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Actualités - CHRONOLOGIE

CONCERT - À l’amphithéâtre Aboukhater (USJ) Le poète du nord et le pèlerin polonais autour d’un clavier…

Public relativement nombreux à l’amphithéâtre Aboukhater (USJ), qui reprend ses activités avec le Conservatoire national supérieur de musique et le pianiste Walid Moussallem. Vêtu de noir, Moussallem a invité le poète du nord et le pèlerin polonais pour un programme éclectique, style délices du piano. Entre Brahms et Chopin, la musique a ici toutes les allures d’un ample et fiévreux souffle romantique où ont crépité, en un splendide feu d’artifice, chromatismes perlés, accords somptueux et mélodies fluides, rêveuses ou tourmentées. Deux virtuoses du clavier dont la narration reste toujours un grand moment d’évasion et de bonheur. Ouverture avec les Variations et fugue sur un thème de Haendel de Brahms. Grandes arches sonores, architecture toute en finesse et certains éclats romantiques, pour revisiter le monde touché par la grâce de Dieu, du compositeur du Messie?et de Rinaldo, par un Allemand du nord, villageois conservateur et luthérien strict, à l’inspiration teintée d’une poésie entre soie mordorée et douceur diaphane… Harmonie allemande et mélodie italienne pour cette longue narration aux accents parfois anglicisés car Haendel avait ce fabuleux pouvoir d’assimilation dont Brahms tire de merveilleux et inédits accents où la veine romantique, endiguée d’une certaine rigueur, a aussi son compte, son éloquence et son mot à dire… Pour prendre le relais, après ces notes à la fois droites et échevelées, après une «?fugue?» toute en subtiles nuances aux thèmes récurrents, voilà la Ballade n°4 en fa mineur de Chopin. Transparence, rêverie, fragilité, délicatesse et fluidité d’une narration véritable joyau du répertoire pianistique. Toute l’étendue des ressources et des possibilités du clavier est dans cette œuvre à la forme et à l’inspiration libres, ne cherchant ni à décrire ni à suivre un quelconque argument littéraire… Virtuosité et brio Notes opalescentes qui chutent comme une lumière d’étoiles avec les deux Études op 10 n°3 en mi majeur et op 25 n°11 en la mineur qui suivent cette ballade toute en teintes pastel et d’un flou insaisissable. Non pas des Études au sens pédagogique du terme comme chez Cramer ou Clementi, mais de véritables morceaux de concert (malgré parfois la désignation d’exercice) où Chopin affiche sa redoutable et irréductiblement séductrice virtuosité, toute en périlleuses contorsions d’un doigté soumis aux acrobaties les plus exposées aux dangers des bavures, pour tout téméraire qui ose s’y aventurer impunément… Une main gauche qui marque le rythme ou souligne une mélancolique mélodie au-dessus des syncopes de la basse, voilà le pèlerin polonais dans une chevauchée fantastique de notes littéralement incendiées et incendiaires… Pour conclure, la plus célèbre des Polonaises (en la b majeur) du prince du clavier. Fougue, impétuosité, vélocité pour cet opus martial, menaçant et fort, comme forgé dans un métal précieux, alliant les paysages de la Pologne à la vie de celui qui révolutionna toute la perception et le jeu du clavier… Comme un bouquet de fleurs aux chairs odoriférantes, cachant les bouches sanguinaires et voraces des canons, cette Polonaise résonne avec violence dans le ciel de Beyrouth quand dehors, dans les rues et la banlieue, les feux mal éteints des tiraillements populaires ont encore des rougeoiements sombres et suspects… On passe outre les quelques notes écrasées et les dérapages d’accords difficiles au moment des grands emportements et on apprécie le choix élégant et difficile de partitions, à bravoure et brio redoutables et soutenus, qui font une part royale au clavier… Encore un bis sous le feu des applaudissements et Chopin garde intacte son indéfectible magie qui se répand en nappes sonores incantatoires et veloutées… Edgar DAVIDIAN
Public relativement nombreux à l’amphithéâtre Aboukhater (USJ), qui reprend ses activités avec le Conservatoire national supérieur de musique et le pianiste Walid Moussallem. Vêtu de noir, Moussallem a invité le poète du nord et le pèlerin polonais pour un programme éclectique, style délices du piano.
Entre Brahms et Chopin, la musique a ici toutes les allures d’un...