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Actualités - OPINION

L’ordre et la politique

Il est vrai qu’aux dernières élections à l’ordre des avocats de Beyrouth la démocratie a une fois de plus remporté des palmes. Mais ceux qui ont salué sa victoire ont oublié de préciser que cette démocratie a triomphé seulement à l’échelle de la bataille entre les différents partis et courants politiques. La concurrence ne s’est pratiquement pas jouée au niveau du programme et de la personnalité des candidats. Pourtant les avocats en lice, et plus particulièrement les gagnants, remplissaient très bien ces critères, étant pour la plupart doués de compétences et de capacités. N’est-il pas paradoxal et malheureux que nombre d’électeurs, avocats dont une des missions est pourtant la garantie des libertés, soient si sensibles aux consignes de vote, et se pressent d’inscrire sur leurs bulletins des noms de personnes qu’ils n’ont jamais rencontrées ? Simplement parce que le mot d’ordre leur dicte de le faire… C’est un gâchis pour la libre appréciation et pour la libre décision, et c’est un point gagné pour l’endoctrinement aveugle. De fait, à l’annonce des résultats, le CPL et le 14 Mars ont savouré les fruits de semaines, voire de mois de mobilisation. Chacun des deux camps a interprété les scores comme s’ils étaient les siens. Attitude justifiable, vu qu’il est désormais notoire qu’aucun candidat, même indépendant et autant valable qu’il puisse l‘être, n’a de chance d’obtenir un siège au conseil de l’Ordre sans être appuyé par un groupement politique. Je trouve regrettable par ailleurs que certains médias, audiovisuels ou de la presse écrite, suivent – ou confortent – la tendance des partis à clamer haut et fort leur implication dans les élections. La télé, la radio et les journaux personnifient les courants politiques et, selon leur affiliation, leur attribuent la victoire. Dans leurs gros titres nulle trace de noms de candidats. Désormais en société on entend « le CPL a gagné » ou « le 14 Mars a gagné » plutôt que « M. X ou M. Y a gagné ». Triste réalité qui, il y a seulement quelques années, aurait été jugée aberrante : la politique est devenue indissociable de la vie du barreau. Dans un corps professionnel par essence soucieux de son indépendance, les responsables de l’ordre vont-ils se résigner à accepter une telle situation ? Ou bien vont-ils refuser cet état de fait, et appeler leurs confrères à se dégager d’un si grand accaparement et à voter libres de toute influence ? D’abord, ils feraient peut-être bien, lors du prochain scrutin, d’interdire rigoureusement l’enceinte du Palais de justice (à partir du grillage) à toute personne qui ne justifierait pas de sa qualité d’avocat. Ce serait déjà nous épargner la présence hardie de militants et de cadres partisans… Claude ASSAF Avocate
Il est vrai qu’aux dernières élections à l’ordre des avocats de Beyrouth la démocratie a une fois de plus remporté des palmes. Mais ceux qui ont salué sa victoire ont oublié de préciser que cette démocratie a triomphé seulement à l’échelle de la bataille entre les différents partis et courants politiques. La concurrence ne s’est pratiquement pas jouée au niveau du...