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Exposition Charles le Téméraire, le duc qui mourut de vouloir être roi

La vie fastueuse et le destin tragique de Charles le Téméraire (1433-1477), le dernier duc de Valois-Bourgogne qui mourut de vouloir être roi, sont mis en scène au Musée historique de Berne grâce à 280 pièces exceptionnelles venues des quatre coins d’Europe. L’exposition voyagera en 2009 à Bruges (Belgique), l’un des hauts lieux des territoires du « grand duc d’Occident » qui allaient des Pays-Bas à la Franche-Comté, à cheval entre le royaume de France et l’Empire romain germanique. Les Suisses, et plus particulièrement les Bernois, manipulés en sous-main par le rusé Louis XI et le prudent empereur Frédéric III, eurent raison des prétentions de ce grand seigneur cultivé et cruel. Les œuvres présentées à Berne comptent d’ailleurs de nombreux vestiges des pillages des trésors bourguignons par les guerriers helvètes. Charles le Téméraire voulait s’affranchir de ses deux suzerains, le roi de France et l’empereur, en accédant à la dignité royale. Son ambition brisée trouvera cependant un prolongement posthume grâce à son arrière petit-fils Charles Quint et à la dynastie des Habsbourg dont les héritiers continuent de perpétuer l’ordre bourguignon de la Toison d’or. Conformément aux codes aristocratiques du Moyen Âge, il mit à profit l’opulence industrieuse des Pays-Bas pour mettre en scène sa magnificence et asseoir ses prétentions à un trône. Le visiteur de Berne peut prendre la mesure de la sophistication et de la richesse des arts bourguignons par les pièces religieuses ou profanes présentées. Les fêtes – dont celle de l’emblématique et décisive entrevue de Trêves avec l’empereur Frédéric III, qui dura deux mois à l’automne 1473 – étaient des moments privilégiés de propagande politique. Les contemporains étaient stupéfiés et, malheureusement pour Charles le Téméraire, également secrètement humiliés par les fastes de la cour de Bourgogne. Le duc de Bourgogne fit par exemple habiller entièrement de neuf tous ses courtisans pour le désastreux sommet de Trêves. Le coût de ces seuls frais de toilettes s’est élevé à l’équivalent du salaire annuel de plus de 550 maçons de l’époque ! Présentés à Berne, deux rares vêtements civils, des accessoires comme un somptueux sac à main de courtisan, un fabuleux jeu d’échecs en ivoire ou la reproduction du chapeau ducal – doré, orné de perles, de pierreries et de deux plumes rouge et blanche – donnent une idée de cette débauche d’élégance coûteuse. Banquets et tournois étaient autant d’œuvres d’art total au service de l’ambition dévorante du duc. Le musée bernois présente de luxueuses pièces de vaisselle, de précieuses tapisseries historiées et de riches armures d’apparat qui permettent d’imaginer ces divertissements-spectacles faisant appel aux cinq sens pour la plus grande gloire de leur commanditaire. Ces scénographies somptueuses ne suffirent cependant pas à subjuguer l’empereur qui décampa à l’anglaise, sans donner au duc la couronne qu’il convoitait en échange du mariage de sa fille unique avec l’héritier impérial. Cet échec diplomatique accula Charles le Téméraire à la guerre. Quatre années de batailles et de sièges le menèrent à sa perte et décidèrent pour les quatre siècles suivants des rapports de force stratégiques sur le continent européen. Le dernier duc de Valois-Bourgogne était un personnage paradoxal : moderne pour l’administration de ses domaines, de son armée et de ses finances, mais profondément marqué par l’idéal chevaleresque médiéval, ce qui fit de lui le jouet de la diplomatie tortueuse de Louis XI : le roi de France préférait les négociations pragmatiques aux coûteuses mises en scène du pouvoir et de l’honneur du lignage. Habilement, le monarque français décida de combattre son cousin et rival de Bourgogne... jusqu’au dernier Suisse s’il le fallait. La férocité des Helvètes devint célèbre grâce aux guerres bourguignonnes qui mirent en échec une armée disciplinée dotée de l’artillerie la plus moderne de l’époque. Le 2 mars 1476 à Grandson (canton de Vaud), Charles le Téméraire commit la première d’une tragique série d’erreurs tactiques : l’armée bourguignonne se débanda sans pratiquement combattre. Derrière lui, le « grand duc d’Occident » abandonnait son campement, ou plutôt l’équipement et les trésors de sa cour itinérante. Démoralisé, voire dépressif après la déroute de Grandson (« Dieu lui avait troublé le sens et l’entendement », dit un chroniqueur), Charles le Téméraire perdit définitivement pied. Après une autre défaite devant les confédérés helvétiques à Morat (canton de Fribourg), il trouva la mort le 5 janvier 1477 en Lorraine (est de la France) et son corps, découvert sur le champ de bataille nu et à moitié dévoré par les loups, fut enterré à Nancy comme un trophée. Denis ROUSSEAU
La vie fastueuse et le destin tragique de Charles le Téméraire (1433-1477), le dernier duc de Valois-Bourgogne qui mourut de vouloir être roi, sont mis en scène au Musée historique de Berne grâce à 280 pièces exceptionnelles venues des quatre coins d’Europe.
L’exposition voyagera en 2009 à Bruges (Belgique), l’un des hauts lieux des territoires du « grand duc...