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Théâtre Les chèvres de Monsieur Karam Maya GHANDOUR HERT

Avec « Maqam el-Jadi.org », Raïf Karam est parti à la chasse aux chèvres et aux boucs. Bien que le troupeau soit resté uni, l’auteur-metteur en scène a peut-être raté sa cible. Maqam el-Jadi.org est, influence du XXIe siècle oblige, une pièce de théâtre qu’on pourrait qualifier de génétiquement modifiée. Un genre hybride, un mélange de fête foraine, de cirque, de tragi-comédie, de music-hall, de mariage de village … Le tout mâtiné de projections vidéo et de chansons aux propos grivois. Bref, un spectacle qui contient plein (un peu trop, sans doute) d’éléments disparates, glanés d’un peu partout. La conséquence se situe très loin du théâtre conventionnel auquel les gens normaux sont habitués. L’on comprendra alors pourquoi le public en sort désorienté (mais aussi frustré d’avoir si peu digéré cette « makhlouta »). La troupe (ou plutôt le troupeau, puisque les femmes sont des chèvres et les hommes des boucs) l’a d’abord entraîné dans la rue pour le faire participer à des déambulations trouvées au premier abord assez cocasses. Redescendu dans l’enceinte du théâtre Monnot*, le spectateur assiste à un numéro de derviche tourneur puis à une interview improvisée entre une chèvre sexy (pardon, une journaliste télé) et un poète en état d’ébriété avancé. Suivant docilement les boucs déguisés en body-guards, le public entre finalement dans la salle de théâtre. Et là, en une heure de temps, il perd complètement ses repères… Que s’est-il passé ? Raïf Karam est un homme qui ne fait pas les choses à moitié. Pour sa pièce Maqam el-Jadi.org, il a décidé de faire dans l’inédit. Initiative plus que louable, la nouveauté étant toujours la bienvenue. Tout comme l’intention principale de l’auteur-metteur en scène : monter une allégorie satirique à forte valeur métaphorique. Histoire d’épingler la société libanaise, ses femmes, ses hommes et ses politiques. Il y a donc là des filles joyeuses, des filles de joie. Des chèvres grelottantes, frémissantes, aguicheuses, allumeuses. Des hommes qui font la bête. Une bête qui ne pense qu’à « ça ». Une bête excitée, empressée, ne visant qu’un seul but : la croupe de sa femelle. Trop bête. Ni fiction, ni psychologie, ni personnages donc dans ce qui devait être un hymne à la parole mettant en pièces le drame pour mieux célébrer la figure de l’acteur et le mouvement de la parole, thèmes chers à Raïf Karam. Jusque-là, rien de méchant. Mais voilà, à trop vouloir en faire, il a raté sa cible. Sauf s’il visait, justement, d’égarer son public dans un embrouillamini ne sachant trop quoi penser, quoi analyser. Le texte un peu fumeux dans un spectacle étrangement mêlé (et emmêlé) agace sur le moment autant qu’il laisse un arrière-goût de fascination. L’on se demande en effet d’où Karam a bien pu sortir ces idées. L’humour de premier niveau provoque très peu d’étincelles. Voilà donc un spectacle au cours duquel on s’ennuie sans s’ennuyer. Bizarre, bizarre ce qui se passe au Monnot en ce moment… Dommage qu’un homme de théâtre qui possède autant de culture et de savoir-faire ait succombé au chant des sirènes du chaos. * Jusqu’au 16 novembre, à 20h30. Tél. : 01/202422.
Avec « Maqam el-Jadi.org », Raïf Karam est parti à la chasse aux chèvres et aux boucs. Bien que le troupeau soit resté uni, l’auteur-metteur en scène a peut-être raté sa cible.
Maqam el-Jadi.org est, influence du XXIe siècle oblige, une pièce de théâtre qu’on pourrait qualifier de génétiquement modifiée. Un genre hybride, un mélange de fête foraine, de cirque,...