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Actualités - CHRONOLOGIE

PATRIMOINE - Les joyaux architecturaux de Bucarest défigurés par le temps et l’incurie des propriétaires ou des autorités Les jeunes Roumains à la rescousse des « maisons qui pleurent »

Tous les dimanches, Loredana Stasisin prend son appareil photo et part en vadrouille à travers Bucarest, pour immortaliser les joyaux architecturaux défigurés par le temps que l’incurie des propriétaires ou des autorités semble avoir condamné à la disparition. Comme elle, une dizaine de jeunes, des étudiants en architecture pour la plupart, se sont investis dans un projet baptisé « Maisons qui pleurent », avec pour but de « réveiller l’intérêt des Roumains pour le patrimoine », sinon d’empêcher la destruction de ces immeubles qui font encore le charme d’une capitale envahie par le béton. « Nous traversons une période où l’on démolit beaucoup, sans le moindre souci pour les bâtiments ayant une valeur historique », regrette Loredana. Premier objectif de ces jeunes enthousiastes : dresser une liste des immeubles menacés, qui nécessitent au plus vite des travaux de consolidation ou qu’une intervention des autorités peut encore sauver des bulldozers. « Regardez cette maison datant de la fin du XIXe siècle », dit la jeune fille en montrant une maisonnette d’un étage, dont on devine à peine la silhouette sous le lierre envahissant. « Elle ne fait pas partie des maisons classées au patrimoine, mais elle a beaucoup de charme. Or, la propriétaire nous a prévenus qu’elle serait démolie d’ici à un mois ». « Nous savons qu’une partie de ces maisons, qui ont une longue vie derrière elles, ne pourront pas être sauvées, mais au moins notre projet pourra témoigner de leur existence passée », expliquent les étudiants sur leur site Internet. Le président de l’Union des architectes, Stefan Lungu, s’insurge de son côté contre l’état « déplorable » du patrimoine et dénonce « l’absence de toute préoccupation des autorités pour sa conservation ». « Il perdure encore une mentalité héritée du régime communiste », lorsque Nicolae Ceausescu avait rasé des quartiers résidentiels et des villages entiers pour faire construire des HLM, indique à l’AFP M. Lungu. En outre, selon lui, les promoteurs immobiliers ne reculent devant rien pour « exploiter le moindre lopin de terre », souvent au mépris des lois en vigueur. Critiqué pour son indifférence, le ministère de la Culture a annoncé cette semaine le lancement du « plus vaste projet de réhabilitation de monuments historiques » depuis 1990. Bénéficiant d’un prêt de 250 millions d’euros de la Banque de développement du Conseil de l’Europe, ce programme vise à la rénovation, entre autres, de l’Opéra national et des musées d’histoire et d’art de Bucarest, du Théâtre national de Lasi (nord-est du pays) ou encore de la Bibliothèque française de Craiova (sud du pays). « Trop tard », estime toutefois M. Lungu. « Si rien n’a été fait pour empêcher qu’un bâtiment tel que le ministère de l’Intérieur (construit dans les années 1930) soit défiguré par des climatiseurs, que peut-on encore espérer ? », s’interroge-t-il. Parfois, ce sont les travaux mêmes de réhabilitation qui portent le coup de grâce à une maison ayant défié les siècles, comme cet immeuble du centre de Bucarest rénové à la va-vite par son propriétaire et dont les détails architecturaux ont tous été recouverts d’une épaisse couche de ciment. « Quand je vois des choses comme ça, je ne sais pas si je dois me réjouir que la maison n’ait pas été démolie ou pleurer à cause des dégâts provoqués par la rénovation », dit Loredana.
Tous les dimanches, Loredana Stasisin prend son appareil photo et part en vadrouille à travers Bucarest, pour immortaliser les joyaux architecturaux défigurés par le temps que l’incurie des propriétaires ou des autorités semble avoir condamné à la disparition.
Comme elle, une dizaine de jeunes, des étudiants en architecture pour la plupart, se sont investis dans un projet...