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Santé - Interview

« Monsieur sida » veut faire de la pandémie « une opportunité »

Le nouveau directeur de l'Onusida, Michel Sidibé, appelle à « redéfinir le caractère exceptionnel de l'épidémie » du sida et d'en faire une « opportunité politique pour provoquer des changements profonds dans la société ».
Le sida a déjà tué 25 millions de personnes depuis le début de la pandémie dans les années 80. Mais il peut aussi constituer une formidable « opportunité » pour changer la société, assure le nouveau « Monsieur sida » de l'Organisation des Nations unies (ONU), le Malien Michel Sidibé, premier Africain à occuper ce poste.
« Il ne faut pas considérer l'épidémie (seulement) comme un problème, comme on l'a toujours fait jusqu'à maintenant », indique-t-il dans un entretien à l'AFP, en marge d'une visite qu'il a effectuée il y a quelques jours au Sénégal, plus de trois mois après son arrivée à la tête de l'Onusida, le programme des Nations unies sur le VIH/sida.
« Il faut redéfinir le caractère exceptionnel de l'épidémie, non plus par rapport aux chiffres, mais essayer de démontrer que cette épidémie peut être une opportunité », poursuit le successeur du Belge Peter Piot, qui a dirigé l'Onusida depuis sa création en 1995.
«Une opportunité politique pour provoquer des changements profonds dans la société, pour parler des questions difficiles, comme l'éducation sexuelle, les questions de l'homophobie et, en général, des droits humains, comme la place de la femme dans la société », ajoute M. Sidibé. Il estime que le sida peut constituer « un "point d'entrée" pour discuter de ces questions et faire en sorte que les lois changent ».
De plus, « les ressources » financières dont dispose la lutte antisida doivent « produire des résultats pour l'ensemble des autres secteurs et renforcer la capacité des systèmes de santé », notamment en Afrique, continent le plus pauvre du monde.
« Sur les 25 milliards (de dollars) demandés au monde pour financer l'accès universel (aux traitements), il y a 9 milliards qui doivent aller à la revitalisation des systèmes de santé », souligne M. Sidibé.
« C'est une opportunité, à condition qu'on ne l'enferme pas, qu'on ne l'isole pas comme on l'a fait au cours des vingt dernières années dans une dynamique du nombre, dans une dynamique purement "sida" », insiste-t-il. Et de poursuivre : « Cela peut être un moyen de transformer, de reconstruire la société autour des demandes sociales des populations. »
« Je vois l'Onusida comme un agent politique qui doit demander le changement, signale M. Sidibé. Je ne vois pas l'Onusida comme l'Unicef (Fonds des Nations unies pour l'enfance) ou l'OMS (Organisation mondiale de la santé) avec des programmes bien précis (...). L'Onusida doit être la voix des sans-voix, doit avoir un courage politique. » L'organisation a ainsi critiqué les récents propos du pape sur le préservatif.
M. Sidibé a également évoqué, lors d'une rencontre avec le président sénégalais Abdoulaye Wade, le dossier de neuf hommes condamnés à Dakar à huit ans de prison pour homosexualité.
«L'accès universel aux soins, aux traitements et à la prévention est ma priorité numéro un » et « l'argent est indispensable, il faut continuer à mobiliser les ressources, faire en sorte qu'on redouble d'efforts pour que le Fonds mondial soit totalement financé ». « Il n'y a aucun doute pour cela », affirme-t-il.
Le Fonds mondial de lutte contre le sida, les tuberculoses et le paludisme, créé en 2002, cherche encore 4 milliards de dollars pour la période 2008-2010. Mais plutôt que de lancer un énième appel de fonds, au risque de lasser les bailleurs de fonds en pleine crise économique mondiale, le chef de l'Onusida réfléchit aux moyens de « rendre le partenariat optimal ». « Il faut faire en sorte qu'on puisse demander de la performance, avec une obligation de rendre compte, une obligation de résultats » dans la lutte contre la pandémie, déclare-t-il.

Christophe PARAYRE
AFP
Le sida a déjà tué 25 millions de personnes depuis le début de la pandémie dans les années 80. Mais il peut aussi constituer une formidable « opportunité » pour changer la société, assure le nouveau « Monsieur sida » de l'Organisation des Nations unies (ONU), le Malien Michel...

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