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Actualités - CHRONOLOGIE

PARUTION « Abeyance », de Sarine Tchilinguirian * Éloge de la lenteur

« Abeyance » : immobilisme temporaire, désuétude ou inactivité. Le titre de l’ouvrage de Sarine Tchilinguirian exprime à sa façon étrange le fruit de recherches qu’elle a menées durant une année sous forme de diplôme en graphic design. Le thème, en clair, évoque la lenteur, la sensualité qui entoure chaque moment pensé, senti, lentement assimilé, bref dégusté. Deux ans plus tard, le projet se transforme en livre, qu’elle édite à compte d’auteur. Avant de s’envoler pour l’Instituo Europeo di design, pour y accomplir un master. « Êtes-vous heureux ? » demande l’artiste. « Le savez-vous vraiment ? » Et de rajouter, sur le carton d’invitation envoyé pour le lancement de son ouvrage : « Ralentissez, déconnectez-vous. Décompressez. Goûtez. Créez des liens. Explorez. » Tout un programme pour apprendre à, tout simplement, prendre son temps. Sarine Tchilinguirian parle lentement, bien qu’elle avoue, à son grand regret, manquer de temps, elle aussi, pour faire tout ce qu’elle voudrait prendre le temps de faire. Petit oiseau, un serin peut-être, son prénom en arménien regorge de poésie. Elle préfère la pensée philosophique, un certain regard sur la vie, le temps qui passe, qui a passé, les détails de l’existence qui surviennent souvent sans que l’individu ait pu en saisir l’essentiel. Du plaisir... Un projet coûteux « J’ai été obligée d’imprimer le livre à mes frais, car il a coûté très cher... » Tant dans la forme que dans le fond, Sarine a soigné son bébé pour y mettre tous les détails qui expriment au mieux son idée. « J’ai été inspirée par “la lenteur” de Kundera. Cette lenteur qui peut être positive, car elle permet de voir et de vivre les infimes détails de la vie. » « L’individu, poursuit-elle, est profondément affecté par le temps et la vitesse. Il oublie que la fin est la même pour tous, une mort inévitable. Alors, pourquoi ne pas savourer chaque instant, un café avalé lentement, un geste d’affection ou un sourire ? » Abeyance, un livre interactif qui offre au lecteur une certaine participation tant visuelle, tactile qu’intellectuelle. Les différents choix graphiques ont également des objectifs philosophiques. Outre la couverture en velours noir, qui déclenche très vite une envie de la caresser, la jeune femme a utilisé différents genres de papiers, des grammages distincts pour, précise-t-elle, « montrer que la lenteur n’a rien d’ennuyant ». Le livre, dans un format horizontal, a un côté large, qui constitue la partie principale du livre, et l’autre très étroit. « Pour illustrer l’idée que la vie a plusieurs aspects, avec une marge où de nombreux événements peuvent avoir lieu alors qu’ailleurs, c’est la routine. » Le livre est en noir et blanc, excepté une page rouge, comme pour imposer un arrêt, un moment de réflexion. Ponctué de pensées, phrases que l’auteur sème sur ces pages blanches, de sons, de chiffres, compte à rebours d’un instant qui s’échappe, avec pause, puis « rewind », s’affiche le programme d’une journée type de Sarine, « qui serait la même, inlassablement, le lendemain et le jour d’après ». Dans Abeyance, comme dans la vie en général, selon l’auteur, la gauche peut remplacer la droite, l’ordre des choses peut être inversé, pourquoi pas, pense-t-elle, s’il provoque un arrêt sur image, sur un certain mécanisme qui empêche d’apprécier les choses. « Mon livre est fait pour méditer, remettre sa vie en question, recommencer à sentir les plaisirs simples qui se perdent. Pour moi, imprimer ce livre, conclut-elle, a fait partie de ce processus. » Carla HENOUD * En vente à la galerie Art Lounge.
« Abeyance » : immobilisme temporaire, désuétude ou inactivité. Le titre de l’ouvrage de Sarine Tchilinguirian exprime à sa façon étrange le fruit de recherches qu’elle a menées durant une année sous forme de diplôme en graphic design. Le thème, en clair, évoque la lenteur, la sensualité qui entoure chaque moment pensé, senti, lentement assimilé, bref dégusté. Deux ans...