome, Berlin et Madrid, tous les journaux de la planète feront comme M. Ahmadinejad et auront à peu près le même titre en une : ce sera « Le Hezbollah vainqueur » ou « Le Hezbollah battu ». Pour ce qui est des journaux syriens, dans la mesure où ils sont un peu plus familiers que les autres des petites subtilités libanaises (et pour cause !), ils feront dans tous les cas en sorte de ne pas « fâcher » leurs autres alliés.
L'électeur libanais, en particulier dans les régions chrétiennes - puisque c'est là que se déroule l'essentiel des batailles -, peut juger réductrice une telle vision des choses de la part de la presse mondiale et croire sincèrement pouvoir voter pour tel ou tel candidat de l'opposition, notamment du CPL, sans que l'on considère nécessairement que son suffrage est allé au Hezbollah.
Il n'empêche qu'au final, ce qui compte, ce n'est pas la justesse et la précision de ce qu'écrivent les journaux étrangers au sujet du Liban, c'est la perception qu'ils se font des événements dans ce pays.
Et ce qui vaut pour la presse vaut bien davantage pour les gouvernements. Que l'opinion publique arabe et mondiale perçoive une éventuelle victoire de l'opposition comme étant d'abord celle du Hezbollah entraînerait déjà d'énormes conséquences sur le plan des relations internationales du Liban, de son économie, de son tourisme, etc. On se doute bien de ce qu'il en serait lorsque des gouvernements fonderaient leur politique à l'égard du Liban sur la même perception.
Michel Aoun n'est pas Hassan Nasrallah et ne peut pas l'être, même si le chemin parcouru depuis le fameux document d'entente de février 2006 se résume à un inexorable glissement du premier dans le sillage du second.
Il se trouve cependant que les décideurs internationaux, autant que les investisseurs, les touristes et les simples curieux ne connaissent pas Michel Aoun et s'intéressent assez peu à sa IIIe République et encore moins aux tarifs du cellulaire au Liban.
Hassan Nasrallah, en revanche, tout le monde le connaît, lui...
L'importance de ces propos ne réside pas tant dans le fait qu'il s'agit d'une nouvelle expression de l'ingérence iranienne dans les affaires libanaises. D'ailleurs, les partisans libanais de cette ingérence sont en mesure de rétorquer que la rencontre vendredi dernier du vice-président américain, Joseph Biden, avec les piliers du 14 Mars constitue elle...