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Actualités - CHRONOLOGIE

Sur un train d’enfer

Maya GHANDOUR HERT « J’ai voulu faire une épopée contemporaine », a déclaré Mathias Enard à propos de « Zone » (Actes Sud). Cette épopée-là est ferroviaire et elle est constituée de 24 chapitres, étalés sur 560 pages, et un seul point. C’est l’histoire d’un espion franco-croate qui prend le train Milan-Rome. Ses pensées s’enchaînent, ses souvenirs déferlent, se bousculent. Dans sa mallette, les pires secrets, les pires atrocités du XXe siècle. Il raconte et se rappelle. Il convoque l’histoire, tisse une immense mosaïque qui mêle bourreaux et victimes, héros et criminels, destinées singulières et rencontres viriles dans la zone méditerranéenne. Car c’est de cette zone-là dont il est question. Une zone bien connue de l’auteur pour y avoir erré huit années (de Téhéran au Caire, en passant par Damas, Soueida, Beyrouth et Tunis) au grès des bourses, des stages et des instituts d’études arabes ou persanes (Enard parle l’arabe si bien qu’il l’enseigne à des Espagnols). C’est donc dans cette zone qu’il a recueilli, dit-il, « une somme considérable de témoignages, de documents, de récits de combattants, de victimes, de témoins de nombreux conflits qui ont ensanglanté la Méditerranée au XXe siècle. C’est de ces témoignages que sont nés non seulement La perfection du tir, son premier roman, mais aussi l’idée de composer une vaste fresque qui nouerait toutes ces histoires, les rassemblerait en les éclairant l’une l’autre ». Dans Zone, point de…points donc. Hormis dans ces deux chapitres consacrés à… Beyrouth, en 1982, en pleine invasion israélienne. « Une ville avec un phare, des collines, des hôtels de luxe, des boutiques, des cafés, des restaurants, des pêcheurs à la ligne, des amoureux au bord de l’eau, des night-clubs, des bordels, des universités, des politiciens et des journalistes à ne plus savoir qu’en faire. Des morts aussi, à ne plus savoir où les mettre. » Cinq fois 100 pages et demie pour une phrase qui résume à elle seule : « À qui appartient la terre, de toute façon ? Aux paysans et aux morts. » Prouesse stylistique certes, mais aussi roman hautement haletant, tant au niveau des péripéties que pour le pauvre lecteur qui doit s’interrompre à plusieurs reprises, histoire de reprendre son souffle. L’auteur émaille sa fresque historique de nombreuses références littéraires : de l’Iliade à Voyage au bout de la nuit, de James Joyce à William Burroughs, en passant par des poètes du monde méditerranéen. Zone a reçu un accueil dithyrambique. Il a été qualifié d’horrible et de sublime roman, de grand traité de désespoir. Comme un train lancé dans la nuit… Signature demain, vendredi 31 octobre, à 18h00, au Virgin Megastore.
Maya GHANDOUR HERT

« J’ai voulu faire une épopée contemporaine », a déclaré Mathias Enard à propos de « Zone » (Actes Sud). Cette épopée-là est
ferroviaire et elle est constituée de 24 chapitres, étalés sur 560
pages, et un seul point.
C’est l’histoire d’un espion franco-croate qui prend le train Milan-Rome. Ses pensées s’enchaînent, ses souvenirs...