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Actualités - CHRONOLOGIE

La crise libanaise longuement discutée lors du double sommet de Damas Assad presse Sleiman de renforcer l’armée à Tripoli « car la situation restera précaire si le problème des salafistes n’est pas réglé »

Survenant dans le sillage de la rencontre tant attendue entre les présidents Nicolas Sarkozy et Bachar el-Assad, le sommet quadripartite qui a groupé hier matin à Damas les deux dirigeants français et syrien ainsi que l’émir du Qatar, cheikh Hamad ben Khalifa al-Thani, et le Premier ministre turc, Recip Tayyip Erdogan, a focalisé l’attention des capitales arabes et étrangères, parallèlement à un large éventail de milieux politiques libanais. L’évolution de la situation au Liban, sous ses différents aspects, a été longuement passée en revue, aussi bien lors des entretiens bilatéraux Sarkozy-Assad qu’au cours du sommet quadripartite qui a également porté sur divers problèmes régionaux, notamment le dossier nucléaire iranien, les pourparlers de paix entre la Syrie et Israël, la conjoncture en Irak, la crise du Darfour et, à l’échelle internationale, les tensions au Caucase. L’ordre du jour des discussions de ces dernières quarante-huit heures était ainsi, à l’évidence, très disparate, mais comme l’a souligné le président Sarkozy lui-même « ce n’est pas une folie que de s’occuper de tous les conflits de la région en même temps, mais c’est, je crois, sage, au contraire, car tous se tiennent et sont interdépendants ». En tout état de cause, le double sommet de Damas aura permis au président Sarkozy d’accroître sensiblement le poids de la France au Proche-Orient, en sus – fait significatif – de la signature d’importants contrats d’ordre énergétique entre Total et la Syrie (voir page 8). En tout état de cause, le chef de l’État français a mis en garde contre une attaque israélienne contre l’Iran, invitant à ce propos Damas à œuvrer en vue de convaincre le régime iranien des mollahs à abandonner l’option de l’arme nucléaire. Quant au Premier ministre turc, il a annoncé que les pourparlers syro-israéliens reprendront le 18 septembre. En ce qui concerne le volet libanais, force est de rappeler que les dirigeants français ont souligné publiquement ces dernières semaines que le degré d’ouverture de Paris en direction de Damas est dans une certaine mesure fonction de l’évolution de l’attitude du régime syrien à l’égard du processus de consolidation d’un Liban souverain et politiquement indépendant auquel le chef de l’État français a tenu hier à réaffirmer son ferme attachement devant son homologue syrien. Et dans ce contexte, les propos inattendus que le président Assad a tenus hier au sujet, précisément, de la crise libanaise pourraient fournir quelques indices au sujet des intentions et de la ligne de conduite de Damas au Liban. Le chef de l’État syrien a ainsi explicitement invité l’armée libanaise à renforcer son déploiement à Tripoli, soulignant sans détour que la situation sur la scène libanaise resterait « précaire » tant que le problème de la présence d’« extrémistes et de salafistes » (sunnites) au Liban-Nord ne serait pas réglé, allant même jusqu’à prétendre que certains pays de la région s’emploient à soutenir ces salafistes, dans une allusion à peine voilée à l’Arabie saoudite. « La situation au Liban est encore précaire et nous sommes inquiets de ce qui se passe au Liban-Nord, a ainsi affirmé le président Assad. Tant que l’extrémisme subsiste dans cette région, le Liban ne connaîtra pas la stabilité. Rien de positif au Liban n’a de valeur sans régler la question de l’extrémisme et des mouvements salafistes au Liban-Nord », a-t-il répété, affirmant que « des pays soutiennent officiellement » ces mouvements. Il a révélé avoir demandé au président Michel Sleiman, lors de la visite de ce dernier à Damas le 13 août, d’« envoyer d’urgence davantage de troupes au Nord ». « L’envoi de ces forces en urgence est nécessaire pour résoudre ce problème, sans quoi le Liban ne connaîtra pas la stabilité », a-t-il dit devant les caméras. Le président Assad a, par ailleurs, indiqué que l’établissement de relations diplomatiques entre le Liban et la Syrie se fera dans les prochains mois « peut-être avant la fin de l’année ». Il a précisé en outre, sur un tout autre plan, que lors de ses entretiens avec le président Sleiman, il avait évoqué le problème de la participation du Liban aux pourparlers de paix avec Israël. « J’ai discuté avec le président libanais Michel Sleiman de la nécessité pour le Liban de se joindre aux négociations de paix (avec Israël), et le président Sleiman était d’accord avec moi sur ce point. » Concernant ce volet précis des pourparlers avec Israël, le président Assad a précisé, dans une interview à la chaîne du Hezbollah al-Manar, sa position concernant le soutien apporté par son pays à la Résistance (entendre le Hezbollah). Interrogé sur d’éventuelles concessions que la Syrie serait disposée à faire sur ce plan dans le cadre du processus de paix, le président Assad a déclaré : « Nous ne sommes pas un pays qui présente des cadeaux. Nous parlons en termes d’intérêts. Nous demandons à tout pays concerné d’exposer devant nous ses intérêts, et nous voyons où se situent les intérêts communs. En ce qui nous concerne, nous ne voyons pas que notre intérêt est de nous départir de la Résistance. Notre position est claire. Dans notre discours politique, notre position est en faveur de la Résistance contre toute occupation. Que ce soit en Irak, au Liban, en Palestine, notre