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Actualités - OPINION

LE POINT Un atome de bon sens Christian MERVILLE

Et dire qu’il suffisait d’un peu de patience… À ceux qui auraient pu encore se poser quelques questions sur les errements de l’ère Bush, Stephen Hadley vient de fournir une explication pour le moins sidérante. « L’une des constatations que nous pouvons tirer de nos expériences passées est que nous avons beaucoup appris », a dit le conseiller présidentiel pour les Affaires de sécurité commentant le revirement majeur intervenu dans la politique américaine à l’égard de la Corée du Nord. Du jour au lendemain, en effet, l’« axe du mal » se trouve amputé, après la Libye de Mouammar Kadhafi, de son deuxième pilier, même si le régime de Kim Jong-il demeure placé sous observation. « Nous agirons au coup par coup », s’est laissé aller à dire le président US. L’histoire retiendra que le grand tournant aura été amorcé en octobre 2006, date du premier essai nucléaire au pays du Matin calme. Le camp des colombes, formé de Condoleezza Rice et de ses principaux lieutenants, dont son envoyé spécial à Pyongyang, Christopher Hill, a choisi ce moment pour obtenir ce qu’il n’avait jamais cessé de réclamer : une révision déchirante (pour reprendre une vieille formule remontant à l’époque de Foster Dulles, l’un des premiers maîtres du département d’État) des principes en vigueur jusqu’alors. Argument déterminant : la rupture des pourparlers, en 2002, et le recours à une politique du bâton qui a eu un effet contraire à celui escompté, alors que Bill Clinton avait négocié par la voie diplomatique un cadre d’accord demeuré valable de longs mois durant. Le durcissement, à en croire cette équipe, a permis aux Nord-Coréens de saisir le prétexte pour procéder à leur marché de plutonium auprès de leurs fournisseurs habituels et pour faire leur entrée dans le club jadis très fermé des puissances nucléaires. L’issue du long bras de fer ne semble pas être du goût des faucons de la présente administration républicaine, Dick Cheney en tête. Lors d’une réunion, la semaine dernière, avec les membres d’un groupe d’experts en politique étrangère, le vice-président a été prié de commenter la décision, appelée à être prise formellement, dans les jours à venir, de rayer la Corée du Nord de la liste des pays encourageant le terrorisme. Réponse laconique de l’intéressé : « Je ne serais pas celui qui en fera l’annonce. » En privé, le président-bis, ainsi qu’il est surnommé dans la capitale fédérale, estime que l’on a trop cédé et, plus grave, beaucoup trop tôt. À quoi la Maison-Blanche rétorque qu’il importait d’aller jusqu’au bout du plan prévoyant la démilitarisation de la péninsule. Ce qu’elle se garde bien d’affirmer, par contre, c’est qu’en l’absence de tout progrès sur le dossier palestino-israélien, de perspectives plutôt aléatoires s’agissant des pourparlers entre la Syrie et l’État hébreu, de l’improbabilité d’un règlement à brève échéance de la crise en Irak et plus encore du conflit avec l’Iran, il était impératif de réussir une avancée même modeste, sinon une percée décisive, ailleurs dans le monde. S’il est aisé, en politique, de juger l’arbre à ses fruits – comprendre aux résultats obtenus – on ne peut que reprocher aux républicains leur approche du contentieux avec la République islamique, jugée non seulement stérile mais aussi contre-productive. Aux conditions posées, véritables diktats en fait, et sur un ton qui ne supporte pas la réplique, répond un raidissement iranien de plus en plus marqué. La dernière manifestation de ce durcissement remonte à ces dernières quarante-huit heures quand, coup sur coup, Saïd Jalili puis Ali Bagheri ont fait une entrée remarquée au sein du Conseil suprême iranien de la sécurité nationale, un organisme chargé des pourparlers avec l’Agence internationale de l’énergie atomique. Par ricochet pourrait-on dire, Israël vient de se donner un an pour détruire les dizaines d’installations éparpillées sur l’ensemble du territoire iranien s’il ne veut pas être la cible de l’arme absolue. Plus sérieux que l’ancien chef du Mossad, Shavtaï Shavit, à qui l’on doit ces propos confiés au Sunday Telegraph, les experts militaires ne cessent de rappeler, eux, quelques évidences : nul pour l’heure ne connaît l’emplacement exact des usines soupçonnées de fabriquer l’uranium enrichi et d’ailleurs des frappes ciblées auraient pour seul effet de retarder d’un an ou deux le programme iranien. Sans compter que les dommages collatéraux (pour le pays agresseur) des raids se traduiraient par une vague terroriste sans précédent qui viserait les intérêts américains et israéliens ainsi que par… un net regain de popularité d’un Mahmoud Ahmadinejad actuellement en perte de vitesse. À six mois de la fin du second mandat de George W. Bush, ce sont là des perspectives qui en feraient reculer plus d’un. Dick Cheney excepté.
Et dire qu’il suffisait d’un peu de patience… À ceux qui auraient pu encore se poser quelques questions sur les errements de l’ère Bush, Stephen Hadley vient de fournir une explication pour le moins sidérante. « L’une des constatations que nous pouvons tirer de nos expériences passées est que nous avons beaucoup appris », a dit le conseiller présidentiel pour les...