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Culture - Théâtre

Plisson voyage : destination Schéhadé

À l'Espace Tournesol, Alain Plisson fait voyager son public dans l'univers, plein de fantaisie et d'humour, de Georges Schéhadé*.
Il a incontestablement le goût du verbe, Alain Plisson, une indéniable inclination pour les textes d'auteurs. Après avoir mis en scène, entre autres œuvres du grand répertoire, des pièces d'Hugo, d'Anouilh ou d'Eric-Emmanuel Schmitt (L'évangile selon Pilate, il y a deux ans), le voilà qui revient vers Georges Schéhadé dont il avait adapté, il y a une dizaine d'années, L'émigré de Brisbane. Cette fois, c'est avec Le Voyage qu'il fait (re)découvrir à son public la prose pétillante, élégante, pleine d'humour et de fantaisie de notre plus grand poète et dramaturge francophone à ce jour.
Car c'est véritablement à un « théâtre de poésie » (comme le qualifiait Schéhadé lui-même) que Plisson convie les spectateurs de ce Voyage. Une pièce qui avait été créée à Paris en 1961 par Jean-Louis Barrault - excusez du peu ! - et dont l'intrigue s'épanouit dans la confrontation entre le réel et l'imaginaire, ainsi que la fraîche poésie d'un verbe à l'élégante dérision.

La trame
Le rideau se lève sur le décor (fonctionnel et soigné, avec ses panneaux mobiles qui, d'un recto verso, induisent un total changement d'atmosphère et de lieux, signé Louis Ingea) d'un comptoir de mercerie. Nous sommes en 1850 à Bristol, une ville portuaire d'Angleterre, et dans cette boutique, appartenant à Monsieur Strawberry (très convaincant Robert Arab en honorable marchand affublé des manies et surtout de la philosophie typique des commerçants !), le jeune commis Christopher (Jean-Louis Ghazi) rêve de mer, de vent, de navires et d'océans sous le regard énamouré de Miss Georgia, sa collègue... Cet appel du large et du vent, ce voyage pour lequel le jeune homme économise patiemment, va se concrétiser d'une drôle de manière grâce à sa rencontre, dans une taverne, avec un officier de la marine (Yann Marincamp dans un rôle de quartier-maître) revenu du Brésil, qui lui offre sa veste et sa casquette. Sans le savoir, Christopher va endosser l'identité d'un autre, celle d'un assassin, et se retrouver entraîné dans une aventure inattendue, au terme de laquelle il découvrira que tout voyage est intérieur !
Autour de ces personnages (symbolisant les figures de l'autorité, de l'insurgé et du rêveur ingénu) gravitent, au fil des tableaux, dont certains en séquences flash-back, une douzaine de comédiens. Une distribution importante en nombre et plus encore en nombre de personnages, certains comédiens comme Jean-Pierre Toutounji, Rima Hajji Thomas, Robert Arab et Alain Plisson endossant chacun plus d'un rôle.
Ce n'est pas évident de camper les personnages aériens de Schéhadé, c'est-à-dire des figures pittoresques et pleines d'humour, toutes en fraîcheur, finesse et spontanéité d'esprit. Cela nécessite un jeu à l'équilibre subtil, une interprétation qui requiert à certains moments un zeste de burlesque, mais sans trop. Alain Plisson dit avoir volontairement recherché la caricature dans certains personnages, tels l'irascible « amiral en robe de chambre» (joué par Joe Toutounji) et ses deux sbires (Jacques Mokhbat et Christophe Troucat) « pour souligner encore davantage l'humour de Schéhadé, que d'aucuns au Liban méconnaissent ».
Pour ces comédiens amateurs, comme pour le metteur en scène, retransmettre ce mélange d'humour, de tendresse, de poésie et de suspense, qui fait le charme de cette pièce, n'est donc pas chose aisée. Il faut reconnaître qu'ils s'en sortent plutôt bien, avec un jeu égal dans son ensemble et une mise en scène simple et astucieuse. Cela donne une agréable représentation de soixante-quinze minutes. Un divertissement qui, à l'appel du rêve, mêle aussi l'appel du cœur, puisque les recettes seront entièrement reversées à plus d'une association caritative !

* À l'Espace Tournesol, rond-point Tayouneh, jusqu'au 10 mai, tous les soirs à 20h30, relâche le lundi. Tél. : 01/381290.
Il a incontestablement le goût du verbe, Alain Plisson, une indéniable inclination pour les textes d'auteurs. Après avoir mis en scène, entre autres œuvres du grand répertoire, des pièces d'Hugo, d'Anouilh ou d'Eric-Emmanuel Schmitt (L'évangile selon Pilate, il y a deux ans), le voilà qui revient vers Georges...

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