position n’a pas changé. Ce discours politique de la Syrie n’a pas changé, et il ne paraît pas devoir changer tant que les circonstances en rapport avec l’occupation ne changent pas. » Les rôles américain et français Pour en revenir aux rencontres de Damas, à l’issue du sommet quadripartite, le président Assad a longuement évoqué les perspectives de paix dans la région, déclarant notamment à ce propos : « Nous insistons sur le rôle américain et sur le rôle français. Le président Sarkozy est enthousiaste sur ce plan. Il reste que la Turquie demeurera le partenaire principal dans le processus de paix au cours de cette étape et dans les phases suivantes. Nous attendons maintenant l’étape des élections israéliennes qui déterminera l’évolution de la situation. Nous désirons le soutien de tous les pays, plus particulièrement la France, la Turquie et le Qatar afin de nous tranquilliser sur le fait que le prochain Premier ministre israélien suivra la même voie que celle tracée par Olmert pour ce qui a trait au retrait total des territoires occupés afin de réaliser la paix. Le volet palestinien est vital pour le volet syrien. Nous ne voulons pas uniquement conclure un accord de paix, mais nous voulons la paix et nous espérons que tous les États soutiendront cette option. Le rôle américain est nécessaire dans le processus de paix. » Le président Assad a, par ailleurs, estimé que les négociations indirectes avec Israël pourraient « peut-être » déboucher sur des discussions directes « après les élections américaines », le 4 novembre. Il a souhaité que la France, le Qatar et la Turquie, qui « ont des relations étroites avec les Etats-Unis » encouragent les Américains à participer à ce processus. Mise en garde de Sarkozy sur le dossier iranien Quant au président Sarkozy, il a clairement profité de sa présence à Damas pour lancer une véritable, et inquiétante, mise en garde concernant le dossier nucléaire iranien. « L’Iran prend un risque majeur à continuer le processus d’obtention du nucléaire militaire – ce qui est notre certitude –, parce qu’un jour, quel que soit le gouvernement israélien, on peut se retrouver un matin avec Israël qui a frappé », a-t-il déclaré à ce propos. « Il ne s’agit pas de savoir si c’est légitime, intelligent ou pas. Qu’est-ce qu’on fera à ce moment-là ? Ce sera la catastrophe. Il faut éviter cette catastrophe », a-t-il martelé. Il a invité la Syrie à « jouer un rôle important pour convaincre » l’Iran de renoncer au nucléaire militaire. Mais il semble avoir eu du mal à convaincre son interlocuteur, puisque le président Assad a persisté à dire que le nucléaire iranien était « civil » et « non pas militaire ». Pour le président Sarkozy, les dirigeants iraniens « perdent beaucoup de temps, trop de temps ». Il a suggéré que les dirigeants iraniens acceptent au moins des « contrôles complets et honnêtes » de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) sur leur territoire pour établir leur bonne foi aux yeux du reste du monde. Tout en admettant des différences d’analyse avec la Syrie sur ce dossier, le président Sarkozy a redit sa volonté de voir les Syriens jouer de leur influence sur leurs alliés iraniens. Il faut « convaincre l’Iran de ne pas se laisser aller à cette stratégie qui serait très mauvaise, de penser que le temps travaille pour eux. Le temps ne travaille pas pour la paix », a-t-il affirmé. En ce qui concerne le Liban, le président Sarkozy a une nouvelle fois réaffirmé l’attachement de la France à la souveraineté et l’indépendance du Liban. Il a également souhaité que la promesse syrienne d’établir des relations diplomatiques avec le Liban se traduise « dans les faits ». Le chef de l’État français a, d’autre part, espéré faire en sorte que la France et l’Union européenne puissent peser, aux côtés des États-Unis, dans la résolution des conflits du Proche-Orient. Il a de nouveau défendu sa décision de se rapprocher de la Syrie, malgré les réticences américaines à l’égard de cette démarche. « La France est amie des États-Unis, la France a la confiance des États-Unis (...). Il se trouve que sur la question syrienne on n’a pas tout à fait la même analyse, a-t-il dit. La France pense qu’il faut encourager la Syrie sur le chemin de la paix (...) et qu’on a besoin de la Syrie pour convaincre l’Iran, a-t-il poursuivi. Je pense (...) que le désaccord ne porte pas sur le résultat (...), mais sur le moment où on doit commencer à parler. » Les pourparlers avec Israël En ce qui concerne, enfin, les pourparlers syro-israéliens, un cinquième round prévu pour dimanche à Istanbul a été reporté en raison de la démission d’un négociateur israélien, a indiqué le président Assad, et l’annonce d’une démission prochaine du Premier ministre Ehud Olmert, empêtré dans des affaires judiciaires, font peser une incertitude sur l’avenir. Mais le Premier ministre turc, Recip Tayyip Erdogan, s’est voulu rassurant en se déclarant « convaincu que le successeur de M. Olmert va continuer ce processus ». Il a ajouté que la cinquième session de négociations se tiendrait finalement les 18-19 septembre. « Pour le moment, ce processus avance d’une manière positive », a-t-il dit.
Survenant dans le sillage de la rencontre tant attendue entre les présidents Nicolas Sarkozy et Bachar el-Assad, le sommet quadripartite qui a groupé hier matin à Damas les deux dirigeants français et syrien ainsi que l’émir du Qatar, cheikh Hamad ben Khalifa al-Thani, et le Premier ministre turc, Recip Tayyip Erdogan, a focalisé l’attention des capitales arabes et...