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Culture - Festival Bipod

Curieux volatile que ce cygne noir

Quatre danseurs, avec la parité femme-homme équitablement répartie par les couleurs, tracent en douceur la topographie du corps humain sous la férule du chorégraphe suisse Gilles Jobin, au Madina. Bien curieux ce volatile cygne noir qu'on ne voit jamais, comme la cantatrice chauve chez Ionesco...
Les cygnes, vraisemblablement, inspirent généreusement les chorégraphes. Déjà la semaine dernière, Radhouane el-Meddeb a évoqué bien cavalièrement l'illustre musique de Tchaïkovsky pour un lac hanté, mais a préféré la sensualité des « couleuses » de nombril (tout dondon qu'il est avec sa corpulence de Dame de Copi) sur un air d'Oum Kalsoum avec des pas de « mousmé » fascinée par les pingouins...
Aujourd'hui, le Cygne noir revient sur scène (du moins en titre) avec cette représentation où pourtant l'on chercherait en vain l'image de l'Odile des eaux lisses et froides...
Sans décor, avec un éclairage bien sobre pour tout accessoire, les danseurs évoluent sous les feux de la rampe dans une ronde mettant prestement en valeur l'agilité, la souplesse, la tonicité, l'énergie, mais aussi la douceur, la tendresse, la sensualité, la surprenante imprévisibilité du corps.
Mouvements gracieux ou abrupts, ronds ou carrés, ondoyants ou linéaires, ces figures (géométriques ?) dans l'espace semblent parfois emprunter leurs circonvolutions à Merce Cunninghmam pour dessiner les innombrables élans du corps. Élans indomptables, maîtrisés, irrépressibles, imprévisibles... Des corps qui bruissent avec une éloquence qui a souvent l'allure d'un discours, où les craintes et les éblouissements de l'enfance sont au bout du parcours.
Sur une bande-son omniprésente (signée Cristian Vogel), alternant bruitage, rythmes, borborygmes, chuintement de fines gouttelettes, frottements indistincts telle une redoutable reptation, bips sonores, éclat d'un « crush » ou halètement et soufflerie de machines, les danseurs explorent l'espace pour des jeux où l'enfance semble la principale des préoccupations.
Sans vouloir illustrer une idée précise ou raconter une histoire, dans une déstabilisation permanente, les quatre danseurs offrent des images fugaces, insaisissables...
Images incantatoires, roulades provocantes, lenteur délibérée, ou célérité accentuée pour des corps qui s'aimantent, se rejettent, fusionnent, se scindent, se retrouvent, s'échappent, se retirent, reviennent...
Amusants et coquins sans nul doute ces gants à tête de lapins qui gambadent sur le plancher dans la pénombre. Plus mystérieux sont ces poneys nains en peluche qui envahissent la scène, tirés par de grandes perches noires, comme ces tiges qui font bouger les inquiétantes poupées de Bali...
Expérimental, exploratoire, volatil (le geste est effacé, à peine tracé), affranchi des cadres esthétiques préétablis, ce spectacle est de toute évidence touché par une certaine grâce. Et, bien entendu, par une certaine originalité aux confins de la provocation.
Pour la grâce, il s'agit ici de celle de l'enfance qui, loin des apparences et des perceptions convenues, pose toujours un regard délicieusement neuf et ludique. Quoiqu'en dise Cocteau, aimer c'est aussi
découvrir...
Les cygnes, vraisemblablement, inspirent généreusement les chorégraphes. Déjà la semaine dernière, Radhouane el-Meddeb a évoqué bien cavalièrement l'illustre musique de Tchaïkovsky pour un lac hanté, mais a préféré la sensualité des « couleuses » de nombril (tout...

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