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Actualités - OPINION

La vérité si je mens

La fièvre électorale emballe tout le pays, que cela soit durant les réunions de famille, de travail ou même autour d’une bonne tasse de café. En effet, il n’est de conversation qui ne finisse par virevolter autour de la politique. L’enjeu de telles élections, à en croire le vocabulaire morose pour ne pas dire macabre des médias et des politiciens de tout bord, doit y être pour quelque chose: «élections cruciales », « guerre fratricide dans le camp chrétien », « batailles rangées», «guerre ouverte»… En bref, les résultats des élections à venir décideraient tout bonnement de la vie ou de la mort de tout un peuple, d’un pays, d’un dernier espoir. Entre les fanas du 8 Mars et les férus du 14 Mars, on finirait par se croire à l’assemblée générale des Nations unies, car les opinions des uns et des autres réduisent notre politique locale au seul point de savoir qui de l’Iran, l’Arabie saoudite, la Syrie ou des États-Unis serait un meilleur modèle de régime à suivre ou un meilleur allié avec lequel pacser : « En Iran il y a des églises » ! « Oui mais l’Arabie investit des millions dans nos finances » ! « La Syrie cherche à préserver les chrétiens d’Orient »! « Les États-Unis, haut lieu de la démocratie, ont élu un Noir comme président »! Et j’en passe, de propos ridicules qui ne répondent en aucun cas aux aspirations des Libanais... J’en passe car dans la politique mondialiste des uns et des autres, il est fait abstraction du seul centre d’intérêt de la majorité silencieuse des Libanais : le Liban. J’en passe car au lieu d’affirmer et de préserver notre identité, nos politiciens s’acharnent à la rallier à des axes qui ne feront que la dénigrer. J’en passe car nos aspirations sont ailleurs, nos rêves, velléités et espoirs sont loin de leur monde politique et de leurs mots vides de sens. J’en passe car ils ont leur monde et nous avons le nôtre. Leur monde est celui des grands mots et des petits moyens, leur monde est celui de la poudre aux yeux et de la théorie du complot, celui des titres pompeux et de l’action inexistante. Leur monde est celui ou les problèmes pressants de la vie quotidienne, les maux journaliers des Libanais et leurs attentes les plus légitimes ne sont que de burlesques farandoles qu’ils omettent de mentionner dans leur débats télévisés. Leur monde est celui où le sang des Libanais peut être versé à tout moment dans le but d’organiser de chaleureuses retrouvailles autour de repas plantureux. Notre monde est celui des familles qui ne trouvent plus de pain à mettre sur la planche, du père à la recherche de bois pour réchauffer ses enfants à défaut de fuel abordable, d’une mère au cœur déchiré qui voit tous ses enfants partir à l’étranger et qui attend les fêtes pour, peut-être, les retrouver, des familles qui ne savent plus à quel saint se vouer pour avoir de l’eau, de l’électricité et pouvoir payer les factures qui ne cessent de s’entasser. Notre monde est celui des ménages surendettés, des sociétés au pied du gouffre, celui de la crise du pouvoir d’achat, celui d’une éducation nationale en péril et des scolarités exorbitantes, du problème de la Sécurité sociale et de la retraite, celui de ces hommes et femmes à qui on refuse les soins au seuil des hôpitaux. Notre monde est celui d’un système judiciaire qu’on enchaîne au pied de la politique, des nominations sécuritaires qui se font attendre quand les terroristes, escrocs et filous de tout genre pullulent dans nos rues, nos quartiers et même jusqu’au bas de nos immeubles à la recherche de leur prochaine victime. Il est nécessaire que nos hommes politiques comprennent qu’au lieu de perdre leur temps (et le nôtre d’ailleurs) et de passer des jours et des semaines entières à décortiquer, critiquer ou défendre les excuses publiques de l’un ou le pèlerinage de l’autre, les relations incestueuses des uns avec l’Iran et la Syrie et des autres avec l’Arabie saoudite et les États-Unis, ils devraient plutôt se pencher sur notre monde à nous, ce monde qui fut le leur un jour, car leur monde nous est insignifiant pour ne pas dire inexistant. Oui, penchez-vous sur notre monde, le vrai Liban, où chaque Libanais qui a pu survivre malgré tout le chaos causé par vous, qui a refusé de partir, qui a cru en un meilleur avenir, ou qui s’attache à une ultime chance pour sauver son pays, qu’il refuse d’associer à toute autre identité, est un héros, un vrai ! Joe GHANEM
La fièvre électorale emballe tout le pays, que cela soit durant les réunions de famille, de travail ou même autour d’une bonne tasse de café. En effet, il n’est de conversation qui ne finisse par virevolter autour de la politique.
L’enjeu de telles élections, à en croire le vocabulaire morose pour ne pas dire macabre des médias et des politiciens de tout bord, doit y...