Publication Le permis d’évasion de Fatima Sharaffedine

Colette KHALAF Petit ouvrage illustré, accompagné d’un CD, « Matha Law » est une compilation de textes brefs et d’images sur le thème « Et si…». Et si tout ce qu’on rêvait devenait soudain réalité. Dans l’univers des mots de Fatima Sharaffedine, où Hiba Farran a signé les dessins et Kinda Hassan la musique, on se joue des mots comme on joue à la marelle. Les joues enflent, jusqu’à éclater, pour donner des milliers de baisers, et le linge est étendu sur des nuages. Les toits sont sans murs et le plafond se transforme en parasol. Dans ce monde peuplé de petites fourmis qui font des ronds dans l’eau et d’éléphant qui vole, il pleut des crayons de toutes les couleurs, et les enfants n’ont plus peur de patauger dans la boue. Il y a aussi un coq qui a avalé un savon, un train qui file à vive allure, suivi par les cumulonimbus, les stratus et autres formes vaporeuses du grand ciel bleu. Il y a surtout cette douce folie qu’on appelle liberté dont s’est éprise l’équipe de créateurs pour la transmettre aux enfants ainsi qu’aux adultes. Le texte, sans suite logique (puisque chaque page est indépendante de l’autre), en parfaite adéquation avec le format, en accordéon, mais qui peut se lire dans tous les sens, de haut en bas ou de droite à gauche, est complété par une musicalité imagée. «N’ayons pas peur des mots, semble dire Fatima Sharaffedine, et surtout n’ayons pas peur de rêver ». À l’heure où les enfants au Liban étudient encore dans des livres aux illustrations classiques, voire obsolètes, et aux histoires ennuyeuses, l’auteur, qui a effectué de hautes études en littérature arabe ainsi qu’en éducation, tente de dépoussiérer les vieux clichés et de remettre à l’honneur la langue arabe, si belle et si fleurie. «Cette démarche est un projet concocté à plusieurs, souligne Sharaffedine. Nous voulions dépasser les limites du politiquement correct qu’on enseigne à nos enfants et aller au-delà des rêves sans pour autant sombrer dans l’anarchie ou le chaos.» «C’est un objectif que je tente de suivre à travers toutes mes publications, bien élaboré et non hasardeux», insiste-t-elle (plus d’une trentaine jusqu’à ce jour). Un message plus divertissant qu’éducatif, visant à donner la liberté aux enfants. Une liberté de rêver, d’imaginer et donc de créer.