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Liban

Les « Mémoires » du patriarche, une chronique indispensable pour écrire notre histoire

Antoine Saad présentait jeudi soir, salle Montaigne, le tome premier de sa biographie du patriarche Sfeir, couvrant les années 1986-1992, à l'invitation de l'Institut français du Proche-Orient (IFPO). Entouré de Frank Mermier, directeur scientifique des études contemporaines de l'IFPO, et de Melhem Chaoul, professeur de sociologie à l'Université libanaise, il a exposé son ouvrage.
Présentant M. Saad, Frank Mermier a explicité les raisons de l'intérêt porté par l'IFPO à ce type de chroniques : « Le travail d'historien (de M. Saad) trace avec constance le sillon des chroniques mémorielles puisqu'il a publié, depuis 2002, plusieurs volumes de la biographie du patriarche Nasrallah Sfeir, qu'il vient de publier aux éditions an-Nahar, ainsi que les Mémoires de Fouad Boutros, sans compter le premier tome des Mémoires de l'abbé Boulos Naaman qui sera publié bientôt. »
Et M. Mermier d'ajouter : « L'Institut français du Proche-Orient, qui conduit des recherches sur les autobiographies, s'intéresse particulièrement à cette question. Je mentionne en passant que nous venons de publier en arabe une partie des Mémoires de Muhammad Kurd Ali, homme politique syrien, et celles du cheikh chiite libanais Ahmad Rida (ce dernier ouvrage en coédition avec Dar an-Nahar). On pourrait ainsi voir dans l'actuelle floraison éditoriale portant sur la publication d'archives mémorielles, dont de nombreux ouvrages autobiographiques de militants et de responsables politiques, un élargissement de l'espace public, conçu à la fois comme espace d'apparence et de communication. Au-delà de leur teneur informative, dont on n'a peut-être pas encore assez pris la mesure, ces textes invitent à revisiter les enjeux de l'écriture de l'histoire. »
« Mais l'ouvrage de M. Antoine Saad intéresse la recherche en sciences sociales sur le Liban du fait qu'il porte aussi sur deux questions essentielles sur lesquelles travaille actuellement l'IFPO, à savoir la mémoire de la " guerre civile " libanaise et les figures du leadership politique au Liban, a poursuivi M. Mermier. De fait, le patriarche, comme d'autres personnalités religieuses libanaises, joue un rôle politique de premier plan que l'ouvrage de M. Saad restitue bien pour la période considérée, celle comprise entre 1986 et 1992, une période cruciale dont on retrouve la plupart des acteurs aujourd'hui. Cette permanence du personnel politique, à un certain niveau de leadership, ne se retrouve pas forcément dans son positionnement politique, cette faculté d'adaptation expliquant peut-être sa longévité mais occultant aussi certaines logiques présidant aux stratégies politiques. »

Trois niveaux d'approche
De son côté, M. Waël Kheir analysait les trois niveaux d'approche possible de l'ouvrage : faits et événements tels que rapportés par le journal du patriarche, base de données indispensable à tout historien ; témoignages, ou encore perception subjective des événements, par opposition aux faits bruts ; enfin scénographies, cérémonials et protocoles des années de guerre, scènes descriptives saisies par le patriarche sur le vif.
Le sociologue souligne en particulier le style toujours « prudent et objectif » du patriarche, que l'auteur de la biographie cite abondamment, l'égale importance accordée aux enjeux locaux et régionaux, l'agencement du factuel et son évaluation.
Antoine Saad dira, pour sa part, que ces Mémoires ont été écrits pour deux raisons : la première, c'est « qu'il fallait dévoiler les promesses et les garanties qui avaient été données au patriarche pour qu'il ne s'oppose pas à l'accord de Taëf, mais qui ne furent pas tenues » (cf. la « trahison » des élections de 1992) ; et la seconde est « le souhait de faire l'autocritique du camp chrétien, tirer les leçons des événements et éviter la répétition des erreurs commises ». Il constate amèrement qu'en fin de compte, ceux qui ont cru que les « garanties » de Taëf avaient « des fondements réels et solides » étaient de grands naïfs et qu'il était tout aussi naïf de croire que les leaders et l'opinion publique chrétiens allaient apprendre quelque chose de leurs expériences, ou encore de leurs mésaventures.
M. Saad dira aussi que les traductions française et anglaise de son ouvrage se justifient par le souci de « rapprocher l'Occident de ce qui se passe chez nous », après un éloignement qui a favorisé « une approche purement pragmatique de la cause libanaise ».
Enfin, l'auteur de ces
Mémoires en soulignera la parfaite crédibilité, affirmant « qu'aucun fait relaté n'a été nié et qu'aucune accusation de subjectivité ou de partialité ne lui a été adressée ».
Antoine Saad présentait jeudi soir, salle Montaigne, le tome premier de sa biographie du patriarche Sfeir, couvrant les années 1986-1992, à l'invitation de l'Institut français du Proche-Orient (IFPO). Entouré de Frank Mermier, directeur scientifique des études contemporaines de l'IFPO, et de Melhem Chaoul, professeur de sociologie à...

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